Dans le contexte de la crise économique actuelle, il est difficile de soutenir que nous ne devons pas concentrer tous nos efforts sur l'emploi et sur la croissance, mais peut-on considérer ces efforts comme une solution réellement efficace sur le long terme ? Non ! Nous devons également nous demander quels types d'emplois et de croissance nous voulons créer. Nous ne devons pas seulement améliorer nos systèmes économiques, nous devons les transformer.

Au cours du XXème siècle, notre production économique a été multipliée par quarante et notre niveau de vie s'est amélioré de manière spectaculaire. Mais il y a un prix à payer, et notre économie et notre niveau de vie étaient fondés sur une utilisation non durable de ressources limitées (carburants, métaux, minéraux, écosystèmes, etc...). Il y a cent ans, lorsque la population mondiale ne s'élevait qu'à 1,5 milliard d'habitants, on ne se souciait pas de ce problème. De nos jours, elle s'élève à 7 milliards d'habitants.

Si nous continuons à dilapider nos ressources comme nous le faisons aujourd'hui, il nous faudra l'équivalent de deux planètes pour subvenir à nos besoins. Pour remédier à la rareté de nos ressources, il ne faut pas stopper la croissance économique, mais utiliser moins pour produire plus et remplacer, réutiliser, réparer et recycler ce que nous produisons. Il faut cesser de gaspiller nos ressources et commencer à vivre en tenant compte des limites physiques et biologiques de notre planète.

L'économie et l'environnement non seulement peuvent, mais doivent aller de pair. L'utilisation efficace des ressources et la compétitivité ne sont pas incompatibles. Nous pouvons observer dès aujourd'hui, en Europe, que les pays qui utilisent les ressources de la manière la plus efficace sont également parmi les plus compétitifs.

Pour pouvoir être demain au nombre des meilleurs, l'Europe doit amorcer ce changement dès maintenant. Avons-nous le choix ? Compte tenu de ces éléments, et étant donné que l'Europe dépend fortement de l'importation de nombreuses ressources clés qui deviennent de plus en plus rares et dont le prix risque d'augmenter, la réponse est évidemment "non". En revanche, nous avons la possibilité de conduire ce changement de manière à ménager une transition moins pénalisante pour les entreprises qui ont besoin de temps pour s'adapter, et plus gratifiante pour celles qui peuvent y parvenir plus rapidement.

Les instances réglementaires peuvent, par exemple, modifier le comportement des consommateurs et des marchés en garantissant des prix qui reflètent la valeur réelle des ressources, en faisant peser la charge fiscale sur les ressources plutôt que sur le travail, et en mettant fin aux subventions préjudiciables à l'environnement. Nous pouvons encourager l'éco-innovation et "écologiser" les marchés publics. Nous pouvons investir dans la recherche et les technologies qui soutiennent cette tendance.

Vous et moi, en tant que consommateurs, pouvons jouer un rôle décisif en faisant des choix éclairés afin de réorienter nos économies. Nous pouvons choisir d'acheter des biens de consommation produits de manière durable, plus économes en énergie, avec moins d'emballages, un cycle de vie plus long, et qui peuvent être réparés ou recyclés.

Le 20 septembre, la Commission européenne publiera une feuille de route (*) qui donnera un aperçu des moyens de parvenir à une utilisation plus efficace des ressources, ce qui est essentiel pour notre bien-être et notre prospérité future. Transformer notre système économique pour le rendre plus économe en ressources est un grand défi mais si nous faisons preuve d'autant d'ingéniosité et si nous employons autant d'énergie à accroître la productivité des ressources et à réduire notre impact sur l'environnement qu'à améliorer la productivité du travail grâce aux technologies et aux entreprises innovantes, nous pourrons transformer nos économies pour les engager sur une voie durable.

Si nous échouons, je crains que la prochaine génération ne juge notre crise économique actuelle tout à fait gérable comparée à celle qu'elle pourrait avoir à affronter.

(*) La feuille de route de la Commission européenne pour une utilisation efficace des ressources en Europe peut être consultée à l'adresse suivante : https://ec.europa.eu/environment/resource_efficiency/index_en.htm