Nouvelle querelle entre Facebook et Apple. En cause : la firme à la pomme croquée a adopté de nouveaux standards sur ses appareils (iPhone, iPad, Apple TV) pour y limiter la publicité ciblée - machine à cash du géant des réseaux sociaux.
Apple teste auprès des développeurs la dernière mise à jour d'iOS, son système d'exploitation pour iPhone, iPad et Apple TV, depuis cette semaine. Cette nouvelle version, qui doit être déployée sur tous les appareils du groupe d'ici la fin de l'année, va contraindre les développeurs à exiger l'accord des utilisateurs pour la récolte et le partage de leurs données personnelles lorsqu'ils naviguent sur des applications ou sites Internet détenus par d'autres sociétés.
Or, ce sont ces précieuses informations qui permettent aux régies publicitaires - proposées par des géants américains comme Facebook, Google ou Amazon - de traquer précisément les usages des internautes. Le but : proposer aux annonceurs des espaces publicitaires personnalisés en fonction des récentes recherches de leurs clients potentiels. La publicité étant ciblée, elle est censée être davantage percutante pour les utilisateurs et justifier la gratuité du service, selon ces entreprises.
Les publicités ciblées, le cœur du business model de Facebook
Pour Facebook, proposer aux annonceurs des publicités ciblées est bien plus lucratif que des annonces génériques. Via son service "Audience Network", le groupe de Mark Zuckerberg permet aux annonceurs d'étendre leurs campagnes publicitaires réalisées sur Facebook et Instagram à d'autres applications de leur choix. En clair, le géant de la Silicon Valley fournit à ses annonceurs des outils permettant de suivre les internautes sur une foule d'applications tierces, quand bien même ils sont sortis de l'écosystème de Facebook (qui détient également Instagram, WhatsApp et Messenger).
Avec la dernière version d'iOS, cette possibilité va être drastiquement réduite. Le réseau social redoute que les utilisateurs d'appareils Apple n'acceptent plus d'être tracés, vu qu'ils en auront désormais la possibilité. C'est pourquoi le groupe envisage de ne plus proposer ses outils de suivi, ciblage et monétisation aux applis tierces sur iOS 14 car cela "n'a plus de sens", écrit-il dans une note de blog. En revanche, ses outils continueront de fonctionner sur Android, le système d'exploitation de Google, qui équipe environ 85% des smartphones sur le marché.
Protéger les données, un argument de vente pour Apple
Actuellement, plus d'un milliard de personnes dans le monde est exposé chaque mois à au moins une publicité ciblée via son service Audience Network, selon les chiffres communiqués par le réseau social. La proportion de ces internautes utilisant Apple n'est cependant pas communiquée. Si cela ne devrait pas impacter les résultats de Facebook outre mesure, le groupe s'attend à une baisse conséquente de revenus pour ses annonceurs.
"Bien qu'il soit difficile de quantifier l'impact sur les éditeurs et les développeurs à ce stade (...), nous avons constaté plus de 50% de pertes de revenus (générés par le ciblage dans d'autres applis) des éditeurs et développeurs lorsque la personnalisation des campagnes publicitaires est supprimée sur mobile", regrette Facebook dans une note de blog publiée mercredi.
Et de poursuivre : "En réalité, l'impact pourrait être bien plus important" pour les annonceurs recourant à Facebook Audience Network. "iOS 14 va nuire à de nombreux développeurs et éditeurs dans une période déjà difficile pour les entreprises", affirme Facebook, qui dit travailler avec "19.000 d'entre eux" dans le monde entier. "Beaucoup d'entre elles sont de petites entreprises, qui dépendent de la publicité pour survivre."
Apple, qui fait partie des trois premiers fabricants de smartphones au monde, a fait de la protection des données personnelles un argument stratégique de ventes depuis environ deux ans. Régulièrement, le patron Tim Cook martèle que "[nos] consommateurs ne sont pas nos produits", taclant ainsi le business model d'entreprises comme Facebook, pour qui la publicité génère plus de 95% de son chiffre d'affaires annuel.
Cet axe stratégique fait suite aux récentes régulations en la matière, avec l'entrée en vigueur du fameux Rgpd (Règlement européen sur la protection des données) en mai 2018, suivi en 2020 par son pendant américain, le "California Consumer Privacy Act" (CCPA).
Sujets les + commentés