De la Tunisie à la Mayenne : Bluemooov relocalise la fabrication de ses vélos cargos

Nés à Saint-Maur-des-Fossés en 2018, fabriqués en Tunisie, les vélos cargos et triporteurs professionnels Bluemooov seront relocalisés en Mayenne à partir de 2023. Les surcoûts du Made in France devraient être compensés par la limitation des coûts d’approvisionnement et de transport.
La fabrication des vélos cargos Bluemooov va concentrer une dizaine d'acteurs dans l'Ouest de la France.
La fabrication des vélos cargos Bluemooov va concentrer une dizaine d'acteurs dans l'Ouest de la France. (Crédits : Bluemooov)

« Après avoir trouvé, en 2018, une usine en Tunisie pour assembler nos vélos cargos, dans l'esprit d'optimiser notre bilan carbone, nous ne sommes pas allés chercher les cadres et les caissons en Asie, comme le font la plupart de nos confrères, mais nous avons choisi de faire travailler des fabricants locaux dans un périmètre de cent kilomètres. C'est ce modèle que l'on rapatrie aujourd'hui à Laval », explique Emmanuel Paris, fondateur et PDG de Bluemoooov, fabricant de vélos-cargos professionnels, appuyé sur la holding Bluemooov, basée à Saint-Maur-des-Fossés et la société opérationnelle Bluemooov Europe, capitalisée à hauteur de 500.000 euros, grâce à un tour de table réunissant une vingtaine d'actionnaires. C'est cette dernière qui vient tout juste d'être délocalisée à la Technopole de Laval pour orchestrer un transfert progressif de l'activité. « Il ne s'agit pas de planter au milieu du gué notre partenaire tunisien, mais d'effectuer un tuilage pour accompagner notre montée en puissance, notamment sur la deuxième génération de vélos cargos », indique Emmanuel Paris.

Une proximité indispensable pour les pros

Lancée véritablement il y a dix-huit mois après avoir essuyé les affres de la crise sanitaire pendant laquelle les délais d'approvisionnement ont dangereusement grimpé de 8 à 96 semaines, et obligé l'entreprise à engloutir une grosse partie de sa trésorerie dans le stockage des composants, Bluemooov a, depuis, développé une vingtaine de modèles. Elle a cette année produit quelques cent-cinquante vélos cargos, distribués en France via un réseau de magasins de vélos, spécialisés sur le marché des professionnels (Decathlon Pro, Meilleurs Vélos, Altermove... ) pour un chiffre d'affaires de 150.000 euros. « Notre objectif est d'atteindre un million d'euros sur le marché français en 2023 et 5 millions d'euros sur le marché européen, en Hollande et en Allemagne notamment, d'ici à 2024 », vise Emmanuel Paris qui, parallèlement à la relocalisation de la production sur un territoire compris entre Angers et la Ferté-Bernard (Sarthe), dit avoir entrepris des négociations avec les grandes enseignes de distribution spécialisées. Objectif : mailler l'Hexagone pour garantir une proximité nécessaire à la prise en main des vélos cargos, à la maintenance, au SAV d'urgence et à l'entretien des engins. «C'est ce qui fait notre force. Nous avons noué des partenariats pour être présent sur les grandes aires urbaines et pouvoir proposer ces services, il s'agit maintenant d'étendre notre territoire », dit-il. Une proximité indispensable sur le marché des professionnels où, contrairement au grand public, l'immobilisation du véhicule n'est pas envisageable.

Des vélos cargos produits à 90% en Europe

A l'exception des pédales, des poignées... qui seraient aujourd'hui exclusivement produites en Asie (Cambodge, Vietnam), Bluemooov ambitionne, à défaut de pouvoir sortir un engin 100% made in France, de proposer le seul vélo cargo produit à 90% en Europe. Jusque-là équipé d'une motorisation danoise, les futurs vélocargos produits à Laval devraient être dotés d'un kit batterie et d'une motorisation élaborée par un acteur toulousain venu du monde du camion.

Les tubes et les tôles seront fournis par un industriel français désireux de s'engager dans la micro-mobilité, Les cadres seront fabriqués en France, en Mayenne et dans la Sarthe. Deux sociétés de plasturgie, intervenant dans l'aviation et l'automobile se chargeront de concevoir les caissons, à partir d'ABS recyclable. « Un matériau hyper résistant, facile d'entretien, souple et qui n'explose pas en échardes », détaille Emmanuel Paris, tenu à une certaine confidentialité avec ses partenaires. Faute d'avoir pu faire aboutir les négociations avec Michelin, les pneus devraient, eux, être allemands. La phase de prototypage devrait s'étendre tout le premier trimestre 2023 avant de lancer la production.

