Tout ce qu'il faut savoir sur les facture impayées

Les factures impayées sont un fléau pour les entreprises. En France, 53,9 % des entreprises ne paient pas l'ensemble de leurs factures à l'heure, avec une moyenne de 10,7 jours de retard. Pourtant, une facture impayée ou un incident de paiement peuvent coûter cher à l’entreprise, jusqu’à mettre en péril son activité. De bonnes habitudes prises en amont réduisent considérablement ce risque. Voici tout ce que vous devez savoir sur les factures impayées !
(Crédits : DR)

Quel est le délai de paiement d'une facture ?

Que dit la loi ?

Le délai de paiement d'une facture doit être précisé dans le contrat qui noue la relation client-prestataire. C'est ce contrat qui détermine les délais et modes de paiement, si un acompte doit être versé, si la moitié du paiement doit être effectuée à une date, quelles sont les éventuelles pénalités en cas de retard de paiement non justifié...

Par principe, le délai courant de paiement d'une facture pour les entreprises est fixé à 30 jours à partir de la date de réception des marchandises ou de l'exécution de la prestation. Ce délai peut être porté à 45 jours fin de mois pour simplifier la comptabilité de l'entreprise cliente.

Dans le cas où le paiement de votre facture n'a pas été effectué dans les délais définis au préalable, vous pouvez user de différents leviers pour faire valoir vos droits, que nous vous détaillerons par la suite.

Les exceptions prévues par la loi

Il existe des exceptions au délai de 30 jours pour la paiement d'une facture. On peut citer par exemple le cas du bétail et de la viande fraîche destinée à la consommation, pour lesquelles le délai est avancé à 20 jours maximum. Les biens destinés à la livraison ou à la revente à l'international, en dehors de l'Union européenne, peuvent disposer d'un délai de 90 jours maximum à compter de la livraison. Cette exception a été définie dans la loi dite Sapin II, du 9 décembre 2016.

Le cas du domaine du transport routier

Pour le secteur du transport routier de biens ou marchandises et celui de la location de véhicules, il existe un délai maximum de 30 jours pour procéder au paiement de la facture à compter de sa date d'émission.

Les entités publiques

Pour les établissements publics, comme les collectivités, les établissements d'enseignement ou de santé, des délais spécifiques ont également été définis dans le Code des marchés publics (art. 98).

Ce délai est de 30 jours pour l'Etat et ses établissements publics. Ce même délai de 30 jours est désormais valable pour les collectivités territoriales et les établissements publics locaux, alors qu'ils bénéficiaient auparavant d'un délai de 45 jours. Enfin, une exception existe encore pour les établissements publics de santé que sont les hôpitaux, qui disposent d'un délai maximum de 50 jours pour procéder au règlement des factures qui leur sont adressées.

A noter qu'en cas de non-paiement d'une facture par un agent public, celui-ci peut être amené à verser une indemnité forfaitaire de 40 euros, dans le but de couvrir les frais de recouvrement engendrés pour le créancier.

Preuve d'une facture impayée

Afin d'obtenir le paiement d'une facture impayée, il est préférable de réunir les trois éléments de preuve suivants, afin de faciliter sa démarche de recouvrement :

  • l'engagement pris par le client ;
  • la preuve de livraison ou prestation ;
  • la dette exigible.

Tous ces éléments peuvent être aisément justifiés sur présentation de documents établis au cours de la relation contractuelle. Il est ainsi toujours conseillé de conserver tous les documents concernés, y compris après la livraison ou la prestation, dans le cas où des réclamations seraient faites ultérieurement.

Le rassemblement de la totalité de ces éléments n'est pas obligatoire pour parvenir à fournir la preuve de l'impayé et à en obtenir le recouvrement, mais il rend la procédure nettement plus rapide.

L'engagement du débiteur

La preuve de l'engagement du client ou du débiteur à payer pour les marchandises livrées ou la prestation fournie peut être fournie à partir d'un document signé. Il s'agit le plus souvent d'un bon de commande, d'un devis ou d'un contrat, qui prouvent la relation contractuelle nouée entre les deux parties.

