Nouveaux médicaments contre le cancer : Sanofi adopte la technologie révolutionnaire de la deeptech française Aqemia

La deeptech parisienne a signé une collaboration de recherche majeure pour mettre sa technologie unique au monde, mêlant intelligence artificielle générative et physique théorique, au service du géant de la pharma. L'objectif : accélérer la découverte de nouveaux candidats-médicaments contre le cancer. La startup pourra récolter jusqu'à 140 millions de dollars grâce à ce partenariat.
Sylvain Rolland
Maximilien Levesque, fondateur d'Aqemia.
Maximilien Levesque, fondateur d'Aqemia. (Crédits : DR)

Dans le monde des deeptech ou innovations de rupture, il peut parfois se passer une décennie, voire davantage, entre le temps du développement et la mise sur le marché. Pas pour Aqemia. Fondée en 2019 par Maximilien Levesque et Emmanuelle Martiano, cette pépite parisienne, dérivée du CNRS et de l'ENS (Ecole Normale Supérieure), révolutionne déjà la recherche de nouveaux médicaments, grâce à ses algorithmes uniques inspirés de la mécanique quantique. Pour preuve, l'entreprise annonce ce mardi 5 décembre la signature d'un partenariat de recherche majeur avec le géant de la pharmacie Sanofi, pour un montant qui pourrait atteindre 140 millions de dollars.

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Technologie unique au monde

Cette collaboration doit permettre de découvrir des candidats-médicaments. Objectif, traiter plusieurs types de cancers dits solides, comme le cancer du poumon par exemple, et des cancers dits liquides comme les leucémies.

« Notre technologie combine de la physique théorique et de l'IA générative pour créer les molécules optimales sur une cible thérapeutique donnée, pour aboutir à un candidat-médicament. On peut prédire l'affinité de la molécule vis-à-vis de sa cible 10.000 fois plus rapidement que le marché, ce qui accélère grandement la phase de recherche clinique. On intervient de l'identification des premiers composés actifs jusqu'à la sélection du candidat-médicament préclinique », explique Maximilien Levesque à La Tribune.

Contrairement à d'autres technologies d'intelligence artificielle, qui requièrent des données expérimentales chimiques pour s'entraîner avant la phase de conception, Aqemia produit elle-même ces données. « Nous sommes les seuls au monde à ne pas avoir besoin de données expérimentales, et c'est un grand avantage, car ces données sont rares », ajoute le chercheur.

La raison tient dans la technologie d'Aqemia, qui est une méthode de calcul inspirée par le calcul quantique. « Nous avons réussi à "craquer" une équation quantique, ce qui nous permet de démultiplier notre puissance de calcul sans avoir besoin de super-ordinateurs. Nous pouvons comprendre comment une molécule interagit avec une protéine dans de l'eau, à l'échelle des atomes et des électrons, et simuler des interactions à un degré de finesse inédit. Au final, nous trouvons des molécules qu'on aurait jamais imaginé avec un calcul classique », développe-t-il.

Le partenariat avec Sanofi pourrait devenir très lucratif pour Aqemia : jusqu'à 140 millions de dollars. En plus d'un paiement à la signature, la startup recevra de l'argent au lancement de chaque projet de recherche avec le géant pharmaceutique, et sera également payée en fonction du succès des molécules trouvées dans le cadre de ces partenariats.

« On trouve et designe la molécule, Sanofi fait toutes les expériences, et si le candidat-médicament est assez performant pour entrer en phase clinique, donc dans l'Homme, alors on touche une nouvelle rémunération », détaille Maximilien Levesque.

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Des médicaments uniques contre le cancer ?

Cette technologie unique au monde, développée dans les labos de l'ENS dans les années 2010, a fait l'objet de 47 publications scientifiques et se destinait à l'origine à l'industrie nucléaire. Mais le jeune chercheur gagne un prix scientifique en 2018, qui déclenche l'intérêt d'un leader mondial de la découverte de médicaments, qui souhaite alors la racheter.

« J'ai pris conscience de l'énorme potentiel de cette innovation pour le monde de la santé, donc j'ai refusé l'offre, quitté mon labo et monté Aqemia avec Emmanuelle Martiano pour contribuer moi-même à découvrir ces nouveaux médicaments ».

Depuis, Aqemia croît à toute vitesse. Le fonds Elaia investit 1 million d'euros dès la création de la startup, en 2019. Début 2021, le fonds Eurazeo entre au capital en injectant 9 millions d'euros, destinés à développer ses propres candidats-médicaments. Cette même année, Aqemia gagne un prix du concours 10.000 startups pour changer le monde, organisé par La Tribune, dans la catégorie Santé. En 2022, le fonds Large Ventures de Bpifrance investit 20 millions d'euros supplémentaires.

« Le partenariat commercial avec Sanofi, avec lequel nous collaborons avec succès depuis trois ans, est important, car il prouve que notre technologie fonctionne et nous donne l'opportunité d'apprendre avec une big pharma et d'obtenir de l'argent. Mais notre but ultime reste de développer notre pipe interne », affirme Emmanuelle Martiano.

Pour cela, la startup basée à Paris aura encore besoin d'argent du capital-risque, notamment pour recruter les meilleurs talents. Elle n'aura, a priori, pas trop de difficultés : un quart de sa cinquantaine d'employés vient des quatre coins du monde pour rejoindre cette pépite à mi-chemin entre la tech et la santé. Une quarantaine de nouveaux recrutements sont d'ores et déjà prévus d'ici à la fin 2024.

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Sylvain Rolland

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Commentaires 7
à écrit le 06/12/2023 à 9:39
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Sanofi ... Une equipe de nuls, des bons a rien, On l'a bien vu lors de l'episode du COVID, Est-ce bien raisonnable de leur confier une technologie revolutionnaire ??

à écrit le 05/12/2023 à 12:39
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Méfiance !!! Tout le discours actuel du marketing agressif, avec les mots à placer absolument. Startup, Quantique, Intelligence Artificielle. Attendons de voir ...

à écrit le 05/12/2023 à 8:53
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On fait confiance dans la nature mais encore moins chez les hommes ! ;-)

à écrit le 05/12/2023 à 8:10
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Heu... méfions nous des "techniques révolutionnaires" dans le domaine quand on voit comme la technique déjà ARN pour concevoir des vaccins devait être révolutionnaire, a rapporté des centaine de milliards au secteur alors que nous avons toujours un p...

le 05/12/2023 à 8:24
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Méfions nous peut étre mais pas à exclure pour autant car il y a des cas ou la rupture médicale c est intéressant :dans ma pathologie ça m a sauvé la vue : atteint d une pathologie auto - immune rare sans l ´épi génétique je serai aveugle au bout...

le 05/12/2023 à 8:24
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Méfions nous peut étre mais pas à exclure pour autant car il y a des cas ou la rupture médicale c est intéressant :dans ma pathologie ça m a sauvé la vue : atteint d une pathologie auto - immune rare sans l ´épi génétique je serai aveugle au bout...

le 05/12/2023 à 8:54
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Mais la technique ARN n'est pas inefficace non plus ! C'est juste qu'elle l'est beaucoup moins efficace que ce qu'ils nous ont annoncé.

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