Financement des startups : les grands groupes en renfort du plan « Tibi 2 »

De grandes entreprises comme Pfizer, Mérieux et Aéroport de Paris se portent volontaires pour financer les startups de la tech via l'initiative Tibi 2, lancée en 2023 pour mobiliser les investisseurs privés. Le gouvernement parvient ainsi à mobiliser quelques centaines de millions d'euros de plus à ajouter au 7 milliards d'euros annoncés en juin dernier, mais n'atteint pas encore l'objectif des 10 milliards d'euros prévus.
Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'Industrie.
Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'Industrie. (Crédits : D.R.)

Après les bancassureurs, c'est au tour des industriels de se mobiliser pour mieux financer les startups. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'Industrie, et Marina Ferrari, secrétaire d'Etat au Numérique, annonce ce mardi 6 mai l'ajout de cinq nouveaux investisseurs à l'initiative Tibi 2. Sa première version avait été lancée en 2019, sur une idée de l'économiste Philippe Tibi. Son objectif : inciter les investisseurs privés à soutenir la croissance des entreprises technologiques. Après 6 milliards d'euros récoltés pour « Tibi 1 » auprès des bancassureurs pour la période 2019-2022, l'Elysée avait annoncé en juin 2023 l'obtention de 7 milliards d'euros à déployer sur trois ans auprès des mêmes acteurs. La deuxième mouture du plan se veut focaliser sur des thèmes plus précis : la décarbonation de l'économie et les deep tech.

Le groupe ADP (Aéroport de Paris), la Française des Jeux, MACSF (Mutuelle d'assurance des professionnels de santé), Merieux Development et Pfizer se sont ajoutés à la liste. Leur participation permet d'ajouter quelques centaines de millions d'euros à la somme de départ, précise le cabinet de Marina Ferrari, sans parvenir au cap fixé des 10 milliards d'euros. « L'objectif des dix milliards d'euros reste intact. Il sera atteinte grâce à l'arrivée de nouveaux investisseurs comme ceux qui ont été présentés aujourd'hui », précise toutefois le cabinet de Marina Ferrari. Le montant exact des investissements n'est pas révélé.

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« On trouve une majorité d'entreprises non financières, notamment industrielles, parmi ces nouveaux investisseurs, c'est une grande nouveauté par rapport aux investisseurs annoncés en juin 2023, même si Orano avait déjà montré la voie, note le cabinet de Roland Lescure. On avait pensé à inclure les industriels dès 2019, mais ceux qui avaient été sollicités s'étaient montrés alors assez peu intéressés. Le fait d'avoir eu une première période qui a bien fonctionné en a convaincu un certain nombre, et on espère par la suite de nombreux autres. » Ces investisseurs sont intéressants car en plus de l'intérêt financier pour la startup, il y a une possibilité d'accompagnement, de conseil et une vision stratégique qui n'est pas la même que pour un investisseur financier.

Comme Tibi 1, l'argent investi promis par ces entreprises sera fléché vers une centaine de fonds homologués comme Elaia, Partech, Daphni, Five Arrows... Tibi 2 a été élargi à des fonds de early stages (à des stades de développement précoce), qui ont un niveau d'investissement dans des startups deeptech particulièrement important.

Tibi 2 : un retard au lancement

Le gouvernement espère convaincre de nouveaux industriels d'ici fin 2026, mais aussi des « family offices », des bureaux de gestion de patrimoine. Pour rappel, « Tibi 2 » avait été annoncé tardivement, près de six mois après la fin de « Tibi 1 » car le gouvernement peinait à trouver des volontaires. La chute des valorisations tech avait alors renforcé la frilosité des investisseurs. De leur côté, les investisseurs institutionnels, qui financent les fonds de capital-risque et capital-investissement, étaient alors moins intéressés par la tech, perçue comme plus risquée à la fois à cause de la crise du secteur, mais aussi du contexte macroéconomique, avec la remontée des taux d'intérêts des banques centrales, l'inflation forte, et la percée des investissements pour la transition énergétique.