Il est à noter qu'une facture en elle-même ne peut pas justifier de la relation contractuelle. En effet, elle est émise après la livraison ou la réalisation de la prestation, et ne prouve donc en rien l'engagement préalable du client. Il est donc nécessaire de fournir un autre type de document antérieur à la facture, afin de prouver l'engagement initial du débiteur.

La livraison conforme ou réalisation de prestations

Une fois la livraison ou la prestation effectuée, son paiement n'est pas forcément obligatoire pour le client. En effet, encore faut-il prouver que la livraison ou la prestation soit conforme à la qualité attendue et aux conditions définies préalablement dans le contrat.

Pour prouver la conformité, vous pouvez vous appuyer sur des documents tels qu'un bon d'envoi postal avec recommandé, ou un bon de transport ou de livraison signé par le client.

La créance ou dette exigible

Dernier élément à apporter pour fournir la preuve de non-paiement : la dette exigible, ou créance. C'est à ce moment qu'il faut présenter la facture des prestations ou de la livraison effectivement réalisée au profit du débiteur.

A noter que pour une facture établie entre une entreprise et un particulier, l'entreprise dispose d'un délai maximal de 2 ans à compter de sa date d'émission pour agir afin d'obtenir l'exécution du paiement (art. L218-2 du Code de la consommation). S'il s'agit d'une facture établie entre deux entreprises, alors ce délai est allongé à 5 ans (art. 2224 du Code civil).

La mise en demeure

Dans le cas où une facture est restée impayée, l'entreprise peut effectuer une relance. Il s'agit d'une demande réitérée auprès du client pour obtenir le paiement. Toutefois, une relance afin de demander l'exécution du paiement n'a aucune valeur juridique. Elle peut donc être réitérée et rester lettre morte de la part du débiteur, sans que celui-ci n'ait à craindre de conséquences. Pour obtenir l'exécution du paiement, l'entreprise doit d'abord formuler une mise en demeure de paiement.

Quel est son intérêt ?

Afin de produire un effet juridique, il est nécessaire de réaliser ce que l'on appelle une mise en demeure. Mais pour être valable, cette démarche doit répondre à des critères bien précis. Dans le cas contraire, elle n'aurait pas valeur juridique d'une mise en demeure, et perdrait donc son pouvoir contraignant devant la loi.

Des critères de forme et des mentions obligatoires doivent être réunis afin que la mise en demeure soit considérée comme valable. C'est d'autant plus important que c'est uniquement à la suite d'une mise en demeure qu'une procédure juridique peut être entamée par le créancier.

Quelles sont les mentions obligatoires ?

Lorsque vous rédigez une lettre de mise en demeure, celle-ci doit obligatoirement comporter les mentions suivantes afin d'être valable devant la justice :

  • Date de mise en demeure ;
  • Coordonnées de l'expéditeur : cela peut être un avocat, un huissier, le service juridique de l'entreprise, une société de recouvrement, ou un particulier s'il est créancier ;
  • Coordonnées du destinataire ;
  • Rappel du litige concerné sous forme de résumé succinct ;
  • Formulation claire de la réclamation ;
  • Mention "mise en demeure" en en-tête du document ;
  • Délai raisonnable demandé pour procéder au paiement ;
  • Signature de l'expéditeur ;

En cas d'absence d'au moins une des mentions citées précédemment, alors la mise en demeure est jugée invalide. Elle ne permet pas de produire les effets juridiques escomptés. Il est donc essentiel de bien respecter ces éléments afin de pouvoir entamer une procédure juridique de recouvrement.

Enfin, même si l'ensemble de ces mentions sont présentes dans le courrier de mise en demeure, il est impératif de procéder à un envoi par lettre recommandée avec accusé de réception. Il s'agit en effet d'un élément de preuve daté, en l'absence de laquelle le débiteur pourra opposer qu'il n'a jamais reçu de mise en demeure de paiement.

Comment obtenir le paiement de sa facture ?

Plusieurs moyens permettent au créancier d'obtenir le recouvrement de sa facture. La méthode la moins contraignante et la moins impactante financièrement ou en termes d'image pour les deux parties est la résolution à l'amiable.

