Climat : les projets d'expansion des énergies fossiles plombent l'objectif de l'accord de Paris

Selon un rapport d'une agence de l'ONU, les projets des 20 principaux pays producteurs d'énergie fossile menacent grandement l'objectif de limiter le réchauffement planétaire à 1,5°C, prévu par l'Accord de Paris sur le climat. Une situation alarmante dans la perspective de la COP28 aux Emirats arabes unis, à partir du 30 novembre.
Les 20 pays mentionnés dans cette étude représentent 82% de la production et 73% de la consommation mondiale de combustibles fossiles.
Les 20 pays mentionnés dans cette étude représentent 82% de la production et 73% de la consommation mondiale de combustibles fossiles. (Crédits : Reuters)

La mise en garde est aussi limpide qu'alarmante. Selon un rapport publié ce mercredi du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE), les projets actuels d'expansion de la production de pétrole, de gaz et de charbon des principaux pays producteurs plombent l'objectif de limiter le réchauffement à 1,5°C.

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Parmi les 20 pays visés par l'étude figurent les Etats-Unis, la Chine, la Russie, l'Australie et les Emirats arabes unis. Les 20 projets de ces Etats sur le secteur produiraient en 2030 110% de combustibles fossiles de plus que ce qui serait compatible avec une limitation du réchauffement à 1,5°C. Avec un réchauffement à 2°C, le chiffre descend à 69 % de plus.

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L'enquête souligne que les hausses de production prévues dans ces pays produiraient 460% de plus de charbon, 82% de plus de gaz et 29% de plus de pétrole que ce qui serait conforme à la limite de 1,5°C. Pour rappel, les 20 pays mentionnés dans cette étude représentent 82% de la production et 73% de la consommation mondiale de combustibles fossiles.

« Ces projets visant à augmenter la production de combustibles fossiles compromettent la transition énergétique nécessaire pour parvenir à des émissions nettes nulles, ce qui remet en question l'avenir de l'humanité », alerte à ce sujet Inger Andersen, directrice exécutive du PNUE.

« A partir de la COP28, les nations doivent s'unir pour parvenir à une élimination progressive, gérée et équitable, du charbon, du pétrole et du gaz, afin d'atténuer les turbulences à venir et d'en faire bénéficier chaque habitant de la planète. »

L'avenir des énergies fossiles sera au cœur de la COP28 qui se tiendra du 30 novembre au 14 décembre aux Émirats arabes unis. Depuis la COP21 à Paris en 2015, qui a vu naître l'Accord de Paris, l'objectif global de ces conférences est de limiter le réchauffement par rapport à l'ère préindustrielle à moins de 2°C, et de préférence à 1,5°C.

Même constat de l'Agence internationale de l'énergie

Ce constat est aussi partagé par le dernier rapport annuel de l'Agence internationale de l'énergie (AIE). Celui estime ainsi que « dans l'état actuel des choses, la demande de combustibles fossiles devrait rester bien trop élevée » pour maintenir l'objectif climatique le plus ambitieux de l'Accord de Paris de 2015.

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« La transition vers une énergie propre est en cours dans le monde entier et elle est inévitable. Ce n'est pas une question de "si", c'est juste une question de "quand" - et le plus tôt sera le mieux pour tout le monde », a déclaré lors de la publication de l'étude Fatih Birol, directeur exécutif de l'AIE.

Dans les recommandations de son rapport, l'AIE estime qu'en 2030 il est nécessaire d'avoir 10 fois plus de véhicules électriques sur les routes qu'à l'heure actuelle. L'agence préconise aussi une part des renouvelables dans le mix électrique mondial devrait aux alentours des 50% (contre 30% aujourd'hui).

Atermoiements des producteurs d'énergies fossiles

La combustion des énergies fossiles est la principale source d'émissions des gaz à effet de serre responsables du changement climatique. Sur ce volet, la plupart des plus grands producteurs mondiaux se sont engagés à atteindre la neutralité carbone d'ici le milieu du siècle. 

Mais les pays producteurs ne mentionnent pas explicitement la manière d'atteindre les objectifs qu'il fixe dans les textes officiels de ces négociations, notamment l'Accord de Paris de 2015, considéré comme le plus important depuis les premières conférences climat à partir de 1992 (Sommet de Rio). Un flou dénoncé régulièrement par les ONG environnementales et le monde scientifique, notamment le comité du GIEC.

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Cela a conduit à un « grand écart » entre les projets de production et la nécessité d'abandonner rapidement les combustibles fossiles pour atteindre les objectifs climatiques, déplore Ploy Achakulwisut, auteur principal du rapport du PNUE et scientifique au sein de l'Institut de l'environnement de Stockholm.

2023, année la plus chaude de l'Histoire

Le rapport du PNUE est à mettre en lien avec ces chiffres publiés aujourd'hui par l'observatoire européen Copernicus. Selon celui-ci, la température moyenne mondiale depuis janvier est la plus chaude jamais mesurée sur les dix premiers mois de l'année. Elle est estimée par l'institut à 1,43°C au-dessus du climat des années 1850-1900.

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La température mondiale est donc plus proche que jamais de la limite emblématique de l'accord de Paris (+1,5°C de moyenne sur plusieurs décennies). « Nous pouvons affirmer avec une quasi-certitude que 2023 sera l'année la plus chaude dans les annales » et « le sentiment de devoir prendre d'urgence des mesures climatiques ambitieuses à l'approche de la COP28 n'a jamais été aussi fort », prévient Samantha Burgess, cheffe adjointe du service changement climatique (C3S) de Copernicus, dans un communiqué.

Le Canada à la traîne sur ses objectifs climatiques

Tenir ses objectifs de décarbonation est loin d'être aisé pour les pays riches et industrialisés. Illustration ce mercredi avec le Canada qui ne parviendra pas à atteindre ses objectifs de réduction des émissions de carbone d'ici 2030 s'il n'intensifie pas rapidement ses efforts. Un alerte lancée par un rapport de Jerry DeMarco, commissaire à l'environnement au sein de l'administration canadienne.

Compte tenu des politiques mises en place actuellement dans le pays, son rapport estime qu'Ottawa ne réduira ses émissions que de 36% sous le niveau de 2005 d'ici 2030, contre les 40 à 45% auxquels il s'est engagé en 2022.

Le haut fonctionnaire attribue ce déficit à des retards dans l'implémentation de certaines mesures climatiques, telles que le plafonnement des émissions du secteur pétrolier et gazier, et les nouvelles réglementations sur les carburants décrits comme « propres ». Un point de vue qui diffère de celui du gouvernement Trudeau, qui justifie ces retards à la pandémie de Covid-19 et à des consultations plus longues que prévues avec les parties prenantes.

(Avec AFP)

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Commentaire 1
à écrit le 09/11/2023 à 8:44
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plus de 40 ans que notre classe dirigeante mondiale savait pour le chaos climatique et plus de 40 ans qu'elle n'a strictement rien fait ni même dit d'ailleurs.

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