« L'industrie doit être frugale et respectueuse de l'environnement » (Anne Leitzgen, Cuisines Schmidt)

Anne Leitzgen, présidente de Schmidt Groupe (Cuisines Schmidt, Cuisinella), envisage un milliard d'euros de chiffre d'affaires en 2030 pour cette ETI familiale établie en Alsace. Elle mise sur la responsabilité sociétale de l'entreprise (RSE) et ses valeurs pour recruter des jeunes diplômés, en particulier des jeunes filles peu attirées par l'industrie.
Anne Leitzgen, présidente de Schmidt Groupe. cette entreprise familiale alsacienne détient les marques Cuisines Schmidt et Cuisinella.
Anne Leitzgen, présidente de Schmidt Groupe. cette entreprise familiale alsacienne détient les marques Cuisines Schmidt et Cuisinella. (Crédits : DR)

LA TRIBUNE - Votre entreprise compte 1.900 salariés et affiche une croissance rapide malgré la crise. Vos fournisseurs ont été très sollicités et vos effectifs ont augmenté de 6 % l'année dernière. Comment avez-vous géré vos besoins en matières premières et en main-d'œuvre ?

ANNE LEITZGEN - Schmidt Groupe a réalisé 670 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2022. Nous visons un milliard d'euros de chiffre d'affaires en 2030. La croissance a été soutenue pendant la période post-covid. Les clients qui ont voulu se faire plaisir chez eux. 2022 a bien démarré mais depuis la guerre en Ukraine, le rythme s'est un peu essoufflé. On parle maintenant de la fin de l'abondance. Dans ce contexte de pénurie de matière, nous profitons des relations avec nos fournisseurs dans une dynamique partenariale. Notre production est organisée en juste à temps sur cinq sites en Alsace et une usine en Allemagne, avec une certaine diversité. Les relations de confiance établies pendant la crise du Covid, où nous n'avons jamais interrompu nos paiements, demeurent primordiales pour la suite des opérations. Il est important d'avoir une intention, d'emmener tout le monde sur le chemin. Nous portons la même promesse dans nos ressources humaines.

Dans ce contexte de croissance frugale, était-il opportun d'annoncer l'objectif du milliard d'euros de chiffre d'affaires ?

L'important n'est pas la croissance du chiffre d'affaires, mais la façon dont on le réalise. J'ai la conviction que seules les entreprises sincèrement engagées dans la RSE seront encore là demain. L'industrie doit être frugale et respectueuse de l'environnement. Si notre croissance doit impliquer de léser certains clients ou certains fournisseurs, elle ne se fera pas. C'est la condition pour attirer des nouveaux talents et des clients.

Les jeunes diplômés sont-ils attirés par votre activité, la fabrication de cuisines ?

Pas spontanément. On sort les rames, comme tout le monde. Les jeunes ne viennent pas parce qu'on produit des jolies cuisines. Ce qui compte, c'est pourquoi et comment on le fait. Nous offrons la chance à chacun de prendre des décisions, dans un esprit entrepreneurial. L'important pour les jeunes, ce sont les items « soft » et l'interaction. Il y a de la robotique, de l'automatisation, des sujets fun et passionnants. On peut avoir un vrai impact environnemental dans les métiers de l'industrie. On essaie de se faire connaître auprès des jeunes en recrutant autant que possible des alternants, d'aller à leur rencontre bien avant le stage obligatoire de classe de troisième. Nous voulons attirer des filles dans les métiers de l'industrie. Il faut leur donner le goût de la technologie.

Comment entendez-vous apporter la preuve des résultats de votre politique de RSE, sans subir des accusations de greenwashing ?

Nous avons toujours été discrets. Les autres entreprises le sont moins. Il est temps de mettre en place de vrais moyens pour prouver ce que nous faisons. Nous avons obtenu tous les certificats imaginables : ISO 9001 sur la qualité de notre organisation, ISO 14001 sur le management environnemental, ISO 50001 sur la gestion de l'énergie. Nous sommes en cours de certification B Corp. Mais bien au-delà de tous ces certificats, les entreprises qui font du greenwashing vont très vite se faire attraper. Nos jeunes embauchés sont impitoyables. Si vous vous contentez de mettre un peu de photovoltaïque, avec des moutons qui tondent l'herbe devant l'usine, vous n'êtes pas RSE. La RSE, ce sont des relations sociales, c'est la prise en compte de notre impact dans la société autour de nous. Nous sommes mécène de plusieurs chaires à l'Université de Strasbourg et partenaire du WWF sur notre décarbonation. Plutôt que de faire du blabla, on essaie de s'associer à des partenaires sérieux.

Vous incarnez la troisième génération de dirigeants de Schmidt Groupe. En 2030, si vous respectez vos objectifs, votre chiffre d'affaires aura doublé en une décennie. La croissance est-elle toujours indispensable ?

Pour rester une entreprise indépendante, il ne suffit pas de faire de la croissance. Il faut que cette croissance soit vertueuse. Il y a des enjeux de taille dans notre industrie parce que la technologie est chère. Entretenir une marque, ça coûte de l'argent. Plus vous êtes gros, mieux vous amortissez ces coûts. La robotisation, l'intelligence artificielle seront encore consommatrices de ressources. Oui, la taille est donc un enjeu.

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