Renationalisation d'EDF : l'Etat franchit le seuil crucial des 90% du capital

L'Etat français a franchi le seuil de 90% du capital d'EDF, lui permettant de sortir le groupe de la cote à la Bourse de Paris. Mais l'issue de l'OPA dépend encore d'une décision de justice. La grogne des petits actionnaires qui s'estiment lésés ne faiblit pas.
L'offre de rachat, ouverte le 24 novembre, devait initialement se conclure le 22 décembre. Mais l'AMF a décidé le 7 décembre de repousser ce délai.
L'offre de rachat, ouverte le 24 novembre, devait initialement se conclure le 22 décembre. Mais l'AMF a décidé le 7 décembre de repousser ce délai. (Crédits : Reuters)

C'est une renationalisation qui intervient dans un contexte politique mais aussi international tendu. En pleine réforme des retraites, la tension sociale et les grèves annoncées dans le secteur de l'énergie ajoutent de la pression sur le gouvernement bien décidé à achever la renationalisation de l'énergéticien, dont il possède déjà 84%. Vendredi, l'Etat a franchi le seuil de 90% du capital d'EDF et pourra procéder au retrait des actions de la Bourse de Paris, a annoncé le ministère de l'Economie.

« L'Etat a franchi le 19 janvier 2023 le seuil de 90,00% du capital et des droits de vote théoriques de la société EDF sur une base entièrement diluée. En conséquence, l'Etat sera en mesure, à l'issue de l'offre, de procéder à la mise en oeuvre du retrait obligatoire sur les actions EDF dès lors qu'il convertira les (obligations) OCEANEs EDF déjà en sa possession », déclare Bercy.

L'opération, chiffrée à 9,7 milliards d'euros, est stratégique pour l'Etat, qui veut construire six réacteurs nucléaires de nouvelle génération EPR, avec une option pour huit autres.

Ce rachat doit donner à l'exécutif les coudées franches pour diriger le groupe et mener à bien notamment le vaste chantier du renouvellement du parc nucléaire français.

L'entreprise se trouve aujourd'hui en grande difficulté, minée par une dette colossale de 41 milliards d'euros fin 2021, qui pourrait flamber à plus de 60 milliards d'euros. Aussi, alors que la guerre en Ukraine presse à trouver des alternatives au gaz russe, EDF doit gérer un parc nucléaire en grande partie en maintenance.

Les petits actionnaires sortis du capital

Ce qui signifie ne pas avoir à consulter les 16% d'actionnaires privés. Lesquels se sont, pour une partie d'entre eux, estimés lésés par la cession contrainte de leurs actions à un prix fixe. Ainsi, il pourra à l'issue de l'offre engager un retrait obligatoire des actions EDF de la Bourse de Paris, c'est-à-dire forcer les actionnaires minoritaires restants à vendre leurs parts, car ceux-ci représentent à présent moins de 10% du capital et des droits de vote.

L'offre a été déposée en octobre au prix de 12 euros par action EDF et 15,52 euros sur les obligations convertibles « océanes » 2024 existantes. Ces petits actionnaires sont pour la plupart des salariés ou d'anciens salariés retraités d'EDF, pour qui le prix de rachat, actuellement fixé par l'État à 12 euros par action, est insuffisant.

Ce prix a été validé par le rapport d'un expert indépendant, mais les petits actionnaires estiment que l'entreprise est sous-évaluée et qu'elle a été injustement pénalisée dans ses recettes par un mécanisme imposé par l'État (Arenh) l'obligeant à vendre du courant à bas prix à des fournisseurs alternatifs.

Sur le plan boursier, il s'agit donc d'un cap décisif franchi par l'Etat dans le cadre de son offre publique d'achat (OPA), dont la date butoir avait été repoussée sine die en raison d'un recours en justice des actionnaires minoritaires.

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Une action juridique en cours

L'offre de rachat, ouverte le 24 novembre, devait initialement se conclure le 22 décembre. Mais l'AMF a décidé le 7 décembre de repousser ce délai « dans l'attente de la décision de la cour d'appel de Paris sur la demande de sursis » déposée par un groupe d'actionnaires minoritaires mécontents du prix proposé.

« On voit que la situation est en train de s'enliser, alors qu'il suffirait de trouver un accord avec un relèvement du prix qui convienne à toutes les parties, pour que les recours cessent et que les opérations puissent être menées à bien », dit Martine Faure, cheffe de file des petits porteurs frondeurs, à l'origine de nombreux recours judiciaires intentés depuis des mois.

L'audience pour examiner ce sursis est prévue le 25 janvier. Une autre audience est ensuite prévue au fond, le 23 mars, à la chambre de la régulation économique et financière de la Cour d'appel.

Plus largement, la question reste en suspens de savoir comment l'Etat, lorsqu'il sera seul maître à bord de l'entreprise, compte donner à EDF les moyens de construire six réacteurs nucléaires de nouvelle génération EPR, avec une option pour huit autres.

Ce chantier coûtera des dizaines et des dizaines de milliards d'euros, alors que les finances d'EDF sont grevées par une dette record approchant les 60 milliards.

(Avec agences)

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Commentaires 2
à écrit le 21/01/2023 à 18:07
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Comme dirait MACRON et en même temps il faut solder le projet de démantèlement d'EDF voulant par Bruxelles et aussi reprendre notre indépendance énergétique ELECTRIQUE.

à écrit le 21/01/2023 à 17:16
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SNCF,RATP,et maintenant EDF et c'est ratés sur les EPR avec 10 ans de retard va couter aux contribuables une fortune avec des tarifs exorbitant pour renflouer les deficites !!!

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