Cessons de nous faire dicter nos lignes rouges par Vladimir Poutine

OPINION. Dans le conflit qui oppose l'Ukraine à la Russie, il y a un seul agresseur ! Par Arthur de Liedekerke et Hector de Rivoire(*).
Hector de Rivoire et Arthur de Liedekerke (de gauche à droite)
Hector de Rivoire et Arthur de Liedekerke (de gauche à droite) (Crédits : DR)

Qui viole le droit international et l'intégrité territoriale de son voisin. Un seul pays qui s'affranchit régulièrement des normes et conventions les plus élémentaires. Qui mène une guerre d'une violence inouïe envers les populations civiles. Pourquoi donc devrions-nous nous faire dicter par Vladimir Poutine les termes de notre soutien à l'Ukraine pour repousser l'envahisseur ?

La petite musique avait pourtant commencé à s'installer. Empêcher à tout prix « l'escalade militaire de trop ». S'il semble naturel d'éviter toute manœuvre qui mène à une confrontation directe de l'OTAN ou des pays de l'Union européenne, il est aussi bon de le rappeler : qui a provoqué cette escalade en premier ?

Pourtant, dans notre rhétorique, nous avons souvent tergiversé, inhibé par cette perspective de l'escalade, de ce fameux palier franchi vis-à-vis de la Russie. L'équilibre entre un soutien diplomatique, matériel et financier des États européens et leur basculement dans la guerre est certes fragile mais nous avons parfois péché par excès de prudence.

Les besoins ukrainiens sont pourtant tels qu'ils justifient une intensification de notre soutien. Aujourd'hui, il faut permettre aux Ukrainiens de mener une contre-offensive, de reconquérir leur territoire. Tout leur territoire. Au minimum, d'être en position de force pour d'éventuelles négociations.

Le temps presse !

Car Vladimir Poutine joue la montre. Il compte sur la lassitude des opinions publiques des soutiens de l'Ukraine. Il parie sur le poids des hausses du prix de l'énergie dans le moral des ménages. Et sur l'arrivée du printemps pour lancer une offensive majeure.

Deux ajustements pour les partenaires de l'Ukraine s'imposent. D'abord, accélérer et amplifier l'aide militaire fournie. O. Schmitt le proclame avec justesse dans son papier pour le Grand Continent : une livraison d'avions de combat ou de chars lourds ne constitue pas, en soi, une escalade sur le théâtre ukrainien, mais plutôt un rééquilibrage des rapports de force.

En finir avec tant de prévisibilité, de transparence stratégique

L'ambiguïté, le flou sur la nature de l'aide occidentale (tout en prenant évidemment soin de ne pas faire rentrer de dynamique nucléaire en jeu) auraient pu permettre d'éviter des reculades publiques répétées sur le matériel livré et éventuellement de décourager certains agissements russes. N'avons-nous rien appris de la chute de Kaboul, où une communication du calendrier et des intentions américaines, a donné à l'adversaire les éléments pour les défaire ?

Si nous ne donnons pas à l'Ukraine les moyens de gagner, quelle est l'alternative ? Rentrer dans une logique d'apaisement face à un tyran sanguinaire ? Accepter qu'un pays puisse, à sa guise, envahir et annexer des territoires ? Raser des villes entières et bombarder des cibles civiles en toute impunité ?

Nous donnons déjà beaucoup, certes. Mais il est illusoire de croire qu'une paix durable pourra s'installer sans une défaite militaire russe sur le terrain. Car comme le disait le dissident russe Alexandre Sobkov dans un récent article pour Desk Russie, « il n'y a aucun moyen de contraindre le régime de Poutine à se retirer volontairement de ces territoires. » L'Ukraine se bat tant pour sa survie, que pour le futur de l'Europe. Alors, cessons de nous faire dicter nos lignes rouges par l'agresseur.

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(*) Arthur de Liedekerke est directeur des affaires européennes au sein du cabinet de conseil en géopolitique Rasmussen Global et chercheur associé à l'Université de Kiel. Hector de Rivoire est maître de conférences à Sciences Po (école de management et d'innovation) en économie numérique et membre de l'équipe affaires globales de Microsoft.

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Commentaire 1
à écrit le 21/02/2023 à 19:55
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Personne n'a envie de reconnaitre qu'il s'est fait manipuler et préfère en rajouter pour se donner bonne conscience ! Mais le silence est la meilleure politique ! Non ? ;-)

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