Des masques anti-Covid pour relancer l'emploi chez un équipementier auto

Sept mois après sa naissance dans l'urgence de la première vague de la crise sanitaire, le fabricant de masques anti-Covid Barral a atteint sa vitesse de croisière. L'entreprise s'est appuyée sur l'infrastructure de l'équipementier automobile Mahle-Behr pour produire un million de masques par semaine, avec des méthodes inspirées de l'industrie 4.0.
Benoît Basier, président de Barral, a installé son atelier de confection de masques dans les locaux de l'équipementier automobile Mahle-Behr.
Benoît Basier, président de Barral, a installé son atelier de confection de masques dans les locaux de l'équipementier automobile Mahle-Behr. (Crédits : Olivier Mirguet)

Le contrat passé début novembre 2020 avec le ministère de l'Economie en atteste : Benoît Basier, président de Barral, a gagné la première partie. "Bercy nous demande de fournir des masques anti-Covid pour rétablir ses stocks. Cette commande va nous permettre de tourner à plein régime jusqu'à la fin de cette année", se réjouit le patron de cette jeune entreprise dont l'activité est entièrement dédiée à la production de masques en textile.

Né en avril dans l'urgence de la première vague de la crise sanitaire, Barral s'est installé en location dans les locaux de l'industriel automobile Mahle-Behr à Rouffach (Haut-Rhin), dans un hangar vacant de 2.500 mètres carrés. Spécialisé dans la climatisation et le chauffage des véhicules, cet équipementier allemand (12 milliards d'euros de chiffre d'affaires, 77.000 salariés dans 160 pays) a mené trois plans sociaux en six ans. Cette année, au printemps, son usine alsacienne était à l'arrêt. "Pour lancer l'activité de Barral, nous avons conclu avec Mahle-Behr un contrat de prêt de main-d'oeuvre qui a porté sur 60 salariés. Certains ont définitivement quitté leur ancien employeur et nous ont rejoints avec leur savoir-faire", raconte Benoît Basier. Barral compte désormais 110 salariés. Mahle-Behr, qui employait encore 639 personnes à Rouffach en début d'année, a redémarré son activité cet été, au terme de son plan de 239 suppressions d'emplois. Les deux activités cohabitent désormais sur le même site industriel.

Investissements industriels en auto-financement

Pour concevoir ses masques en textile lavable, Barral s'est tourné vers des fournisseurs locaux. La fibre en polyester et polyamide est fournie par le colmarien Freudenberg. Les masques sont imprimés et ennoblis à Gerardmer, dans les Vosges, avant d'être assemblés sans couture dans l'atelier de Rouffach. "Notre activité commerciale reste dépendante de la commande publique", reconnaît Benoît Basier, dont les réseaux dans l'industrie textile locale ont facilité le démarrage de cette nouvelle activité. Président de Meyer-Sansboeuf, fabriquant de ficelles, de cordelettes alimentaires et de cordages pour le nautisme à Guebwiller et président du pôle textile alsacien, un groupement d'une soixantaine d'industriels en charge de la promotion de la filière, Bruno Basier a convaincu cinq investisseurs locaux de s'engager financièrement à ses côtés. Le capital initial de Barral (200.000 euros) a été levé en 3 semaines. Les collectivités territoriales et les entreprises ont figuré parmi ses premiers clients, dès le printemps. L'investissement industriel (3,6 millions d'euros) s'est ensuite auto-financé grâce à la commande publique. Pendant son premier semestre d'activité, Barral a fourni six millions de masques à des collectivités territoriales, des écoles, des mairies, des établissements d'hébergement de personnes âgées. La capacité s'établit aujourd'hui à un million de masques par semaine.

L'inspiration "lean" de l'industrie auto

L'entreprise vise un chiffre d'affaires de 7 à 10 millions d'euros pour son premier exercice. "Il faut être plus compétitif que les Chinois et pour cela, nous automatisons au maximum la chaîne de production. La solution, c'est une organisation frugale, connectée, agile, dans l'esprit de l'industrie 4.0", explique Benoît Basier. Les premiers lots de masques ont été collés à l'aide de machines manuelles. Une machine automatisée en service depuis un mois et une seconde, attendue avant Noël, autoriseront une des méthodes de production "lean" inspirées de l'industrie automobile. "Pour nous, l'amélioration continue est devenue un outil de gestion au quotidien. Les clients attendent une réactivité énorme de notre part. Dans notre atelier, grâce aux intérimaires, nous sommes en mesure de multiplier nos effectifs par six en une semaine", affirme Benoît Basier.

Barral entend désormais diversifier sa clientèle. Une offre commerciale inédite a été élaborée à destination des entreprises. Le fabricant alsacien propose des lots de masques multicolores qui couvrent une semaine d'utilisation : une couleur par jour. L'offre aux particuliers, récemment initiée, s'appuiera sur des contrats de distribution avec des réseaux commerciaux existants.

"Il faut se bagarrer pour remonter la filière textile en Alsace démolie par la perte du savoir-faire cédé au Pakistan, en Inde, en Chine ou au Bangladesh", regrette Benoît Basier. Les co-investisseurs présents à ses côtés en conseil d'administration sont tous issus de la filière locale : un directeur d'institut de formation, un industriel du textile et plusieurs multi-entrepreneurs. Tous s'attendent à une croissance très rapide de leur jeune entreprise. "Nous jetons un nouveau business-plan à la poubelle toutes les six semaines", s'amuse Benoît Basier. Barral a établi son objectif à 20 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2022.

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