Etat-Providence : il est temps de sortir du « mirage de la gratuité universelle », défend Bruno Le Maire

Le ministre de l'Economie pointe les défauts actuels de l'Etat-Providence à la française et appelle à passer à un modèle « d'Etat protecteur ». Concernant l'assurance chômage, il n'exclut pas de resserrer encore ses conditions.
Bruno Le Maire, ministre de l'Economie.
Bruno Le Maire, ministre de l'Economie. (Crédits : Reuters)

En finir avec l'Etat-Providence ? C'est ce qu'a plaidé le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire dans une interview au Journal du Dimanche. Il souhaite passer à un modèle « d'Etat protecteur », afin de « reprendre la maîtrise » d'un système devenu « incontrôlable », explique le ministre, à l'occasion de la parution d'un nouveau livre, « La voie française », publié chez Flammarion. Le modèle actuel a selon lui comme « but ultime la gratuité de tout, pour tous, tout le temps : c'est intenable ! ».

Quand le modèle d'Etat providence a été fondé en 1945, il avait « peu de prestations et beaucoup de cotisants. Près de quatre-vingts ans plus tard, il a beaucoup de prestations et moins de cotisants. Comment cela peut-il tenir ? », questionne-t-il. Avant d'ajouter :

« Les salariés ne peuvent plus être les seuls financeurs du modèle social. La charge est trop lourde. Il faut trouver des voies complémentaires, plus justes et moins pénalisantes pour le travail et la production ».

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Dépenses publiques qui s'empilent

Selon lui, « partout en Europe », mais « surtout en France », « l'État-providence a fini par devenir une machine à empiler de nouvelles dépenses publiques, sans examen de leur pertinence ni de leur efficacité, sans remise en cause non plus des dépenses précédentes. Nous devons reprendre la maîtrise de ce système devenu incontrôlable ».

Le ministre estime que « le temps des choix est venu », pour sortir du « mirage de la gratuité universelle ». Il argumente en citant notamment le vieillissement de la population, avec le grand âge qui « pèse lourdement sur les comptes sociaux et pèsera de plus en plus lourd », et appelle à débattre au parlement des « grands enjeux du vieillissement, de la prise en charge de la dépendance, de l'accompagnement des personnes seules ».

Pour réduire les dépenses, le gouvernement a déjà annoncé début mars des économies à réaliser sur les budgets de l'Etat et de la Sécurité sociale qui devront atteindre « au moins 20 milliards d'euros » en 2025, et non plus les 12 milliards envisagés précédemment. Fin février, l'exécutif avait également annoncé un rabot sur les dépenses de l'Etat de l'ordre de 10 milliards d'euros après que Bercy a abaissé sa prévision de croissance à 1% pour 2024.

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L'assurance chômage dans le viseur

Du côté de l'assurance chômage, Bruno Le Maire n'exclut pas de resserrer encore ses conditions :

« La meilleure rémunération, la formation, la valorisation des filières qui embauchent, une meilleure orientation sont des politiques que nous mettons déjà en œuvre. Ajoutons-y une nouvelle réforme de l'assurance chômage : nous avons encore une durée d'indemnisation parmi les plus généreuses en Europe. Cette générosité se paie au prix fort : un taux de chômage encore au-dessus de celui de nos principaux partenaires économiques », lance le ministre.

Déjà début mars, Bruno Le Maire plaidait pour une reprise en main « définitive » par l'Etat de l'assurance chômage, une position qui fait bondir les syndicats au moment où une nouvelle réforme est envisagée par le gouvernement afin d'en durcir encore les droits. En effet, depuis trois mois, le gouvernement manifeste sa volonté de durcir encore les droits à l'assurance chômage, après deux réformes controversées en ce sens en 2019 et 2023.

Gabriel Attal a déclaré il y a quelques jours qu'il réunirait « à la mi-mars » un séminaire gouvernemental « dédié à la question du travail » pour notamment « préparer les grandes décisions » à prendre en la matière.

Bruno Le Maire prône une « Communauté européenne de l'intelligence artificielle »

 Outre les dépenses de l'Etat, le ministre français de l'Economie Bruno Le Maire est également revenu sur les enjeux de l'intelligence artificielle (IA) lors de son interview. Il propose ainsi « la création d'une communauté européenne de l'intelligence artificielle » afin de mieux coordonner les moyens pour innover dans ce domaine. « La France a un temps d'avance en IA », selon lui, et « elle doit guider l'Europe vers un projet ambitieux ».

Symbole de réussite dans ce domaine, le français Mistral AI, l'un des deux champions de l'IA en Europe, est cité en exemple. Mistral AI « a trouvé dans notre pays un écosystème dynamique, des fonds, un modèle culturel, une envie. (...)  La France restera le leader en Europe de l'IA si nous simplifions encore nos procédures, si nous mettons à disposition les capitaux nécessaires, si nous défendons notre modèle open source », affirme Bruno Le Maire.

