LA TRIBUNE - Pourquoi êtes-vous surpris sur l'issue de cette réforme du label ISR ?
PHILIPPE ZAOUATI - C'est en effet très inattendu comme nouvelle. Tous les échos que nous avions ces dernières semaines nous ont laissé croire à un recul de la part de Bercy. Le ministère suit finalement les recommandations des acteurs de la Place comme Mirova et Reclaim Finance, en le rendant plus exigeant. Il faut le souligner ici, c'est une vraie décision politique.
Le message est extrêmement clair : pas de finance durable si on continue à investir dans des exploitations pétrolières.
On voit en ce moment certains décideurs politiques aux Etats-Unis qui dénigrent, voire interdisent des fonds ESG sur leur territoire. En étant plus exigeante avec ce label, la France donne un autre message politique, c'est une excellente chose.
Quelles conséquences avec cette nouvelle version du label ISR ?
En excluant les fonds qui possèdent des portefeuilles d'investissement liés aux hydrocarbures, cela aura un impact très fort sur le périmètre des fonds labellisés. Certains vont se retirer, d'autres vont peut-être modifier leur stratégie. Il y aura, certes, moins de fonds dans ce label avec cette réforme. Mais grâce à cela, en étant plus exigeant, le label ISR gagne en force. Un label que tout le monde obtient facilement ne sert pas à grand-chose.
Quels points de progression pour le label ISR, malgré cette réforme ?
Encore aujourd'hui, ce n'est pas un label qui met en avant des fonds finançant des acteurs économiques à impact, c'est-à-dire qui agissent concrètement en faveur de solutions environnementales et sociales. L'approche actuelle consiste à labelliser dans une approche « best in class ». C'est-à-dire des fonds dont les actifs sont les mieux notés en matière ESG, mais qui ne financent pas forcément des solutions sur le terrain et qui n'excluent pas certains actifs nocifs pour l'environnement.
C'est l'approche d'il y a dix ans car c'était le début de la finance durable, mais aujourd'hui, il faut aller plus loin. Il faut également que les labels se parlent un peu plus entre eux. En France, il y a trois labels principaux, Greenfin, Finansol et le label ISR. La relation entre tous est peu travaillée et cela crée de la confusion dans le grand public. On a besoin de clarification pour que les épargnants puissent faire leur choix plus facilement.
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