Étrange atmosphère, hier. Les femmes avaient un air renfrogné. Les hommes, un air poliment compatissant. La raison?? Les avantages accordés aux mères de famille dans notre système de retraite n'en ont plus pour longtemps sous leur forme actuelle. La nouvelle du jour avait ce retentissement particulier que prennent les informations en plein été, même à "La Tribune" où l'on était au courant, puisque le sujet avait déjà été abordé dans nos colonnes le 28 mai. Jusqu'à présent, les femmes ayant élevé des enfants obtiennent une bonification équivalant à deux années de cotisation retraite par enfant. Un jugement récent de la Cour de cassation a donné raison à un homme qui considérait comme discriminatoire cette majoration uniquement attribuée aux femmes. Si un père obtient l'avantage en question, tous les autres peuvent y prétendre à leur tour en s'appuyant sur la jurisprudence. Or, les finances déjà chancelantes des caisses de retraite n'y résisteraient pas: la bonification coûte 6 milliards d'euros par an, elle doublerait mécaniquement. Voilà pourquoi, bon gré mal gré, le gouvernement va devoir modifier les règles d'attribution de cet avantage familial (a priori, un autre avantage qui accorde 10 % de hausse des pensions aux parents ayant élevé trois enfants ou plus n'est pas concerné). C'est là qu'on commence à faire de la politique. L'entourage du ministre des Affaires sociales, Xavier Darcos, ne s'amuse pas à envoyer un communiqué sur un sujet aussi sensible à l'AFP un après-midi d'août pour rien. Il s'agit manifestement de lancer le débat, ou plutôt de tâter le terrain. Au juger, une réforme qui consisterait à supprimer purement et simplement les deux ans par enfant n'a aucune chance. Les élus UMP ne pourraient plus sortir dans la rue sans être pris à partie par des mères de famille vengeresses. Et souvent, il s'agirait de leurs propres électrices. La famille est un socle idéologique pour la droite, et les deux ans font partie de la politique familiale. Une astuce consistant à lier l'avantage à l'accouchement déclencherait des réactions politiquement correctes: et les femmes ayant adopté, alors? La gauche ne serait pas en reste. Les féministes pures et dures - on assume l'égalité, tant pis pour l'avantage - risquent d'être submergées par ceux qui raisonnent "social": les carrières des femmes sont moins longues et leurs retraites en moyenne deux fois moins élevées que celles des hommes, il n'est que justice qu'elles gardent leurs deux ans. Les lobbies peuvent fourbir leurs armes, la bagarre ne fait que commencer.
Pas de panique, Mesdames
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