Mistral AI avait reçu les encouragements du président Emmanuel Macron lors de son lancement et Bruno Le Maire a récemment insisté sur sa volonté de voir émerger « un modèle sur l'IA qui soit propre à la France (...) » et créateur d'emplois.

« Le moment est venu pour l'Union européenne d'embrasser l'innovation et le risque, en privilégiant l'investissement massif avant la réglementation. Que voulons-nous devenir ? Des producteurs de savoirs nouveaux ? Ou de simples clients de Meta et de Google ? », s'interroge le ministre.

Mi-janvier, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen avait, elle, déjà incité l'UE à « redoubler d'efforts » pour ne pas se laisser distancer dans le domaine de l'IA. Deux semaines plus tard, les Etats membres ont approuvé une première loi pour réguler l'IA, tout en prenant en compte les besoins des start-up.

(Avec AFP)

Commentaires 33
à écrit le 19/03/2024 à 16:28
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Un classique de la droite que de pointer du doigt les chômeurs pour flatter sa clientèle de vieux boomers embourgeoisés dans les années 70/80 avec l'argent des déficits...

à écrit le 18/03/2024 à 17:10
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"Il argumente en citant notamment le vieillissement de la population, avec le grand âge " Ben, je comprends ,je croyais que le Covid avait fait son job ?

le 19/03/2024 à 12:57
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Chaque année, vous avez des centaines de milliers de naissances et ipso facto, des centaines de milliers de vieux qui atteignent un certain âge. Même si la tranche 2021 a été éradiquée à 100% par covid (vive le vaccin pour l'avoir évité) ceux de l'an...

à écrit le 18/03/2024 à 17:06
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"En finir avec l'Etat-Providence ?" Il y aurait un l'etat-providence si les salariés ne cotisaient pas ,mais la, ce n'est pas le cas.

à écrit le 18/03/2024 à 15:54
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[Le ministre de l'Economie pointe les défauts actuels de l'Etat-Providence à la française et appelle à passer à un modèle « d'Etat protecteur »] Aucun doute sur ce constat. Toutefois, notre Bruno national ne peut pas en plus ignorer un autre phénomèn...

le 19/03/2024 à 13:00
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Si un milliardaire gagne un milliard de revenus il faut voir le taux d'imposition mais leur fortune c'est du bien, des activités, entreprises (luxe par ex), des actions (voir comment Trump a du mal à trouver 450 millions en liquide comme caution, il ...

à écrit le 18/03/2024 à 13:50
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Qu'on doute des possibilités (voire capacités) de BLM à résoudre les problèmes, soit. Par contre il a déjà raison sur le constat actuel; lequel ne va que s'aggraver. Le fond du problème étant démographique. Quelque part, la réalité, ça ouvre les yeux...

à écrit le 18/03/2024 à 12:42
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Lemaire n'a jamais créé de richesse et il n'en créera jamais. d'ailleurs il ne sait meme pas comment c'est possible, c'est le carlos ghosn de bercy, son seul mantra : cost killer !

le 18/03/2024 à 16:13
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S'il n'est pas d'accord, qu'il démissionne et retourne à ses romans polissons.

à écrit le 18/03/2024 à 10:42
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Fascinant... Encore ces Français fainéants montrés du doigt! Si nos élites à Bercy s'appliquaient à surveiller les comptes de la Sécu d'un peu plus près (surtout avec son système hybride public/privé) et en parallèle à éviter que l'Etat tape dans le ...

à écrit le 18/03/2024 à 10:36
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"à l'occasion de la parution d'un nouveau livre, « La voie française », publié chez Flammarion. " Encore un bouquin qui finira dans un vide-grenier à 1€.

à écrit le 18/03/2024 à 10:35
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Bonjour, sortir du mirages de la gratuité.. Aller une question pour le bon ministre.. Quelle est la mehieurs cantine de Paris, la cantine des parlementaires... pas chere et tres tres bonne, tres loins du prix réelle.. Donc , pour la gratuité ...

à écrit le 18/03/2024 à 10:34
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14 MD€ Voilà l'augmentation de rémunération accordé par Bruno Le Maire aux fonctionnaires sans contrepartie et aucune réforme de la fonction publique. Résultat l'éducation nationale en déroute, les hôpitaux publiques toujours avec des services calami...

à écrit le 18/03/2024 à 9:16
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Encore une fois ce gouvernement fait tout à l'envers. Après avoir bêtement dépensé des milliards avec le quoi qu'il en coûte, ils essayent de rogner toutes les dépenses sociales, sauf les régimes les plus favorisés auxquels ils n'ont pas touché par m...

