Paris fait un premier pas vers la gratuité des transports

À la suite d'un rapport commandé en mars 2018 à trois de ses adjoints, la maire de Paris Anne Hidalgo vient de formuler quatre propositions en matière de gratuité des transports en commun. L'opposition municipale et régionale n'a pas tardé à critiquer ces mesures.
César Armand
(Crédits : Charles Platiau)

Dès novembre dernier, Anne Hidalgo l'avait assuré à La Tribune "Ma conviction est qu'il y aura des formes de gratuité". Le 10 janvier 2019, la maire (PS) a annoncé la gratuité des transports publics pour les Parisiens de 4 à 11 ans et pour les handicapés de moins de 20 ans, le remboursement de 50% du Pass Navigo des collégiens et lycéens, et la gratuité de l'abonnement Vélib' pour les adolescents de 14 à 18 ans à partir du 1er septembre 2019. Elles viennent s'ajouter à la gratuité du pass Navigo pour les adultes handicapés et les seniors parisiens sous condition de ressources en vigueur depuis juin 2018.

Ces quatre nouvelles mesures seront, elles, financées par "des redéploiements" à hauteur de 5 millions d'euros en 2019 (un trimestre), puis de 15 millions d'euros les années suivantes. La ville prévoit de les "autofinancer" grâce aux recettes du nouveau marché de mobilier urbain d'information (panneaux d'affichage municipal et publicitaire, ndlr).

Deux autres propositions en attente de validation de l'État

« Avec ces mesures, nous faisons le pari de la jeunesse pour accélérer la transition énergétique », a déclaré Anne Hidalgo. « Nous renforçons aussi le pouvoir d'achat des familles parisiennes, dont je tiens à ce qu'elles puissent vivre et s'épanouir à Paris. »

Parmi les autres propositions de ses trois adjoints, figure aussi le remboursement intégral du Pass Navigo pour les salariés qui gagnent moins d'1,5 smic ainsi que pour les familles monoparentales. « Cette disposition relève de l'État et nécessite un financement par les entreprises », souligne Emmanuel Grégoire, premier adjoint (PS) aux Finances. « Nous espérons qu'elle figurera dans la prochaine loi de mobilité. »

"Démagogie et inefficacité" d'après les Républicains

Le Medef Paris n'a pas tardé à réagir, rappelant que les entreprises contribuent à 41% du financement des transports en commun franciliens et qu'elles sont "taxées" à hauteur de 3.000 euros par salarié et par an, pour financer les collectivités et l'autorité organisatrice. Son président Jean-Louis Schilansky préfère les remettre « au cœur du projet. Elles ont les solutions : innovations technologiques, nouveaux modèles économiques et capacité d'investissements ».

Dans l'opposition politique, les Républicains dénoncent des actions « aussi démagogiques qu'inefficaces en application cinq mois avec les élections municipales » et déconstruisent deux d'entre elles : « Les enfants de 4 à 11 ans bénéficient d'un demi-tarif, et les collégiens et lycéens parisiens bénéficient déjà d'une réduction de 50% grâce à l'aide de la région ». D'après leurs calculs, la gratuité pour les moins de 12 ans coûtera même 51 millions d'euros. Ils recommandent, au contraire, la gratuité du Vélib' pour l'ensemble des Parisiens.

Vers une Métropole autorité de transports de second rang ?

Le rapport remis à la maire de Paris, première vice-présidente de la métropole du Grand Paris (MGP), propose par ailleurs de mettre en place un guichet unique pour les aides financières à la mobilité instaurées par les différentes collectivités à l'échelle de la MGP. C'est pourquoi Anne Hidalgo plaide pour la métropole comme autorité de second rang après la région en matière de transports. Sa rivale Valérie Pécresse a néanmoins toujours refusé de céder un pouce de son pouvoir.

Parmi les autres idées, l'une consisterait à créer une plateforme ouverte aux différents territoires afin d'organiser la mise en place de packs de mobilités intégrant services publics et services privés. Une autre serait de réserver la voie de gauche du périphérique parisien aux véhicules transportant au moins deux personnes d'ici à 2024 au plus tard. La municipalité fait ainsi déjà savoir que certaines de ces pistes seront portées dans le débat public.