Résolution à l'amiable

La résolution à l'amiable, de son nom officiel "recouvrement amiable de créance", consiste à négocier de gré à gré le paiement, directement entre les deux parties, ou par l'intermédiaire d'un huissier ou d'une entreprise spécialisée. C'est la méthode la plus raisonnable pour les deux entreprises, qui permet de maintenir ou d'initier le dialogue, et de parvenir au paiement rapidement tout en évitant de passer par la case justice.

La procédure de résolution à l'amiable peut être initiée par l'une ou l'autre des deux parties. Il n'y pas de cadre ni de délai maximal définis, puisqu'il s'agit d'une négociation menée librement.

Eviter le recours en justice

La résolution à l'amiable permet souvent d'obtenir le recouvrement de sa créance plus rapidement. En effet, une procédure en justice prend souvent plusieurs mois voire plusieurs années avant d'être traitée. Cela peut avoir des conséquences très négatives pour le créancier, jusqu'à mettre en danger la pérennité de son activité. Sans compter les honoraires d'avocat nécessaires pour mener à bien une procédure.

Enfin, cette méthode permet également d'éviter la mauvaise publicité d'un procès pour le débiteur comme pour le créancier. Rares sont les entreprises qui souhaitent être associées à ce type d'événement, qui peuvent impacter l'image et entamer la confiance de clients, de prestataires ou d'investisseurs potentiels pour l'une comme pour l'autre des parties.

Formaliser la dette par écrit

A l'issue d'une résolution à l'amiable, il peut être décidé par le créancier et le débiteur de définir un cadre commun et contraignant pour procéder au versement de la somme restée impayée. Cela peut prendre la forme d'une lettre de reconnaissance de dette, qui engage juridiquement le débiteur.

Une reconnaissance de dette peut être établie sous seing privé, c'est-à-dire directement entre les deux parties, ou alors être établie devant un notaire. Tout comme pour une mise en demeure, une lettre de reconnaissance de dette doit être formulée par écrit et réunir un certain nombre de mentions obligatoires afin de garantir sa validité.

Les mentions qui doivent figurer obligatoirement sont les suivantes :

  • prénom, nom et date de naissance des deux parties : créancier et débiteur ;
  • montant de la somme prêtée (c'est-à-dire la somme en attente de paiement) indiquée en chiffres et en lettres : à noter que pour toute dette supérieure à 760 €, la loi oblige à le déclarer ;
  • date de la reconnaissance de dette ;
  • date de paiement exigible de la dette ;
  • taux d'intérêts éventuels ;
  • date du jour ;
  • signature du débiteur ;

Dès lors qu'une facture est impayée, il faut réagir rapidement. Ainsi, plus vite la situation sera prise en main, plus vite il sera possible de limiter les dégâts. Si le débiteur ne donne aucun retour, alors il sera possible d'entamer une action en justice. Plusieurs actions en justice sont possibles en fonction de différents critères : montant de la créance, qualité du dossier, etc.

Le rôle de l'huissier

Après avoir adressé une mise en demeure au débiteur, le créancier peut entamer une procédure de recouvrement. Une fois obtenue un titre exécutoire de la part d'un juge, un huissier de justice peut être saisi pour intervenir auprès du créancier afin de procéder au recouvrement forcé de la dette. Cela peut prendre la forme d'une saisie sur salaire, ou d'une saisie de biens mobiliers... Dans ce cas, c'est le débiteur qui doit payer les frais d'huissier.

L'huissier peut aussi être sollicité par le créancier dans le cadre d'une procédure à l'amiable. Dans ce cas, c'est le créancier qui doit payer les frais d'huissier. La somme facturée par l'huissier dépend notamment de la nature de l'impayé et du montant qu'il parvient à récupérer auprès du débiteur.

Quel tribunal est compétent ?

Selon l'article L125-1 du Code des procédures civiles d'exécution, le créancier d'une facture impayée peut déclencher une procédure simplifiée de recouvrement de créance. Depuis le 1er janvier 2020, cette procédure est possible seulement si la dette est inférieure à 5 000 euros, intérêts compris, contre 4 000 auparavant.

