Le DIF, une révolution culturelle au ralenti !

Par Patrice Chassagne, associé CAA (cabinet de conseil et formation).

Malgré des statistiques récentes encourageantes, l'utilisation du droit individuel à la formation (DIF) reste majoritairement confidentielle et sa promotion limitée à l'exception de quelques entreprises à l'avant-garde d'une révolution culturelle qui peine à trouver ses marques et son public.

Depuis sa mise en place, le DIF n'a pas été compris ou accepté sur le fond et est ainsi devenu l'objet de contresens tant de la part des entreprises que des salariés. Il y a ceux qui craignant la bombe à retardement financière de l'accumulation des heures (20 heures par an/salarié, cumulables sur six ans) ont non sans opportunisme transféré ce dispositif vers le plan de formation, en rendant « difcompatibles » des formations déjà inscrites au plan de formation, ou en obligeant les salariés à consommer artificiellement du DIF. Il y a ceux qui pensent qu'un capital de 60/80/120 heures permettra de bénéficier d'une formation plus riche, plus performante, voire qualifiante. Tous se sont finalement éloignés de la philosophie du législateur (pas forcément dépenser plus, mais dépenser autrement en repensant les politiques de formation et leurs modalités), vidant de son sens et de son utilité ce volet de la réforme.

D'où vient ce malentendu si largement partagé?? Un contresens quantitatif tout d'abord. Face à des évolutions de plus en plus rapides et imprévisibles, bien malin est celui ou celle qui connaît la formation dont il aura vraiment besoin dans quatre, cinq ou six ans?! Il est absolument évident que sur une longue période (quinze-vingt ans), la consommation annuelle de formation (ou au maximum tous les deux ans) produira un volume beaucoup plus important qu'une consommation discontinue. Un contresens qualitatif, lié à la vocation même du DIF.

Le DIF doit être au service des compétences « techniques » métiers par différence avec des compétences plus transversales, plus culturelles. Les accords de branche ont bien enfoncé le clou?! L'idée d'un DIF « utilitaire », centré sur des fondamentaux techniques, est un autre contresens qui complète et aggrave les précédents. Ce sont les salariés qui ont tout compris au DIF et les statistiques le démontrent bien. Le DIF s'oriente essentiellement vers trois types de formation?: les langues, les nouvelles technologies-Internet, le développement personnel.

Ce ne sont pas des stratégies individualistes, pour ne pas dire égoïstes, qui sont mises en place, comme le déplorent certains esprits éclairés. Il faut au contraire se réjouir de la façon dont les salariés se sont emparés de ce nouveau droit. Ils ont parfaitement compris que le DIF était fait pour eux « personnellement » et que les développements de compétences strictement métiers appartenaient aux politiques des entreprises et/ou relevaient d'autres dispositifs.

Mieux encore, ils ont compris (consciemment ou intuitivement) que ces trois domaines de formation constituaient des socles communs à tous les métiers pour potentialiser et développer les compétences « expériencielles » acquises au quotidien et ainsi maintenir une employabilité transverse. Il y a enfin, pour ceux qui n'avaient plus bénéficié de formation depuis longtemps, la redécouverte du « plaisir d'apprendre ». A ce jour, l'offre DIF reste généralement un simple découpage mécanique de formations existantes (et pertinentes?!) en modules de vingt ou vingt et une heures. Si l'on veut que le DIF soit autre chose qu'une simple modalité de consommation, il est nécessaire de repenser une offre véritablement cohérente avec un objectif de développement continu des potentiels individuels d'adaptation.

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Commentaires 2
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Enfin une analyse cohérente du DIF et de sa mise en pratique qui relativise l'article de Jean Wemaëre président de la Fédération de la formation professionnelle, je cite "une étude récente (enquête Kelformation et « 20 Minutes » réalisée sur un écha...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Même si le salarié a tout compris, c'est l'entreprise qui dispose et pour les seniors proches de la retraite les demandes sont ignorées jusqu'à l'arrivée de la retraite et la perte des heures de DIF....

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