CNR et réforme des retraites : les syndicats ont invité à ne pas polluer les débats à venir

Les trois syndicats qui ont participé jeudi au lancement du Conseil national de la refondation (CNR) ont invité l'exécutif à mettre de côté son projet de reporter l'âge légal de la retraite, s'il ne veut pas compromettre la "volonté d'écoute" qui est désormais son mantra.
Laurent Lequien
(Crédits : POOL)

Le premier syndicat français est fermement opposé à un report de l'âge légal de la retraite, promesse de campagne d'Emmanuel Macron.

"J'ai redit (...) qu'il ne faut pas que l'action du gouvernement entrave cette volonté d'écoute et d'ouverture par des prises de décision qui seraient clivantes. Je pense notamment au sujet des retraites", a affirmé le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, au sortir de la réunion à Marcoussis (Essonne).

"On peut considérer qu'il y a une forme de loyauté, une forme de compréhension que le risque démocratique qui est le nôtre aujourd'hui nécessite d'écouter davantage la société civile", a estimé M. Berger, pour résumer l'ambiance des débats.

L'âge légal pour les retraites, le sempiternel point d'échauffement

L'Unsa a elle aussi dit au président "qu'on ne pouvait pas construire du consensus si des sujets qui pouvaient re-fracturer le pays étaient mis à l'agenda", notamment "l'âge légal pour les retraites", a relaté son patron Laurent Escure.

"J'ai l'impression que le président a bien compris que s'il voulait réussir son opération, c'est-à-dire trouver une nouvelle méthode qui fabrique des compromis, des consensus, on ne commençait pas par se déchirer sur des sujets qui sont explosifs", a-t-il commenté. "Cela ne veut pas dire que je suis complètement rassuré", a-t-il ajouté.

Si le gouvernement devait persister dans sa volonté de mettre en œuvre la réforme, "les discussions (au sein du CNR) n'auraient plus de sens", a mis en garde M. Escure auprès de l'AFP.

Le sujet des retraites a été "bien mis de côté" tout au long de la journée, et ne fait pas partie des futurs chantiers du CNR, selon Cyril Chabanier de la CFTC. "Je pense qu'ils ont compris que (...) s'il y avait le sujet « retraites » avec les mesures paramétriques, les organisations syndicales ils les perdaient du CNR. (...) Espérons que cela va continuer comme ça."

Les trois syndicats ont souligné qu'il manquait à l'agenda des discussions le thème de la pauvreté et des inégalités, mais "les débats ont permis que ce soit intégré à l'agenda", a dit M. Escure.

Le volet santé lancé "avant la fin du mois"

La conférence sur le système de santé, dans le cadre du CNR, "sera lancée avant la fin du mois" de septembre, a indiqué vendredi le ministre de la Santé, François Braun.

"Ce quinquennat sera celui d'une vaste réforme de notre politique de santé et de prévention", a affirmé M. Braun en clôture du 43e congrès de la Mutualité française, à Marseille. Mais son contenu doit encore être précisé, dans le cadre de la "conférence des parties prenantes" annoncée par Emmanuel Macron durant sa campagne électorale et rattachée depuis au CNR, dont le coup d'envoi a été donné jeudi.

Le chef de l'État a déjà assuré que "le défi de l'accès aux soins" serait "au coeur de l'enjeu", jugeant "pas acceptable" les difficultés de nombreux Français à trouver un médecin traitant.

Le ministre de la Santé s'est à son tour engagé à ce que "l'intensification de la lutte contre les déserts médicaux compte parmi les priorités et (soit) un objectif clair" des discussions à venir avec les soignants, mais aussi les patients et les élus locaux.

L'exécutif n'entend toutefois pas laisser le dialogue entraver son action: "La concertation ne doit pas être un frein aux solutions quand elles s'imposent de façon urgente", a-t-il prévenu, notamment sur le sujet des "soins non programmés".

Une mise en garde qui vise particulièrement les médecins, comme il l'a fait comprendre un peu plus tôt lors d'une visite des urgences de l'hôpital de la Timone. "Il est inacceptable qu'on ne puisse pas avoir accès à un médecin généraliste le soir, au moins jusqu'à minuit, et le week-end", a souligné M. Braun.

