Veolia irrigue sa stratégie 2020-2023 de sa raison d'être

L'objectif est de "faire de Veolia l'entreprise de référence pour la transition écologique". Elle est donc guidée par une priorité: "la recherche de l'impact positif maximal, sociétal, environnemental et financier".
Giulietta Gamberini
18 indicateurs de performance construits sur le fondement des ODD et censés profiter à l'ensemble des parties prenantes serviront désormais à établir la part variable de la rémunération des cadres supérieurs du groupe, à hauteur de 30%.

Parmi les patrons français, Antoine Frérot, le PDG de Veolia, est l'un des plus anciens partisans de la "raison d'être" des entreprises, désormais reconnue par la loi Pacte (Plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises). Son groupe a d'ailleurs été l'un des premiers à s'en doter en France, dès avril 2019.

"La raison d'être de Veolia est de contribuer au progrès humain, en s'inscrivant résolument dans les Objectifs de Développement Durable définis par l'ONU, afin de parvenir à un avenir meilleur et plus durable pour tous", lit-on depuis sur le site de l'entreprise.

Alors qu'"elle prend tout son sens face à la crise environnementale" sans précédent que vit le monde, l'heure est venue de sa mise en oeuvre, estime Antoine Frérot. "Elle a donc guidé l'élaboration du plan stratégique" à horizon 2023 de Veolia, "Impact 2020", a-t-il expliqué vendredi 28 février.

A la recherche de l'"impact positif maximal"

Issue également de la consultation des parties prenantes, toute cette stratégie vise à "faire de Veolia l'entreprise de référence pour la transition écologique": non plus seulement "être leader" mais devenir "l'entreprise qui défriche l'avenir et met au point les solutions et les standards". Elle est donc entièrement sous-tendue par une priorité: "la recherche de l'impact positif maximal, qu'il soit sociétal, environnemental et financier", a insisté le PDG.

Ce dernier critère gouvernera notamment pendant les quatre années à venir les choix inhérents aux investissements, auxquels seront consacrés 5 milliards, ainsi qu'aux cessions d'activités prévues, de 3 milliards -les deux menés en parallèle, afin que la dette ne dépasse jamais le triple de l'Ebitda. Et c'est ainsi sur ce fondement que le patron de Veolia a distingué trois types d'activités: "celles à accélérer, optimiser et ralentir ou céder".

Déchets dangereux et plastique

Les premières sont celles qui permettent de réduire les émissions et la pollution des clients de Veolia, dont la demande par ailleurs croît, sous la pression des nouvelles réglementations. Il s'agit notamment de la gestion des déchets dangereux, "métier inventé par Veolia il y a 45 ans et dont l'entreprise reste leader", souligne Antoine Frérot. Veolia possède déjà un "réseau d'actifs à travers le monde", et l'ambition est de porter le chiffre d'affaires de cette activité de 2,5 milliards en 2019 à 4 milliards en 2023, a ajouté Estelle Brachlianoff, directrice générale adjointe chargée des opérations.

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Les activités "à accélérer" comprennent également le recyclage du plastique, dans lequel Veolia est présent seulement depuis cinq ans, mais qui a le vent en poupe, grâce à la pression de l'opinion publique. Les engagements de plusieurs marques à intégrer davantage de plastique recyclé dans leurs emballages sont une aubaine pour Veolia, qui "possède tant la technique que le gisement", et qui a déjà souscrit des partenariats avec des multinationales telles que Danone, Unilever et Nestlé. L'objectif est donc de passer de 320 à 800 millions de chiffre d'affaires, précise Estelle Brachlianoff. Les services d'efficacité énergétique, la valorisation des biodéchets, la gestion des eaux et des parcs industriels sont autant d'activités d'avenir selon le groupe.

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Plus de charbon dans les réseaux de chaleur

Les activités à optimiser, voire réinventer, en améliorant notamment la performance et en proposant de nouveaux services, sont en revanche celles sur lesquelles le groupe a construit son empire: la gestion des eaux municipales et des déchets banaux. Ainsi que les réseaux de chaleur, que Veolia promet de verdir. Afin de réduire ses propres émissions, le groupe compte ne plus en alimenter aucun au charbon d'ici 2030, en substituant ce fossile par des énergies renouvelables. Le groupe consacrera 400 millions d'euros à ce projet avant 2030.