IDFM (ex-STIF) refuse d'être "le tiroir-caisse"

La présidente (LR) d'Île-de-France Mobilités (ex-STIF) et patronne du conseil régional, Valérie Pécresse, n'a pas encore réagi directement. En revanche, ses proches ont estimé, auprès du Parisien, que « la gratuité, ça se paye ». Paris « devra compenser à l'euro près », ont-ils prévenu, ajoutant qu'IDFM n'était « pas un tiroir-caisse ».

En référence à l'ex-gestion socialiste et écologiste de la région, ce même entourage qualifie en outre « les besoins de modernisation considérables sur un réseau vétuste, héritage de madame Hidalgo et de la majorité de gauche qui a géré les transports pendant dix ans ».

En octobre dernier, les huit experts mandatés par le conseil régional, qui avait lui aussi commandé une étude sur les gratuités des transports, avaient par ailleurs conclu à une diminution infime de la circulation (d'environ 2%) qui se serait accompagnée d'une saturation encore plus importante des transports en commun. Sans parler du manque à gagner de 3,3 milliards d'euros de billetterie. C'est peu ou prou ce qu'écrivent les auteurs du rapport parisien : « La gratuité totale coûterait cher à la collectivité pour un impact marginal sur l'environnement, et ce, au prix d'une tension accrue sur le réseau de transport collectif ».

César Armand

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Commentaires 12
à écrit le 20/01/2019 à 21:15
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A quand la gratuité pour les musées en journée ouvrable et à des heures convenables ?

à écrit le 12/01/2019 à 21:20
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Surtout lorsque on constate qu'à Aubagne(transports publics gratuits depuis 2009 avec le premier tram gratuit au monde depuis 2015), les entreprises qui ont financé la mesure,avec une augmentation de la redevance transport, au lieu de partir,viennen...

à écrit le 11/01/2019 à 15:36
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Il est étonnant que Madame Hidalgo n'ait pas opté pour une solution à la Hollande ou à la Macron, en faisant payer uniquement les 20% les plus riches. Peut-être parce qu'il existe encore des moyens de transport privés. Gageons qu'ils seront peu à ...

à écrit le 11/01/2019 à 8:45
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Dommage que la haine naturelle et stupide comme toute haine des droitars envers Hidalgo empêche de poser un regard objectif et un débat légitime sur la gratuité indispensable des transports en commun. Mais bon il est évident que le lobby pétrolie...

à écrit le 11/01/2019 à 8:18
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Le gratuit est une mesure démagogique, c’est à l’utilisateur de payer

à écrit le 11/01/2019 à 6:36
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Le "gratuit" n'existe pas, au final il y a toujours quelqu'un qui paye.

à écrit le 11/01/2019 à 1:48
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En Coree, le transport en metro intra muros est gratuit pour les plus de 65 ans depuis 15 ans.

à écrit le 10/01/2019 à 23:34
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Les rapports des 2 commissions qui ont étudié la faisabilité des transports gratuits à Paris et en IDF,sont biaisés par la présence de plusieurs représentants du lobby du transport,(anciens de la RATP,SNCF ou Transdev) dans la commission Pécresse et ...

à écrit le 10/01/2019 à 23:11
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Alors pourquoi rémunérer le transporteur ?

à écrit le 10/01/2019 à 18:00
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a votre bon coeur messsieurs dames, aujourd'hui on rase ( a nouveau gratuit)...... j'espere que les salaries de la ratp auront un peu d'honneur et refuseront d'etre payes dans tant de gratuite pour tous! bon, apres les mutuelles obligatoires qui vis...

le 10/01/2019 à 20:32
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@ Churchill Enfin, Il était temps ! Les villes de province qui ont testé la gratuité ne reviendront certainement pas en arrière. Parce que la surplus d'activité, commerces et loisirs est important, un peu en soirée, mais surtout les week-end et en...

le 11/01/2019 à 13:55
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Expérience à Dunkerque (200 000 habitants) : https://www.bfmtv.com/societe/les-transports-en-commun-gratuits-le-grand-test-de-dunkerque-1518077.html Il n'existe pas de solution parfaite, tout changement active généralement des réactions opposées, n...

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