Le contexte a aujourd'hui évolué, rassure le cabinet de Marina Ferrari. « Les fonds d'investissements rapportent de bonnes performances, celles-ci devraient convaincre les investisseurs institutionnels de poursuivre leur engagement. »

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Sur la première période, 6 milliards ont été investis, ce qui a permis aux fonds financés d'injecter au total 30 milliards d'euros dans des startups sur la période 2019-2022, par effet levier. « L'objectif était d'accompagner les startups sur les étapes ultérieures de leur développement, qui jusqu'alors était majoritairement financées par des fonds non-européens. Cet objectif a été très largement atteint. C'est notamment grâce à la montée en compétences des fonds d'investissement, qui doivent être capables d'évaluer des startups à haute intensité technologique. L'initiative Tibi a permis à ce titre de recruter 400 spécialistes dont une moitié de senior au sein des fonds qui ont des compétences pour qualifier ces opportunités d'investissement.»

Les montants investis dans les fonds dédiés aux opérations de « growth » ont été multipliés par 5 entre 2019 et 2022. Toutefois, après trois années de très bonne performance, le dernier rapport de France Invest montre que les levées de fonds en France ont ralenti en 2023, en particulier sur les opérations de growth. Au sein de l'UE, la France est de loin le premier pays qui investit dans les startups technologiques. En 2023, ce sont 8,3 milliards d'euros qui ont été levés par des startups en France contre 6,5 milliards d'euros par les Allemands, tient à rappeler le cabinet de Marina Ferrari.

L'objectif de l'initiative est aussi de faire grandir les fonds d'investissements pour qu'in fine, ils soient plus à même d'accompagner les jeunes entreprises sur le long cours. La première initiative Tibi a à ce titre permis d'accompagner 3 fonds qui ont dépassé le milliard de fonds sous gestion, précise le cabinet de Marina Ferrari. La deuxième initiative devrait permettre d'accompagner une quinzaine de fonds dépassant le milliard d'euros sous gestion.

La moitié des levées de fonds en France concerne des startups industrielles

« Avoir des fonds de plus grande dimension permet d'accompagner des projets de développement industriel, y compris de taille significative comme la gigafactory de Verkor par exemple, précise Roland Lescure. Cela n'était pas possible il y a encore quelques années. Cela permet aussi d'accompagner des projets bien plus risqués, plus innovants, et donc qui ont beaucoup plus de chance de s'imposer durablement à l' international. Les entreprises industrielles innovantes, qui ont longtemps fait peur aux investisseurs, ne représentaient que 17 % des montants levés en capital-investissement en France en 2020, contre la moitié aujourd'hui.»

Le gouvernement tient à rappeler que cette initiative s'accompagne d'autres mesures permettant de mobiliser l'épargne des Français dans « l'économie réelle ». Il plaide par ailleurs pour que la prochaine Commission européenne s'empare du sujet de l'union des marchés de capitaux, qui permettrait de mobiliser des mannes financières bien plus importantes que celles de l'initiative Tibi.

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Commentaires 5
à écrit le 07/05/2024 à 8:41
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Photo:Il faut que les jeunes comprennent que ce sont les vieux rétrogrades qui commandent !

le 07/05/2024 à 9:37
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Oups désolé j'avais pas vu que c'était des faux jeunes ! ^^

à écrit le 06/05/2024 à 18:51
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" Après les bancassureurs".....errata, il fallait lire ' apres l OBLIGATION faite aux bancassureurs pour utiliser les contrats en FONDS EUROS pour financer des projets inutiles et pas rentables donc bienveillants dans le cadre de la repression financ...

à écrit le 06/05/2024 à 17:21
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Vos " fameux " GRANDS GROUPES " n' ont qu' une politique " industrielle " : racheter les start-up qui ont " réussi " et ne pas les développer : l' exemple le plus flagrant étant celui de Schlumberger

le 06/05/2024 à 18:36
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Tous les grands groupes investissent dans des start up pour ne pas passer à côté d'innovations pour leurs propres activités entre autres et cela depuis plusieurs années ... tout en étant conscients que les échecs seront nombreux .

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