Le Centre européen d'étude sur le diabète crée Ilonov pour accélérer ses recherches

Le Centre européen d'étude sur le diabète (CeeD) crée une spin-off pour financer ses recherches dans une thérapie innovante, basée sur le potentiel jusqu'alors inconnu des cellules musculaires.
Michel Pinget, président du Cente européen d'étude du diabète, rappelle que 30 % des patients décédés du Covid étaient diabétiques.
Michel Pinget, président du Cente européen d'étude du diabète, rappelle que "30 % des patients décédés du Covid étaient diabétiques". (Crédits : Olivier Mirguet)

Les myokines, composés protéiques sécrétés par le muscle, vont-elles pouvoir soigner le diabète ? Une équipe de 30 chercheurs strasbourgeois a établi et validé cette preuve de concept, sur des rats, dans le laboratoire du Centre européen d'étude sur le diabète (CeeD). Pour orienter ses découvertes vers la production d'un médicament, Michel Pinget, président du CeeD, crée une spin-off, Ilonov, grâce à laquelle il prévoit de lever cet hiver entre 3 millions d'euros et 5 millions d'euros.

Dès 2018, le CeeD avait posé les bases de ses travaux dans une publication scientifique parue dans la revue Scientific Reports. "Les myokines, molécules endocriniennes (libérées dans le sang) sécrétées par le muscle, jouent un rôle primordial pour le bon fonctionnement du corps humain en servant de barrières face à certaines maladies comme le cancer du sein, la dépression, les maladies cardiaques ou encore le diabète", écrivaient alors les chercheurs strasbourgeois. "Chaque muscle produit un ensemble différent de myokines. Dans le cas du muscle de résistance, elles ont un effet direct et bénéfique sur le pancréas et son fonctionnement", confirme aujourd'hui Michel Pinget. Pour convaincre ses interlocuteurs, cet ancien chef de service de endocrinologie et de diabétologie présente ses expériences dans une video. Le film met en scène quatre rongeurs diabétiques. Deux spécimens soignés par le CeeD sont sveltes et apparaissent pleins d'énergie. Les deux autres demeurent apathiques. Michel Pinget jubile : "Les deux premiers sont guéris".

Karim Bouzakri, directeur de laboratoire au CeeD, accède à la présidence d'Ilonov, société dont les statuts ont été enregistrés le 3 octobre. "Notre objectif, c'est la mise sur le marché de ces molécules issues du muscle", dit-il. "Elles auront un effet thérapeutique en prévention, en protection et en guérison du diabète de type 1. Nous devons encore établir la toxicologie et déterminer le mode d'administration adéquat".

Deux premières start-ups à son actif

Créé en 1991 avec l'appui financier des collectivités territoriales et implanté dans l'enceinte de l'hôpital de Strasbourg-Hautepierre, le CeeD revendique une double expérience dans le lancement de start-ups. Asdia, société spécialisée dans le suivi des pompes à insuline en ambulatoire, a été créée en 2002 et revendue à des fonds en 2014, pour 21 millions d'euros. "C'est notre trésor de guerre", reconnaît Michel Pinget. Defymed, fondée en 2011 dans l'objectif de mettre au point un pancréas bioartificiel, est toujours active dans ses recherches. Au mois de mai cette année, Defymed a levé 1,8 million d'euros pour financer la première phase de ses essais cliniques. L'apport financier de BPI France et du fonds régional Cap Innov Est complète les précédentes levées de fonds, pour une dizaine de millions d'euros en cumul depuis la création de cette start-up.

Chassant des subventions en phase d'amorçage, Ilonov a frappé à plusieurs portes : l'incubateur régional Semia, Deeptech Founders, la bourse French Tech Emergence. Le CeeD, actionnaire fondateur d'Ilonov, apporte 400.000 euros en compte courant. "Il faut désormais investir, aller jusqu'à la preuve clinique en phase 2", prévient Anastasia Grabarz, responsable de l'ingénierie des projets de recherche au CeeD. Le profil financier des investisseurs reste à définir. A terme, en cas de succès, Ilonov pourrait rejoindre le catalogue d'actifs d'une société Big Pharma active dans les thérapies innovantes en diabétologie. "Dans sept ans, au plus tôt", tempère Anastasia Grabarz. Le CeeD continuerait de se rémunérer, après la cession, sur des brevets dont il conserverait la propriété.

Compléter les financements publics

L'accélération de la recherche contre le diabète répond, pour ses acteurs du CeeD, à un besoin urgent. "En France, 30 % des patients décédés du Covid étaient diabétiques", rappelle Michel Pinget. Les financements publics qui assurent depuis le départ le fonctionnement du CeeD ont toujours semblé insuffisants. "Nous étions quasiment en dépôt de bilan en 2002", reconnaît Michel Pinget. Le budget actuel s'établit à 2,5 millions d'euros par an. Il porte sur des activités de recherche appliqué, en partenariat avec l'université de Strasbourg, sur la formation, le dépistage et la prévention de la maladie. Le CeeD s'implique aussi dans des projets de télémédecine à l'échelle régionale. "Les outils connectés couramment utilisés par les patients font du diabète une maladie hautement compatible avec ces nouveaux outils", observe Michel Pinget. En tant qu'acteur de la santé publique, le CeeD a créé trois structures associatives en Alsace, co-financées par l'Agence régionale de santé, pour faciliter l'accompagnement de proximité des personnes diabétiques. "Nous demeurons avant tout un acteur local", reconnaît Michel Pinget.

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