Une levée de fonds dès 2023

Pour limiter les coûts fixes au démarrage de l'activité et être en capacité de s'adapter aux besoins du marché, Blumooov va trouver refuge chez un industriel lavallois qui va mettre à disposition de l'espace, du matériel, des outils et de la main-d'œuvre. Le surcoût de la relocalisation, estimée entre 5% et 10% devrait, selon le fondateur de Bluemooov, être compensé par la baisse des coûts de transport. « On considère que la valeur ajoutée du Made in France sur l'étiquette va compenser les surcoûts de 5 à 10% du prix de revient. Qui plus est le recours à des process exigent déployés par nos partenaires issus de l'automobile et aéronautique , va nous permettre d'accroître la qualité de fabrication et ainsi réduire nos coûts de production. Certes, d'autres, prétendront toujours qu'il est moins cher de produire à l'étranger, mais la prochaine étape, c'est le bilan carbone... », nuance Emmanuel Paris, qui envisage une levée de fonds d'un million d'euros au premier semestre 2023 pour amorcer un développement commercial vers la Hollande, la Grande-Bretagne et l'Allemagne. A l'issue des premiers prototypages, Bluemooov produira, en terre mayennaise, un premier vélo cargo pour Veolia, à Lille, destiné au tri sélectif. Le premier d'une nouvelle génération.

Cocoon -Bluemooov

ZOOM : De Cocoon... à la plateforme modulaire en passant par le triporteur

C'est au travers d'une étude sur les mobilités urbaines menées en 2015 au sein de Groupama qu'Emmanuel Paris, ex-directeur des relations réseau agents GAN Assurances, s'est interrogé sur les freins à l'usage massif du vélo. « A l'époque, à Paris, on dénombrait cinq millions de trajets quotidiens de moins de 5 kilomètres, effectués... en voiture ou en transport en commun », rappelle-t-il. Pourquoi pas en vélo ? « Pour des raisons de sécurité routière, de sureté (vol...), de capacité d'emport et de confort, lié aux conditions météo », observe-t-il. De là naîtra, le cahier des charges de Cocoon. Un engin au look futuriste. Un vélo à assistance électrique innovant, stable, clos, couvert de panneaux solaires, modulaire, connecté, recyclable et écolo permettant une mobilité de porte à porte et disposant d'une bonne capacité d'emport. « Le chaînon manquant entre l'automobile et le vélo », résume Emmanuel Paris dont le projet ne dépassera pas le stade du dessin 3D. Les assembleurs de vélos sollicités (MFC, Arcade Cycle, Easybike...) ne savaient pas faire. Les équipementiers de l'automobile (Valeo, Faurecia, Plastic Omnium...) ne partaient pas dans l'aventure à moins d'une série de 10.000 pièces. Trop pour une entreprise embryonnaire.

Cocoon sera mis en sommeil et laissera Bluemooov se concentrer sur les triporteurs et vélos cargos. « Cocoon reste l'origine et l'objectif de l'entreprise mais il nous faudrait un million d'euros pour le développer ». L'idée est plutôt aujourd'hui de créer une plateforme modulaire de vélos lourds pour répondre à différents usages, dont le port de charges pouvant aller jusqu'à 500 kilos. Et, ainsi, prendre des parts de marché significative, sur un marché européen du vélo cargo estimé à 250.000 unités en Europe dont 10% en France. A condition de mettre au point des châssis et composants spécifiques, jusqu'ici inexistants. Une autre histoire.

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Commentaires 3
à écrit le 10/01/2023 à 8:20
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La regression de la 6 ieme puissance est en mode accelere. Bientot les tuck tuck ?

à écrit le 06/01/2023 à 6:25
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Bonjour Certain appels cela le progrès, l'ons ressort les truc de 50 ans ... Bientot la charette a cheval .. La lampes a petrole ... Merci les écologistes....

à écrit le 16/12/2022 à 20:40
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C'est rigolo ce truc, retour aux anciennes modes, à Angers avant la guerre de 40 étaient construits des vélos cargos inusables, il doit bien y en avoir chez les collectionneurs, parfois servant pour la pub. En matière de vélos il n'y a pas photo....

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