Pourquoi les banques espagnoles résistent mieux

Par Peter Walton, co-titulaire de la chaire Financial Reporting (ESSEC-KPMG), et Eric Ropert, associé chez KPMG.

Tel Charlie McCreevy, commissaire européen chargé du marché intérieur et des services, nombreux sont ceux qui se sont intéressés aux provisions dites "dynamiques". Ces provisions très spécifiques sont supposées avoir protégé les banques espagnoles des pires effets de la crise financière et limitées les dégâts de la "procyclicité". Cependant, une première étude du normalisateur international suggère que cette astuce comptable est difficile acceptable à l'échelle internationale.

Lors de la réunion semestrielle entre l'IASB (normalisateur international) et le FASB (normalisateur américain) la semaine dernière, l'équipe technique de l'IASB a présenté une étude sur les provisions pour pertes attendues et dans le cadre du système espagnol. Le rapport explique que le système espagnol prévoit que les banques constituent des provisions supplémentaires en période de forte croissance, celles-ci pouvant être utilisées pour protéger leur capitaux propres en période défavorable. Le lien entre l'évaluation des instruments financiers à la juste valeur, les variations de juste valeur affectées en résultat et la disparition des capitaux propres minimums réglementaires qui déclenche la vente des actifs à bas prix (ce que l'on appelle la procyclicité) pourrait être ainsi limité.

L'IASB s'attend à ce que lui soit demandé lors de la réunion du G20 qui a lieu cette semaine de réfléchir à la possibilité de rédiger une norme qui préconiserait l'utilisation par les banques de provisions dynamiques, dans le but d'améliorer leur stabilité financière. Le normalisateur international souligne cependant dans son rapport que le mécanisme espagnol est calqué sur des données de l'économie espagnole et ne peut être généralisé dans une norme destinée à être appliquée partout dans le monde : retour au point de départ !

L'IASB est, néanmoins, sensible aux inconvénients de leur approche actuelle qui consiste à attendre que des pertes soient constatées par les banques avant de constituer une provision. Le rapport présente un cas justifiant la création de provisions pour pertes anticipées. Sur une période donnée, une banque va émettre un certain nombre de prêts ; statistiquement, il est presque certain qu'une proportion (faible) des prêts ne sera pas remboursée. La banque devrait donc commencer dès le premier jour à doter une provision au titre du portefeuille de prêts. La dotation serait calculée sur le base de l'expérience passée de la banque et éventuellement en tenant compte de la période dans le cycle économique.

Lors du débat à la réunion de l'IASB avec le FASB, Thomas Linsmeier (membre du FASB) a constaté qu'il était dans la nature humaine de sous-estimer les pertes en périodes de croissance, et de surestimer les risques en périodes de crise. James Leisenring (membre de l'IASB) a critiqué ce système indiquant qu'il n'était qu'un outil de lissage des résultats.

Le normalisateur britannique par contre est assez favorable à ces provisions dynamiques. En revanche, il considère que l'évaluation d'une telle réserve devrait être du ressort de la direction de la banque et du régulateur sans intervention du normalisateur comptable. En effet, une telle provision pourrait être comptabilisée comme un reclassement interne aux capitaux propres, sans transiter le compte de résultat. Reste à voir ce que le G20 dira à ce sujet !

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