Dénonçant le "mercenariat" de certains praticiens, il a estimé qu'il "faudrait agir" sur ceux qui exercent comme intérimaires ou remplaçants. "On ne va pas forcer les gens à s'installer, mais disons qu'on va les inciter de manière forte", a-t-il ajouté.

Ceux qui partent exercer dans des "centres de soins immédiats" - sans rendez-vous - "pour ne plus faire de nuits et de week-ends" sont également visés: "Il va falloir qu'ils participent aux gardes, en ville ou aux urgences", a averti le ministre.

Une nouvelle réunion du CNR au plus tard en décembre

Emmanuel Macron a invité les participants au CNR à se réunir de nouveau au plus tard en décembre, selon plusieurs participants.

"Le président a proposé que nous nous retrouvions dans la configuration d'aujourd'hui au mois de décembre", a déclaré le vice-président de l'Association des maires de France (AMF), Guy Geoffroy, devant la presse.

François Bayrou, Haut commissaire au plan chargé de piloter les travaux du CNR, a ensuite rapporté que la prochaine réunion du CNR en plénière, en présence du président de la République et de la Première ministre Élisabeth Borne, aurait lieu "d'ici décembre".

"Le président de la République a dit au plus tard au mois de décembre" et "plus tôt s'il le fallait", a précisé devant la presse M. Bayrou.

Le président du MoDem, allié de la majorité, a estimé en outre que "toutes les prudences, craintes, avertissements qui s'étaient exprimées" à l'égard du CNR, boycotté à son lancement par les oppositions et plusieurs syndicats, "ont été démenties par la réalité de la journée".

Le fait que la réunion se soit déroulée à huis clos "a joué un rôle", car "personne ne s'est enfermé dans ses déclarations habituelles", s'est réjoui le maire de Pau.

Mais "ce qui a joué le plus grand rôle, c'est la certitude que personne ne serait utilisé" ou "instrumentalisé", a-t-il souligné. "Il était clair que tous ceux qui étaient là seraient respectés dans leurs convictions, dans leurs engagements, et qu'ils n'étaient pas là pour servir un intérêt, quel qu'il soit, d'opinion ou partisan", a-t-il dit.

Noam Leandri, président du collectif Alerte qui rassemble les grandes associations françaises de lutte contre la pauvreté et l'exclusion et président de l'Observatoire des inégalités, a lui affirmé à l'AFP qu'il y aurait "CNR thématique national sur les inégalités et la pauvreté pour parvenir à des propositions", précisant que ce thème était "absent initialement".

De l'extrême droite à l'extrême gauche, les oppositions voient avant tout dans le CNR un moyen pour le président de contourner le Parlement, où son camp n'a plus de majorité absolue, pour reprendre la main dans le débat public.

(avec AFP)

Laurent Lequien
Commentaires 7
à écrit le 11/09/2022 à 8:47
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Débat ou monologue? That is the question? Faire perdre le temps à tout le monde, parce qu'"élu" sans vision, ni programme!;-)

à écrit le 10/09/2022 à 12:12
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En France, on arrive pas à modifier les régimes de retraites (recul de l'âge de départ etc...) Le constat et que notre ami Charles III d'Angleterre, prend le travail maintenant à l'âge de 73 ans.

le 11/09/2022 à 8:26
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"En France, on arrive pas à modifier les régimes de retraites (recul de l'âge de départ etc...)" Faut te réveiller : -1982 : La réforme Mauroy -1993 : La réforme Balladur -1999 : création du Fonds de réserve pour les retraites -2003 : la réfor...

à écrit le 10/09/2022 à 11:55
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Beaucoup de communication comme on en fabrique dans les grands groupes juste pour plaire . Ce gouvernement et les personnalités qui le compose ont fait la preuve de leurs incompétences et de leurs inexpérience. Sans compter l'absence de vision et de ...

à écrit le 10/09/2022 à 10:32
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Encore des concertations pour la com et un gouvernement qui n'en fera de toute façon qu'à sa tête.... Et comme il s'entête à ne pas augmenter les impôts des entités qui pourraient en payer davantage, il se condamne à l'inaction, au pansement, à écope...

le 10/09/2022 à 12:29
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tout simplement le renouveau n est plus le parti de l abondance ! il faut écouter les autres formations !

à écrit le 10/09/2022 à 9:55
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Débat ou monologue? That is the question? Faire perdre le temps à tout le monde, parce "élu" sans vision, ni programme!;-)

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