Guillon et Porte "virés" de France Inter : Philippe Val dément toute pression politique

L'éviction de Stéphane Guillon, puis de Didier Porte, de France Inter soulève des vagues. Mais Philippe Val, le patron de la radio, réputé proche de Carla Bruni - Sarkozy dément toute pression politique.

Le directeur de France Inter, Philippe Val, dément dans Le Parisien toute décision politique dans l'éviction des humoristes Didier Porte et Stéphane Guillon. Il qualifie de "fantasme" le tollé déclenché par le licenciement des deux hommes parmi les journalistes, les auditeurs, la presse (avec une caricature de Plantu sur le sujet dans Le Monde de vendred-samedi) et les dirigeants de l'opposition. "Cela fait un an qu'on dit qu'il y a des limites à ne pas dépasser, celles de la loi. L'injure et la diffamation sont sanctionnées. La non-reconduction de leurs contrats n'est pas politique, mais fondée sur leur comportement", déclare Philippe Val.

Stéphane Guillon, qui officiait trois matinées par semaine sur France Inter, attaquait régulièrement à l'antenne ses dirigeants et Nicolas Sarkozy. Il s'était également illustré par des billets au vitriol sur le directeur du Fonds monétaire international Dominique Strauss-Kahn, le premier secrétaire du Parti socialiste Martine Aubry ou le ministre de l'Immigration Eric Besson. Didier Porte a, notamment, irrité sa direction en suggérant dans une chronique à l'ancien Premier ministre Dominique de Villepin de se "lâcher" en insultant le président français de façon imagée.

Au début du mois, la direction avait déjà adressé un avertissement à Didier Porte après une chronique dans laquelle il mettait en scène l'ancien Premier ministre Dominique de Villepin insultant le chef de l'Etat. Pour le chroniqueur, il ne s'agit que d'un prétexte car "cela fait dix ans que je fais des chroniques engagées", a-t-il déclaré. "Je sais que Christian Estrosi (le ministre de l'industrie, ndlr) a récemment écrit à la présidence pour se plaindre d'une de mes chroniques. Je veux pas jouer les martyrs politiques mais ça me semble disproportionné. J'ai l'impression qu'on fait le ménage à deux ans des présidentielles".

Quant aux cinq minutes de chronique quotidienne de Stéphane Guillon, elles ont passé au vitriol un grand nombre de personnalités; politiques entre autres. "France Inter en burqa" était l'intitulé de sa dernière chronique ce mercredi.

"Je ne m'appelle pas Domenech", a répondu lors d'un entretien au Monde Jean-Luc Hees, patron de Radio France nommé il y a un peu plus d'un an par le président de la république. "Si l'humour se résume à l'insulte, je ne peux le tolérer pour les autres mais aussi pour moi (...) Je considère que cette tranche d'humour est un échec. Elle a montré une grande misère intellectuelle, dont je ne m'accomode pas."

De nombreuses réactions et nombreux soutiens

"Politique de la terre brûlée, irrespect des auditeurs, entreprise d'autodestruction... jusqu'où cette direction veut-elle aller ?", interroge le SNJ (syndicat national des journalistes) de Radio France.

Stéphane Bern, qui anime l'émission "Le fou du roi" sur France Inter, a apporté mercredi à l'antenne son soutien à Didier Porte. "Je le vis comme un désaveu personnel. Didier Porte n'a pas démérité dans "Le Fou du roi"". Puis d'ajouter à l'antenne : "nous vivons des moments pénibles". "Je ne cautionne pas ce que Didier Porte a pu dire dans la matinale mais ma logique est de soutenir les humoristes de mon équipe."

"Si certains (de leurs) propos ont pu choquer, écrit aujourd'hui la Première secrétaire du PS, Martine Aubry, elle-même cible d'une chronique acide de Stéphane Guillon, c'est la force et l'honneur d'une démocratie de laisser libre la parole des humoristes et leur droit à la moquerie et même à l'outrance". "Le Parti socialiste exprime sa pleine solidarité aux deux chroniqueurs ainsi congédiés et, au-delà, à tous les journalistes qui font vivre le débat démocratique".

Dans un communiqué intitulé "Un climat délétère de suspicion et de règlements de compte", l'ex-ministre de la Culture et de la communication (2000-2002) Catherine Tasca estime que "l'annonce du départ forcé de Stéphane Guillon et du licenciement de Didier Porte de France Inter valide les inquiétudes qu'(elle) avait exprimées sur la nomination des patrons de l'audiovisuel public par le président de la république".

"Je suis très peiné car j'aime bien Jean-Luc et j'ai de très bons souvenirs de liberté avec lui, mais il a changé", a déclaré Guy Bedos à l'Agence France Presse. Pour Guy Carlier, "virer un humoriste impertinent d'une tranche du matin pendant le pic d'audience, c'est toujours suspect".

En réalité, il ne s'agit pas seulement de déplacer Stéphane Guillon et Didier Porte de tranche horaire. "Il n'y aura pas de changement d'horaire ni de remplaçants. Ce qui ne fait pas rire à 7h55 ne me fera pas plus rire à 3 heures du matin", a prévenu Jean-Luc Hees.

Dans Le Parisien, Philippe Val assure cependant que l'humour aura toujours sa place dans la tranche matinale de France Inter - c'est "l'ADN de la station" - et annonce que de "nouvelles voix de l'humour" arriveront sur la radio. Il confirme par ailleurs que la matinale sera confiée à Audrey Pulvar (iTélé) et Patrick Cohen (Europe 1).

Deux émissions emblématiques de la station, "Esprit critique" et "Et pourtant elle tourne" disparaissent de la grille des programmes d'Inter à la rentrée, ce qui a également alimenté la colère des journalistes qui ont voté la semaine dernière une motion contre le directeur de la radio. "Le changement d'habitudes est compliqué. Mais c'est la vie. Tout est mouvement, sinon on est out", souligne Philippe Val dans Le Parisien.

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