Dans leur ensemble, ces activités "à accélérer" ou "à optimiser" doivent permettre aux clients de Veolia d'éviter l'émission de 15 millions de tonnes de CO2 avant 2023. Et globalement, les 5 milliards consacrés aux investissements profiteront majoritairement aux projets hors Europe, à la clientèle industrielle et à la croissance externe, a précisé Antoine Frérot. Les acquisitions sont déjà listées, organisées par ordre d'intérêt et étalées sur les quatre ans, a révélé Frérot.

300 millions seront spécifiquement consacrés à l'innovation, notamment autour de six enjeux, choisis en fonction de leur impact ainsi que de ses compétences:  les nouveaux polluants, l'adaptation au changement climatique, la création de nouvelles filières de recyclage, les services énergétiques, les services digitaux, et l'alimentation -nouveau métier pour Veolia, mais où elle compte mettre un pied via la valorisation des déchets organiques.

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Plus de construction d'usines de traitement de l'eau

Quant aux activités où Veolia compte moins investir ou dont elle veut se débarrasser, ce sont celles où le groupe peine à apporter une valeur ajoutée, car "parvenues à maturité" ou devenues trop concurrentielles, a expliqué Antoine Frérot. C'est le cas de la construction des usines de traitement de l'eau, que le groupe dorénavant laissera à ses partenaires ou sous-traitera, pour se concentrer sur l'offre de technologies et services innovants. "Cela impliquera une plus grande sélection des projets en fonction de leur valeur ajoutée, et une baisse du chiffre d'affaires de Veolia Water Technologies, mais de meilleures marges", a noté Estelle Brachlianoff.

De même, les activités de collecte des déchets seront limitées aux cas où "elles donnent accès au traitement". Le simple facility management sera aussi abandonné, au profit de services "aidant les clients à réduire leur empreinte environnementale". Des 3 milliards de cessions envisagées, un milliard ont d'ailleurs déjà été réalisées, avec la vente en 2019 des réseaux de chaleur et de froid aux Etats-Unis, qui "dans ce contexte" n'étaient plus créateurs de valeur. Tout en refusant de détailler les actifs concernés, Frérot a admis que les désinvestissements et leur timing sont déjà identifiés.

Cette stratégie pourra s'appuyer sur des résultats 2019 dépassant les objectifs: un chiffre d'affaires en progression de 4,8%, à 27,19 milliards d'euros, et un bénéfice net (part du groupe) de 624,9 millions, en hausse de 41,8% -grâce notamment à la cession des réseaux de chaleur américains. Mais elle sera aussi soutenue par des réductions des coûts d'un milliard d'euros sur les quatre ans.

 La performance de la raison d'être mesurée

 Les résultats apportés par la mise en oeuvre de la raison d'être à l'ensemble des parties prenantes seront mesurés et suivis année après année, via 18 indicateurs de performance construits sur le fondement des ODD et censés ne négliger personne: actionnaires, salariés, clients, mais aussi société et planète, a promis Antoine Frérot. Ces indicateurs serviront également à établir la part variable de la rémunération des cadres supérieurs du groupe, à hauteur de 30%.

Mais, bien que Veolia "vise plus l'impact que la taille" du chiffre d'affaires, cette approche s'accompagnera aussi d'une "croissance solide", a promis Antoine Frérot. En 2023, l'Ebitda devra atteindre 4,7-4,9 milliards d'euros à change constant. Et le dividende, proposé à 1 euro par action pour 2019, devrait grimper à 1,30 en quatre ans.

Giulietta Gamberini

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Commentaires 2
à écrit le 02/03/2020 à 9:54
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Il faut marier Veolia et Suez et ainsi devenir un géant mondiale !

à écrit le 02/03/2020 à 8:45
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""faire de Veolia l'entreprise de référence pour la transition écologique"" Avec une augmentation permanente et forte des abonnements vous ne faites que générer l'inverse et je ne parle pas de l'eau de plus en plus mauvaise en plus d'être de plus...

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