Au secours l'inflation revient : la fausse alerte !

La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, au secours l'inflation revient... fausse alerte !

L'inflation : le retour. Ce n'est pas moi qui le dis, mais le chef économiste de la BCE, le belge Peter Praet, lors d'un discours à Berlin : « les signaux montrant une convergence de l'inflation vers notre objectif s'améliorent » a-t-il ainsi déclaré. Les chiffres globaux lui donnent raison, la courbe des prix a repris son ascension, avec un grand coup d'accélérateur depuis peu, si bien que la cible des 2% est quasiment déjà atteinte. Ceci n'est pourtant pas de l'inflation comme le suggère l'évolution des prix hors carburant, tabac et produits alimentaires, en d'autres termes l'inflation sous-jacente. C'est le cœur de l'inflation qui élimine les composantes les plus volatiles et permet de dégager ainsi la tendance de fond des prix. Or, ce cœur bat lentement, autour de 1% depuis quatre ans et il serait très aventureux de déceler une rupture ou d'en anticiper une à court terme.

Pas d'effets de second tour (pour le moment)

Car si les prix grimpent actuellement un peu partout en Europe, c'est parce que le cours du pétrole ont fortement augmenté depuis le début de l'année et se retrouvent à leur pic depuis près de quatre ans. Or, la chaine est courte entre le baril et la pompe à essence ou la cuve à fioul et dans les faits, une hausse brutale du Brent se transmet quasi-immédiatement aux prix comme le dévoile la superposition des courbes du Brent et de l'inflation depuis 2004. Ce phénomène n'est pas encore terminé et un simple maintien des cours à leur niveau actuel montre que l'effet inflationniste de l'or noir sera à son pic cet été avant de s'atténuer par la suite.

Pour transformer cette poussée des prix de l'énergie en véritable inflation, il faudrait que les « effets de second tour » soient suffisamment puissants pour faire changer la trajectoire de l'inflation sous-jacente. Cela peut se faire à travers deux circuits. L'un très direct : certains biens et services inclus dans l'inflation sous-jacente utilisent directement du pétrole ou ses dérivés. L'autre plus indirect, en déclenchant une boucle prix-salaire : la hausse du prix du pétrole se transmet à l'inflation générale, ce qui conduit à une accélération des salaires qui peut devenir problématique lorsque ces derniers prennent de vitesse les gains de productivité. Pour éviter une baisse des profits, les entreprises augmentent alors leurs prix, et ainsi de suite.
Or le coût salarial unitaire de la zone euro, c'est-à-dire le ratio entre le coût de la main d'œuvre et la productivité ne montre aucune dérive : cela fait maintenant 4 ans que son évolution reste bloquée autour de 1%.

Le jeu de la concurrence atténue l'inflation

L'accélération des gains de productivité est passée par là. Dans le sillage de la reprise, l'embellie des débouchés, a mis les facteurs de production en tension, et s'est convertie en gains de productivité. Mais pas que. Les salaires et traitements bruts sont également très sages, ou du moins, anormalement sages à ce moment du cycle. Ils évoluent autour de 2% depuis 2013, pas plus.

Quant à la transmission de la hausse des prix de l'énergie aux grandes secteurs utilisateurs, elle est très partielle, même dans les services liés aux transports, en prise directe avec les coûts des carburants, la tendance, jusqu'en avril dernier, était à la baisse.

Il faut se rendre à l'évidence, les cycles d'inflation sont depuis plus de 15 ans écrasés et centrés autour de 1-2%. Difficile alors de se référer à une régularité passée pour évoquer un risque imminent de surchauffe. Seuls demeurent des cycles amples sur les ressources rares, les matières premières ou agricoles, dont l'offre ne se décrète pas. Mais cette instabilité en amont est de moins en moins transmise aux autres prix, parce que la concurrence devient de plus en plus intense. D'abord du fait de l'ouverture croissante des marchés et de la prolifération de concurrents venus de pays à faibles coûts. Ensuite parce que la transformation numérique participe très largement à l'intensification de la concurrence, à tous les niveaux. Dès lors la menace de l'inflation sur les biens et services en zone euro n'est qu'une menace fantôme.

>> Plus de vidéos sur le site Xerfi Canal, le médiateur du monde économique

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Commentaire 1
à écrit le 09/08/2018 à 9:46
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Voilà, notre pouvoir d'achat baisse du fait des serviteurs des riches au pouvoir, du coup on voit mal comment les prix pourraient augmenter alors que l'on a plus d'argent à dépenser. Tout ceci ne sont que des fausses nouvelles pour essayer de rév...

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