Etats-Unis : Obama passe par Amazon Video pour se faire entendre

Alors que de plus en plus d’Américains résilient leur abonnement à la télévision payante pour n’utiliser, parfois, que des services Internet, la Maison Blanche va diffuser le discours annuel de Barack Obama sur l’état de l’Union sur Amazon Video et Youtube. Une première révélatrice des chambardements sur le marché audiovisuel aux Etats-Unis.
Pierre Manière
Barack Obama ne veut pas passer inaperçu des Américains qui boudent la télé payante.
Barack Obama ne veut pas passer inaperçu des Américains qui boudent la télé payante. (Crédits : REUTERS/Kevin Lamarque)

Depuis son arrivée au pouvoir, Barack Obama a toujours su tirer profit d'Internet et des nouvelles technologies. En mars 2009, dans une version modernisée des « causeries au coin du feu » du président Franklin Roosevelt, diffusées à la radio de 1933 à 1944, le chef d'Etat a répondu pendant plus d'une heure aux questions des internautes déposées sur le site de la Maison Blanche. Très attentif aux nouveaux usages du numérique, le « cyber-président », qui a notamment bâtit ses victoires présidentielles en recourant aux réseaux sociaux, a encore frappé. Mardi, son discours annuel sur l'état de l'Union sera, pour la première fois, accessible en streaming et à la demande sur Amazon Video, ainsi que sur le site de la Maison Blanche et sur Youtube.

L'objectif est clair : il s'agit de capter d'attention des « cord-cutters », ces Américains qui « coupent le câble », et mettent un terme à leur abonnement à la télévision payante (qu'il s'agisse de la télé via le câble, mais aussi de celle par satellite) pour privilégier des services Internet, à l'instar d'Amazon Video, Netflix ou Hulu. Pour la Maison Blanche, il s'agit ni plus ni moins que de s'adapter à cette nouvelle habitude de consommation audiovisuelle.

« Ce mardi, mettez-vous à l'aise avec votre appareil favori connecté à Internet », a déclaré Jason Goldman, le responsable du digital de la Maison Blanche, rapporte Reuters. Donc pour ceux qui ont coupé le cordon du câble et du réseau de télévision : si vous avez une télévision connectée, un navigateur Web, un smartphone ou une tablette, vous pourrez suivre le discours du président. »

Des audiences en forte baisse

Ce faisant, Jason Goldman espère que Barack Obama s'invitera dans un maximum de foyers. Il faut dire que ce discours télévisé, qui présente les priorités de la nouvelle année, voit son audience dégringoler depuis plusieurs années. En 2009, 52 millions d'Américains avaient écouté le président, contre 31,7 millions seulement l'an dernier, rappelle Reuters.

L'initiative constitue toutefois un tournant. A elle seule, elle montre à quel point le digital chamboule la consommation audiovisuelle au pays de l'Oncle Sam. Historiquement, les Américains sont accros à la télé payante. Beaucoup déboursent jusqu'à plus de 100 dollars par mois pour un abonnement à plusieurs centaines de chaînes. Mais la donne a changé :

« Ces dernières années, les gens quittaient la télévision câblée et migraient vers les offres satellitaires ou celles des opérateurs télécoms [et leur télévision sur IP, Ndlr] », explique Jacques Bajon, spécialiste des médias au think tank Idate. Or depuis quelques trimestres, on voit que tous les réseaux sont menacés de désabonnements. »

Les consommateurs prennent le pouvoir

Pourquoi ? Parce que le consommateur américain veut reprendre le contrôle sur sa consommation. En grossissant le trait, beaucoup n'éprouvent plus la nécessité de disposer de plusieurs centaines de chaînes. En outre, ils veulent voir leur film, matchs, ou émissions préférées quand ils veulent, et sur le support qu'ils préfèrent (comme un smartphone ou une tablette). La très forte progression des services exclusivement sur Internet, comme Netflix, HBO Now, Hulu ou Amazon Video, qui séduisent des millions de « cord-cutters », s'inscrit dans cette tendance. Mais d'autres phénomènes apparaissent :

« On commence aussi à voir des 'cord-shaving', c'est-à-dire des consommateurs qui diminuent la taille de leur abonnement pour ne garder que ce qui les intéressent, constate Jacques Bajon. Ou encore les 'cord-never' : ce sont surtout les jeunes, qui affirment qu'ils ne s'abonneront jamais au moindre service de télé payante ».

Une révolution aux Etats-Unis, où d'après l'Idate, en 2014, 80% des Américains avaient un abonnement à la télé payante - contre 62% en France ! Pour Jacques Bajon, « cela ne sonne pas la fin de la télé. Mais on assiste clairement à une nouvelle répartition de la valeur ». Toujours d'après l'Idate, le nombre d'abonnés à la télévision payante était de 100,9 millions en 2012, contre 100,6 millions en 2013, et de 99,4 millions en 2014. En clair, si les désabonnements sont une réalité, « on ne perd pas pour autant 5 millions d'abonnés par an », temporise Jacques Bajon. Dans ce nouveau contexte, l'initiative de la Maison Blanche en faveur des « cord-cutters » pourrait bien n'être que la première d'une longue série.

Pierre Manière

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Commentaire 1
à écrit le 11/01/2016 à 20:57
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Eeet.. C'est quoi, "amazon"..??

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