Lorsque la somme due (intérêts compris) est supérieure à 5 000 euros, alors le créancier peut déclencher une procédure d'injonction de payer conformément aux articles 1405 et suivants du Code de procédure civile. Le tribunal compétent pour régler le litige dépend alors du montant et des types d'acteurs impliqués.

A noter que certaines assurances permettent aux entreprises et aux indépendants de prendre en charge leurs frais de justice. Une assurance auto-entrepreneur peut inclure une garantie protection juridique, qui permet de bénéficier d'une aide juridique et d'une prise en charge financière des frais d'avocat, ainsi que des éventuelles indemnités à verser si vous êtes le débiteur condamné.

Tribunal de commerce

Dans le cas où le débiteur est un professionnel, c'est le Tribunal de commerce qui est compétent. Il s'agit alors du tribunal dont dépend le siège social du débiteur.

Tribunal d'Instance

Le Tribunal d'Instance est compétent dans le cas où le débiteur est un particulier et que la dette s'élève à un montant inférieur à 10 000 euros.

Tribunal de Grande Instance

Le Tribunal de Grande Instance est compétent lorsque le débiteur est particulier, et que le montant des impayé s'élève à plus de 10 000 euros.

Calcul des intérêts d'une facture impayée

Indemnité forfaitaire

Une indemnité forfaitaire d'un montant de 40 euros est due de plein droit dans le cas d'un non-respect du délai de paiement par un professionnel (art. D. 441-5 du Code de commerce). Cependant, elle n'est pas due lorsque le débiteur est un particulier. La mise en place de cette indemnité forfaitaire est à but dissuasif et permet également de rembourser les charges administratives supplémentaires des créanciers à cause du retard de paiement. Si le créancier a subi un préjudice supérieur à 40 euros, alors il peut demander la réparation de celui-ci sur justification.

L'ajout de pénalités de retard

L'entreprise a le droit d'exiger des pénalités de retard à son client. Leurs taux d'intérêt sont calculés selon le taux directeur semestriel de la Banque Centrale Européenne, majoré de 10 points. L'entreprise peut appliquer un taux qui est supérieur ou inférieur à cet indicateur, cependant, ce dernier ne peut être inférieur à trois fois le montant du taux de l'intérêt légal. Celui-ci est fixé chaque semestre par arrêté du Ministère de l'Economie. Afin d'être valable devant la justice, les pénalités de retard doivent apparaître sur les factures et dans les conditions générales de vente. Elles peuvent alors être appliquées de façon automatique, dès le lendemain de la date d'échéance sur le montant de la facture TTC.

Sanctions pour les mauvais payeurs

Sanctions pour les personnes morales

Selon la loi Sapin II du 9 décembre 2016, dans le cadre d'une relation contractuelle entre deux professionnels, les personnes morales qui ne respectent pas les délais de paiement de leurs factures peuvent encourir une amende pouvant s'élever à 2 millions d'euros.

Sanctions pour les personnes physiques

Les personnes physiques peuvent encourir une amende pouvant atteindre 75 000 euros. De plus, le prononcé de la sanction par la DGCCRF est publié automatiquement, ce qui a un impact négatif non-négligeable sur l'image de marque de l'entreprise. Il s'agit d'un outil de dissuasion efficace faisant partie du dispositif de lutte contre les factures impayées. Il est également possible qu'une publication soit effectuée sur tous les supports possibles selon les circonstances (article L.470-2 du Code de commerce).

La loi Pacte

La loi Pacte permet à l'administration de publier dans la presse le nom des entreprises qui ne paient pas leurs factures. Cette publication est effectuée dans la presse locale, aux frais de l'entreprise mise en cause.

A retenir :

Les factures impayées restent un vrai problème culturel en France. Pour 86 % des dirigeants interrogés sur le sujet, l'impact des impayés sur leur entreprise est jugé important. Grâce à ce dossier, vous disposez désormais de toutes les cartes en main pour savoir comment limiter les risques, et comment réagir en cas de problème d'impayé. Un sujet primordial pour maintenir la bonne santé de votre entreprise, et la confiance mutuelle dans vos relations commerciales !

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