xAI, la réponse sous-dimensionnée d'Elon Musk à OpenAI

Attendue depuis des mois, la réponse de Elon Musk à OpenAI a désormais un nom : xAI. Pour l'heure composée de 11 chercheurs menés par le milliardaire -bien loin des plus de 350 employés d'OpenAI-, la nouvelle entreprise avance cependant des objectifs très ambitieux, bien que flous. Mais pour paraître crédible dans une course à l'IA menée par les ogres de la tech Microsoft et Google, elle devra rapidement présenter de premières avancées.
François Manens
Elon Musk ajoute xAI à son portefeuille déjà bien fourni d'entreprises.
Elon Musk ajoute xAI à son portefeuille déjà bien fourni d'entreprises. (Crédits : POOL)

« Comprendre l'univers », voilà l'objectif aussi flou que ambitieux posé par Elon Musk pour sa nouvelle entreprise, xAI. Lancée officiellement mercredi, elle réunit pour l'instant une petite équipe de 11 hommes, chercheurs en intelligence artificielle inconnus du grand public, mais passés par les entreprises de référence du secteur (Google et DeepMind, OpenAI, Microsoft...). La tête d'affiche de xAI n'est autre que Elon Musk lui-même, inscrit dans les effectifs de la société malgré qu'il cumule déjà les casquettes de directeur général de Tesla, SpaceX et Twitter.

Le lancement de la startup ne surprend pas, puisque ces derniers mois, le milliardaire fantasque a répété sa volonté de créer un concurrent à OpenAI et ChatGPT, qu'il juge trop biaisé et « woke » -sous-entendu, avec des idées trop à gauche sur l'échiquier politique. Révélé au grand jour comme figure de la droite dure américaine depuis son rachat de Twitter fin 2022, il a maintes fois évoqué sa volonté de construire une IA capable de « chercher la vérité au maximum ».

Elon Musk joue à l'équilibriste sur l'intelligence artificielle

Le projet de xAI apparaît comme extrêmement flou pour l'heure, avec pour seule référence une unique page de présentation sur son site. Mais la petite équipe promet de donner plus de détails sur ses objectifs lors d'une conférence sur Twitter le 14 juillet, à un horaire non précisé. Greg Wang, ancien de Microsoft et cofondateur de xAI, affirme que l'entreprise va travailler sur une « théorie du tout » pour les réseaux neuronaux [la technologie derrière les dernières générations d'IA, ndlr], qui serait selon lui ni plus ni moins une révolution et « permettrait de comprendre l'univers mathématiques de façons inimaginables auparavant. »

Cette promesse de révolution paraît presque surprenante, tant Elon Musk s'est positionné en critique de premier rang de la technologie dès l'émergence de ChatGPT fin 2022. Dans son viseur se trouve avant tout OpenAI (le créateur de ChatGPT), entreprise qu'il a cofondé en 2015 et cofinancé jusqu'en 2018, avant de claquer la porte suite à une tentative de prise de pouvoir ratée sur fond de divergence stratégique. Mais l'homme d'affaires a étendu la critique à l'ensemble du secteur.

En mars, il était un des principaux moteurs du moratoire sur les dangers de l'IA, publié par l'ONG Future of Life, dont il est un des principaux financiers. La pétition évoquait un risque existentiel contre l'humanité et appelait ni plus ni moins à faire une pause dans le développement des intelligences artificielles génératives. Autrement dit, le milliardaire joue un étrange numéro d'équilibriste : d'un côté, il se présente comme moteur de la révolution en cours, et de l'autre, il appelle à la freiner abruptement...

Concurrencer OpenAI et Google, une tâche ardue

xAI n'est pas le seul projet sorti de terre ces derniers mois pour tenter de profiter de la révolution de l'IA générative. Par exemple, en France, des anciens chercheurs de Deepmind et Meta ont reçu un financement inédit de 105 millions d'euros pour lancer Mistral AI, et le ministre de l'économie Bruno Le Maire ambitionne l'émergence d'un système d'IA européen sous 5 ans.

La bataille autour des modèles d'IA générative se fait en centaines de millions de dollars, si ce n'est en milliards : les spécialistes s'arrachent à prix d'or, et les processeurs nécessaires à l'entraînement des IA les plus complexes coûtent chacun plusieurs centaines de milliers de dollars. Justement, d'après plusieurs médias américains, xAI se serait doté de plusieurs milliers de processeurs Nvidia spécialisés dans l'entraînement de l'IA.

La barre sera tout de même haute pour la dernière entreprise d'Elon Musk. En plus d'avoir une avance confortable, OpenAI s'approche de son côté des 400 employés, et compte des pointures de rang mondial dans ses rangs, ainsi que d'une enveloppe salariale démesurée. La startup brûle du cash à un rythme effréné, et si elle commence à rentrer des revenus depuis la fin de l'année dernière, elle ne survit que grâce aux milliards de dollars d'investissements et à la puissance informatique de Microsoft. Google, de son côté, peut aussi alimenter massivement sans mettre en risque sa survie.

Une différence construite sur l'idéologie ?

Désormais, les deux géants misent sur un passage à l'échelle vers des modèles toujours plus gros et plus puissants, ce qui signifie créer des ordinateurs toujours plus grands et plus chers. Autrement dit, xAI se lance dans une course aux gros calibres avec des effectifs et une puissance de calcul nettement inférieurs (Microsoft et Google sont respectivement numéro 2 et 3 du cloud à l'échelle mondiale). Quant au financement de l'entreprise, il serait mené par Tesla et SpaceX d'après lFinancial Times, dans un article daté d'avril. Mais le montant reste secret.

A moins de débarquer avec une véritable innovation de rupture, la startup devra donc composer avec un retard colossal et un moteur moindre que ses concurrents. Un autre scénario se dessine cependant : Elon Musk a déjà exprimé sa volonté de créer un « TruthGPT », qui serait plus à droite que ChatGPT et consorts, trop « woke » pour lui. L'entreprise construirait alors sa spécificité sur une différence idéologique, et non technique, sous fonds de guerre culturelle américaine.

Quoi qu'il en soit, xAI travaillera de « façon proche » avec Twitter et Tesla, deux autres entreprises de Musk, sans en être directement dépendant. Les synergies apparaissent comme des évidences : le réseau social, en tant que gigantesque forum de discussion mondial, contient un large volume de données idéales pour entraîner les grands modèles de langage cachés derrière les outils comme ChatGPT ou Bard. Quant à Tesla, il produit déjà ses propres modèles de puces d'IA, et a déjà bâti de larges ordinateurs spécialisés, ce qui pourrait aider la startup pour ses premiers pas. Dans l'autre sens, les deux entreprises pourraient profiter des innovations de xAI. Mais faut-il encore qu'elle remplisse ses promesses.

François Manens

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Commentaire 1
à écrit le 14/07/2023 à 10:15
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xAI, encore un nom sans imagination à la gond venant de cerveau de matheux. Ben vous précipitez pas à investir dessus hein...

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