La Présidence française de l’UE, une belle occasion de mettre l’économie circulaire au cœur de l’action européenne

OPINION. Répondre à l’urgence écologique et climatique suppose d’adapter nos modes de production, de distribution et de consommation à la protection de notre planète, de ses ressources et de notre biodiversité. Afin de lutter contre le gaspillage, de renoncer au tout jetable, de trouver des ressources nouvelles et secondaires, de la réduction au recyclage et au réemploi des emballages et des papiers, plusieurs solutions sont sur la table. La période à venir sera déterminante pour accélérer la prise de conscience mondiale sur la crise climatique et traduire en politiques publiques les engagements pris lors de la COP 26. Par Jean Hornain, Directeur général de Citeo.
(Crédits : DR)

L'économie circulaire est un pilier majeur de la transformation de notre modèle et doit être au cœur des réflexions et des politiques publiques pour limiter l'impact du réchauffement climatique. Dans ce contexte singulier et majeur, comment l'économie circulaire peut-elle guider, en Europe, la transformation de notre modèle actuel ? Quelles mesures la France peut-elle pousser en 2022 à l'occasion de sa présidence de l'Union européenne ?

Pour une cohérence des politiques économie circulaire et des objectifs plastiques

Alors que l'Union européenne affiche un taux de circularité de ses ressources à hauteur de 12,8% en 2020 et que la France affiche un taux de 22% ; il est nécessaire d'accélérer et d'approfondir les efforts entrepris. Pour augmenter les performances de circularité, les mesures doivent intégrer les impacts environnementaux dans leur globalité : aussi bien le climat que la biodiversité, la compréhension par les citoyens des dispositions et le fléchage des investissements pour les industriels.

La France a rehaussé son ambition en 2020 et 2021 par l'intermédiaire de deux lois (la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire, puis la loi Climat et résilience). Désormais, à l'échelon européen, il est nécessaire d'appréhender les enjeux de réduction, de réemploi et de recyclage pour assurer une cohérence des objectifs, des financements et des solutions, tout en respectant les principes du marché intérieur européen.

Pour des incitations économiques à la hauteur des enjeux d'écoconception

Entre 1990 et 2019, l'Union européenne a découplé ses émissions de gaz à effet de serre (-24%) et sa croissance économique (+60%). Toutefois, ces chiffres ne prennent pas en considération les émissions liées au commerce international.

Au cœur des propositions législatives du paquet « Fit For 55 » présenté par la Commission européenne le 14 juillet dernier, le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF), qui s'inspire du système d'échanges des quotas d'émissions, permettrait à l'Union européenne d'étendre ses règles en matière d'émissions aux entreprises présentes sur son territoire et ainsi de lutter contre les fuites de carbone. Ce mécanisme devra permettre une gestion efficace dans l'utilisation des ressources au sein du marché intérieur tout en contribuant à l'objectif de neutralité carbone.

Au regard des enjeux de l'économie circulaire, le MACF doit, pour être efficace, s'appliquer à l'ensemble des matières premières, notamment les plastiques, afin de renforcer le marché européen du recyclage et soutenir les mesures visant à intégrer de la matière recyclée, tout en comblant l'écart de prix entre matière vierge et recyclée.

Par ailleurs, nous le savons, la finance est un levier clé pour atteindre les objectifs ambitieux fixés par l'Accord de Paris. Dans cette perspective, le système de classification des activités économiques durables, tel que prévu par la fiscalité européenne, devrait reconnaitre la complémentarité entre les activités relevant de l'économie circulaire et les actions en faveur du changement climatique. Il est primordial de transposer cette mesure qui permettra d'accélérer le déploiement de l'économie circulaire prenant en compte la hiérarchie des déchets, la réduction du suremballage, la lutte contre le gaspillage alimentaire ainsi que la lutte contre certaines substances préoccupantes. Le développement de nouvelles technologies de recyclage complémentaires, comme le recyclage chimique, est également une solution concrète pour limiter l'exploitation de nouvelles ressources. Il faudra l'inclure dans la définition.

À l'échelle des États membres, la taxonomie doit avoir pour objectif de dissuader l'achat de matières premières vierges et favoriser l'achat de matières recyclées et permettre ainsi de conjuguer préservation de l'environnement et résilience industrielle.

Pour une gouvernance durable alignée aux enjeux de l'économie circulaire

En lien avec l'initiative de la Commission européenne pour une gouvernance durable d'entreprise, il est nécessaire d'améliorer le cadre réglementaire européen pour privilégier la création de valeur durable à long terme aux bénéfices à court terme. Il s'agit d'aligner les intérêts des entreprises, de leurs actionnaires et dirigeants, et de la société, en incluant l'impact environnemental des industries dans le processus comptable, en passant du rapport « extra-financier » au rapport « financier ». L'Union européenne soit se saisir de ce modèle de gouvernance pour transformer l'économie et incarner un modèle durable, capable d'intégrer les enjeux de biodiversité, climat et d'économie circulaire.

Pour un plaidoyer européen sur la mise en œuvre d'une responsabilité élargie du producteur internationale

Le concept de la responsabilité élargie du producteur (REP) est né dans les années 70. Il repose sur deux piliers : intégrer la fin de vie des produits dès leur conception pour diminuer les déchets en créant des ressources renouvelables ; et permettre une consommation plus durable.

Afin de lutter contre la pollution des espaces naturels, un projet d'accord international de lutte contre la pollution plastique sera examiné à l'Assemblée générale des Nations Unies début 2022. De nombreuses entreprises et associations environnementales soutiennent ce projet de résolution pour l'adoption d'un accord mondial juridiquement contraignant.

Pour être utile, ce traité doit promouvoir une économie circulaire englobant l'ensemble du cycle de vie des produits plastiques et les systèmes de responsabilité élargie des producteurs pour lutter au mieux contre les fuites de déchets et les intégrer à la boucle de l'économie circulaire. La France, tout comme l'Union européenne, en tant que précurseurs des politiques publiques en termes de réduction, de réemploi, de recyclabilité, d'intégration de matières recyclées, de mise en œuvre des filières de REP et de limitation de l'export des déchets, doivent être à l'avant-garde d'une réponse internationale face à cet enjeu du 21e siècle.

Alors que la Présidence française de l'Union européenne va débuter le 1er janvier prochain, de nouvelles mesures concrètes doivent être mises en application le plus rapidement possible, afin de respecter les engagements de l'Accord de Paris et pour lutter activement contre le réchauffement climatique. Il est donc urgent d'approfondir le cadre législatif et réglementaire européen pour privilégier la création de valeur durable à long terme, plutôt que les bénéfices à court terme.

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Commentaires 3
à écrit le 28/01/2022 à 9:38
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je note l'augmentation du prix du pain : le cout de la farine augmente, mais la farine et les céréales viennent de hors l'europe et hors france ! les céréales en france sont refusées par les commerces et grande distribution francaise ! cela part à la...

à écrit le 14/01/2022 à 10:10
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Abandonner une "politique de l'offre" et son éternelle, indispensable publicité aurait bien plus d'efficacité que tout "ces plans sur la comètes"!

à écrit le 14/01/2022 à 8:47
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Il s'agit d'une présidence "administrative". Arrêtons de fantasmer et de nous faire prendre des vessies pour des lanternes

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