Parade invente la chaussure de sécurité connectée... à un abonnement mensuel

La filiale du groupe Eram, fabricant de chaussures et de vêtements, spécialisée dans le secteur de la sécurité, a créé avec la collaboration de spécialistes de l’IoT angevins une chaussure de sécurité intelligente capable de détecter 220 scénarios de chutes et d’alerter les secours. Une solution soumise à un abonnement mensuel de 16 euros.
Grâce à un capteur de mouvement, un giroscope et un accéléromètre situés dans le talon de la chaussure et à une communication Bluetooth reliée au smartphone de la personne, le modèle est capable de détecter une chute, de géolocaliser la zone du porteur de chaussures, d'envoyer une alerte aux contacts d'urgence...
Grâce à un capteur de mouvement, un giroscope et un accéléromètre situés dans le talon de la chaussure et à une communication Bluetooth reliée au smartphone de la personne, le modèle est capable de détecter une chute, de géolocaliser la zone du porteur de chaussures, d'envoyer une alerte aux contacts d'urgence... (Crédits : Parade)

Cinq années de  R&D, cinq millions d'euros d'investissement, 220 scénarios de chutes établis et cinq brevets déposés... « Tout était à faire», résume Franck Chérel, directeur général de Parade, filiale d'Eram, spécialisée depuis quarante ans dans les équipements de protection individuelle (EPI), qui finalise l'industrialisation d'une gamme de huit chaussures de sécurité connectées et intelligentes. Grâce à un capteur de mouvement, un giroscope et un accéléromètre situés dans le talon de la chaussure et à une communication Bluetooth reliée au smartphone de la personne, le modèle est capable de détecter une chute, de géolocaliser la zone du porteur de chaussures, d'envoyer une alerte aux contacts d'urgence... Un condensé de technologies réduit à 30 grammes, équipé d'une pile bouton à changer tous les trois mois pour des chaussures dont l'espérance de vie est d'un an.

La chaussure : lieu naturel pour embarquer de l'intelligence

« En France, on estime le nombre de travailleurs isolés à 1,5 million et une chute grave se produit toutes les 7 minutes en moyenne. C'est la troisième cause d'accident du travail, et jusqu'ici les outils existants étaient peu satisfaisants », explique Franck Cherel, alerté par ses clients en 2015 de cette situation. « A l'époque, c'était le démarrage des objets connectés alors nous nous sommes demandé ce qu'il était possible d'en faire dans le domaine de la sécurité.» De brainstorming en focus group, opérateurs, responsables de sécurité, des universitaires, des chefs de produits... font émerger quatre-vingts cas d'usages. Au regard des vêtements, des casques, des gants, des ceintures ou des badges, la chaussure est apparue comme « le lieu naturel pour embarquer de l'intelligence. C'était le seul équipement que porte une personne tout au long de l'année, quelle que soit la météo », souligne-t-il. Avec, toutefois, un certain nombre de contraintes comme les chocs, l'humidité, le froid, la chaleur, l'impossibilité de changer les batteries ou de les recharger comme un smartphone, qu'il a fallu résoudre.

84% des chutes détectées

« Faute de trouver des briques technologiques à l'heure des balbutiements de l'IoT, nous avons écrit une solution de A à Z et créé une plateforme pour gérer les données», raconte Franck Cherel qui s'est rapproché du réseau d'électronique angevin WeNetwork pour transformer les besoins techniques en solution utilisateur. Le fabricant a ainsi bénéficié de l'écosystème local (Eolane, Lacroix Electronics, Scalian, start-ups...) présent dans les pays de la Loire et en Ille et Vilaine. En relation avec le Gérontopole des Pays de la Loire et l'Université de Nantes, Parade a ainsi développé un algorithme spécifique capable d'identifier la signature d'une chute, jusqu'à parvenir à un taux de détection de 84% de chutes lourdes et brutales, quel que soit le profil des individus « Si la personne fait sa sieste, pose ses pieds sur le bureau, l'algorithme n'est pas sollicité », assure Franck Cherel. Traitées dans le cadre du RGPD pour veiller aux cyberattaques, les données bénéficient de protocoles sécurisés pour permettre le déploiement de flottes de chaussures sur le Cloud des entreprises. Au total, cinq millions d'euros ont été investis en R&D pour mettre au point une chaussure confortable, entourée de quelques secrets technologiques verrouillés par cinq brevets.