à écrit le 18/03/2024 à 9:03
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Quelle gratuité M. le Ministre? Après 7 ans de présence à votre poste vous ne savez toujours pas que les Français ont déjà tout payé par avance par: 1) leurs impôts 2) par les taxes qui frappent tous les produits qu'ils achètent?

à écrit le 18/03/2024 à 8:22
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La vache on a l'impression d'entendre Churchill ici ! C'est la fin c'est certain donc, ça y est nos politiciens n'ont plus rien à dire c'est officiel !

à écrit le 18/03/2024 à 7:13
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Les députés viennent de s augmenter de 700 euros par mois. Cqfd l open bar est toujours ouvert pour certaines

à écrit le 18/03/2024 à 4:05
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Le quoi qu'il en coute serait donc fini ?

à écrit le 17/03/2024 à 23:40
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Exact, d ailleurs c est ce que la gauche réclame dans tous les domaines ("gratuit", donc ça ne coûterait rien à personne). Aussi du côté de l Etat, à quand le retour des cartes d identité payantes?

à écrit le 17/03/2024 à 22:53
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Chiffres Statista 2022 : Dépenses sociales en France : 32,2 % du PIB (championne Européenne), Moyenne Européenne : 27 %. Nous dépensons 5,2% de plus par rapport à la richesse que nous produisons que la moyenne Européenne. Le PIB Français est égal à 2...

le 18/03/2024 à 15:59
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@Tototiti. En effet, les dépenses sociales en France se montent à 32.2 % du PIB alors que la moyenne Européenne est de 27 %. Et les données de l'OCDE et de la Dress relèvent également que depuis le début du siècle (2000), la part des dépenses sociale...

le 19/03/2024 à 14:30
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Les dépenses sociales sont plus élevées qu'ailleurs car tout concourt à mettre l'Etat sous pression la démographie, comme une déviance économique récurrente chez les pays latins...

le 19/03/2024 à 15:37
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@Raymond : l'assistanat pour les individus est sans doute peut-être mieux ciblé et moins coûteux que l'assistanat pour les entreprises qui prévalait avant, l'industrie vivant largement aux crochets de l'Etat pendant les 30 Glorieuses, d'où les dévalu...

à écrit le 17/03/2024 à 22:45
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Rappelez moi qui est concerné par l'assurance chômage ? Les fonctionnaires , à non ....

à écrit le 17/03/2024 à 18:40
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Après n’avoir jamais bénéficié du système de santé français, je dois actuellement y avoir recours : Je constate avec effacement la gabegie qui y règne ! Comme l’indiquait François Hollande, il est vrai que cela ne coûte rien, puisque c’est l’État qui...

à écrit le 17/03/2024 à 18:03
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alors plus de gratuitee dans les transports pour les ministres les senateurs etc cela ne va pas ramener les 10 millards mais au moins cela donne l'exemple ces mrs dames ce font trainer a l'oeil alors qui paye nous bien sur en plus pour des incapabl...

à écrit le 17/03/2024 à 16:58
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On est encore et toujours dans la défense du dogme du 'pas touche' à la fiscalité des plus riches pour défendre. Et advienne que pourra ! Aucune accélération des inégalités. Aucune inéquité dans la répartition des efforts selon les capaci...

à écrit le 17/03/2024 à 15:42
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apres HOLLANDE qui a dilapide les baisses de taux en cadeaux, lemaire a invente le ' quoi qu'il en coute aux allemands', puis vient la bouche en coeur expliquer que ca doit cesser.......he ben, quel pays.....on a les politiciens qu'on merite, cela di...

à écrit le 17/03/2024 à 15:38
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font ils déjà semblant d oublier la colère des agriculteurs qui demeure ? ou simple diversion jusque fin du mois de mars !

à écrit le 17/03/2024 à 14:52
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Le problème, c'est que le gouvernement français a envoyé un très mauvais signal avec son "quoi qu'il en coûte", les français sont maintenant complètement déresponsabilisés. Le crédit infini comme a voulu le faire croire la BCE était un mirage semblab...

le 17/03/2024 à 23:10
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Le quoi qu’il en coûte a été largement utilisé en Europe cher Monsieur.. l Allemagne et l Espagne par exemple sont passés de 49% et 54 % du tx d’ endettement en 2019 a 106 % et 98% en 2023 … bien plus que nous qui sommes passé de 97% à 113%…. Celu...

le 17/03/2024 à 23:10
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Le quoi qu’il en coûte a été largement utilisé en Europe cher Monsieur.. l Allemagne et l Espagne par exemple sont passés de 49% et 54 % du tx d’ endettement en 2019 a 106 % et 98% en 2023 … bien plus que nous qui sommes passé de 97% à 113%…. Celu...

à écrit le 17/03/2024 à 14:35
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S'en prendre aux plus pauvres sans jamais aller voir ce qui est fait de l'argent distribué à des structures supposées leur venir en aide...

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