L'enjeu de la sécurité des hommes et des entreprises

Esquissées, les tentatives de rapprochement avec d'autres acteurs de la chaussure connectée auraient buté sur la nécessité d'industrialisation du process et contraintes de prix voulues par Parade. «On recherchait une solution la plus verticalisée possible pour éviter les cumuls de marges liées à des fonctionnalités qui ne nous intéressaient pas», justifie Franck Cherel. D'autant que commercialisé de 195 à 205 euros HT, chaque modèle de la gamme (huit modèles dont trois féminins) doit être couplé à un abonnement mensuel de 15,83 euros HT par mois pour être totalement opérationnel. Celui-ci permet la détection des chutes, les alertes automatiques, la protection 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, la gestion centralisée via un compte personnels, l'accès aux services de l'application « Parade », etc. «Au regard des obligations légales qui imposent aux entreprises d'envoyer deux personnes pour contrôler un réseau, face aux risques de coûteuses interruptions de chantier, des indemnités liées aux accidents de travail sur un chantier ou encore aux frais de télésurveillance dont les abonnements peuvent facilement atteindre 15, 20, 30 ou 60 euros par mois, le prix de la chaussure connectée et de ses services intégrés s'avèrent tout à fait compétitifs. Si pour 15 euros par mois, on économise une personne, ce n'est pas cher...», soutient Franck Cherel. « Et plus tard vous portez secours à une personne, plus graves seront les conséquences ». La sécurité et l'information en temps réel deviennent un enjeu majeur pour les entreprises. « Les conséquences financières voire pénales peuvent être très élevées », souligne-t-il.

Un marché à construire

Sur un marché naissant, Parade, qui réalise un chiffre d'affaires de 23 millions d'euros dont 95% sur la chaussure (500.000 paires/an) de sécurité, estime pouvoir commercialiser quelques dizaines de milliers de paires chaque année en France. « Aujourd'hui, c'est un marché à construire et à conquérir qui n'existait pas en 2016. On passe maintenant à un travail d'acculturation de nos clients et des utilisateurs», indique le directeur général de Parade. Depuis juillet dernier, l'entreprise a testé en direct son produit auprès de cinq ou six entreprises avec quelques centaines de paires. Elle a récemment signé avec cinq ou six distributeurs nationaux (Descours & Cabaud, France Sécurité...) spécialisées dans les équipements de protection individuelle dont la distribution démarrera officiellement début 2021. La cible est large : l'agriculture, la logistique, les opérateurs réseaux, les agents d'entretiens, le BTP... Sur un marché où se vend chaque année six millions de paires de chaussures de sécurité, Parade estime pourvoir générer un chiffre d'affaires de plusieurs dizaines de millions d'euros avec sa technologie.

Du Btob au grand public

Présentées lors de salons professionnels en Allemagne et à l'occasion du CES de Las Vegas où elles ont reçu un Award de l'innovation technologique, les chaussures Parade Connect devraient être commercialisées en Europe à partir de 2022, selon l'accueil reçu en France. « Pour nombre d'entreprise internationales que nous avons rencontrées, la problématique est de faire baisser leur taux de mortalité », observe Franck Cherel, dont les 80 cas d'usages répertoriés pendant les phases de recherche constituent aujourd'hui la road map de développement de services et de fonctions autour du produit. « Imaginez une chaussure qui puisse se connecter avec l'environnement extérieur dans le cadre du développement de l'industrie 4.0 et de l'opérateur interfacé, le territoire est immense... », anticipe Franck Cherel, engagé, par ailleurs, dans le cadre du projet Octopus, avec la société Scalian, le CEA, EDF, l'Etat, l'Europe, les régions Paca et Pays de la Loire.... sur un programme lié à l'opérateur augmenté. Voué à être de plus en plus miniaturisé, le système, testé avec le Gérontopôle des Pays de la Loire, pourrait, à l'avenir, trouver des ressorts auprès du grand publics et notamment dans les Ehpad et chez les seniors dans le cadre du maintien à domicile.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 1
à écrit le 19/11/2020 à 12:33
Signaler
Je vois l'intérêt du service mais pourquoi donc dans une chaussure ? Dans un casque de chantier cela semblerait plus adapté.

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.