
[Article publié lundi 20 novembre 2023 à 17h24 et mis à jour jeudi 23 novembre à 13h02]
Macron veut relancer la bataille de l'export. Le chef de l'Etat s'apprête à recevoir en grande pompe une délégation d'une centaine de petites et moyennes entreprises (PME) et d'entreprises de taille intermédiaire au palais de l'Elysée ce mardi 21 novembre. Les chefs d'entreprise seront accompagnés d'élus locaux et de représentants du patronat.
A cette occasion, Emmanuel Macron et la ministre de Bercy Olivia Grégoire doivent détailler un nouveau programme d'accompagnement des PME à l'étranger. Objectif : augmenter la part des PME à l'export et conquérir de nouveaux marchés à l'international. « Nos PME représentent 2% de la valeur des exportations alors que c'est 9% en Allemagne et 54% en Italie », explique l'entourage du chef de l'Etat.
La désindustrialisation criante en France et les délocalisations à marche forcée ont laissé des stigmates partout sur le territoire. La part de l'industrie dans le produit intérieur brut (PIB) a considérablement chuté durant les 50 dernières années. Et les récentes crises (pandémie, guerre en Ukraine) n'ont rien arrangé. Face à ce terrible constat, Emmanuel Macron a décidé de mettre l'accent sur les PME et la réindustrialisation tout au long de cette semaine. Pour rappel, la majorité présidentielle avait surtout déroulé le tapis rouge du palais de l'Elysée aux entreprises de taille intermédiaire (ETI) et aux mastodontes du CAC 40.
Un accompagnement inspiré du modèle de la French Tech
Le modèle d'accompagnement proposé doit s'inspirer du programme de la French tech. « On a eu une politique résolue pendant une dizaine d'années d'accompagnement des acteurs et en particulier des startups pour les transformer en des entreprises plus importantes qui ont grossi, qui ont levé des fonds », souligne l'Elysée.
Le chef de l'Etat veut faire de la « start-up nation », un levier pour renforcer l'accompagnement « d'un petit nombre d'acteurs sur lequel on va concentrer le meilleur des services de l'État, c'est-à-dire un guichet unique qui leur permet d'avoir un interlocuteur vers qui se tourner dès qu'elles ont des difficultés », poursuivent les conseillers d'Emmanuel Macron.
Pour muscler les ambitions des PME à l'international, la présidence promet d'inviter plus de PME dans les déplacements du chef de l'Etat à l'étranger. Jusqu'à maintenant, les grandes entreprises et les ETI étaient les principaux bénéficiaires de ces délégations. L'exécutif veut également donner un coup de pouce pour les PME qui veulent se rendre sur des salons à l'étranger. « Avec le plan Osez l'export, on a décidé d'augmenter la prise en charge des entreprises qui vont dans des salons jusqu'à 30 % de leur coût. On a l'objectif d'accompagner 5.000 entreprises sur ces pavillons ».
Un plan pour tenter de rétablir la balance commerciale
L'objectif de ce plan est également de contribuer à rétablir le déficit de la balance commerciale tricolore. Depuis deux décennies, la France a perdu d'importantes parts de marché à l'international. Et la multiplication des crises ces dernières années a plongé le commerce extérieur à des niveaux inédits. En 2022, dans le contexte de l'éclatement de la guerre en Ukraine et de la crise énergétique, « la balance commerciale de la France a enregistré sa plus mauvaise année depuis plus de 70 ans », expliquent les économistes de l'OFCE dans leur dernier ouvrage consacré à l'économie française en 2024.
En seulement une année, la balance s'est dégradée de 70 milliards d'euros en raison notamment de la flambée des prix de l'énergie. Résultat, le déficit enregistré par les douanes s'est établi à 134 milliards d'euros. Sur ce total, 110 milliards d'euros sont imputables à la facture énergétique (4% du PIB), soit un niveau comparable au choc pétrolier de 1973. Cette année, les prix de l'énergie ont reflué en Europe. Mais le conflit au Proche-Orient entre le Hamas et Israël a ravivé les craintes d'une nouvelle surchauffe sur les prix du pétrole. Ce contexte géopolitique particulièrement tendu ne risque pas de faciliter la tâche de l'exécutif.
Ce mardi, Emmanuel Macron a donné le coup d'envoi d'ETIncelles, un autre programme visant à multiplier les entreprises de taille intermédiaire (ETI) en France, en levant les « freins administratifs » contrariant la croissance des petites et moyennes entreprises (PME). L'initiative part du constat d'un retard de la France, qui ne compte que 5.600 ETI contre environ 10.000 en Allemagne. Or, ces entreprises, qui emploient entre 250 et 4.999 salariés ou réalisent un chiffre d'affaires d'au moins 50 millions d'euros, sont « une chance pour le pays et un véritable levier », a souligné le chef de l'Etat, car génératrices d'emplois, ancrées dans les territoires et souvent exportatrices. Le plan ETIncelles ambitionne de faire grandir en taille 500 PME présentant un fort potentiel de croissance d'ici à 2027, en leur proposant un accompagnement personnalisé et un interlocuteur unique pour lever les obstacles administratifs à leur croissance. Quelque 45 correspondants dans l'administration et les pouvoirs publics ont été mobilisés à cette fin.Un autre plan du gouvernement pour lever les « freins administratifs » des PME
Cet accompagnement personnalisé, prévu sur une période de 12 à 18 mois, a déjà bénéficié à 50 PME lors d'une phase pilote. Cinquante autres ont été sélectionnées. Selon l'Elysée, « le réservoir » de PME à fort potentiel est estimé en France à environ 20.000.
Les petites et moyennes entreprises françaises sont clairement absentes des échanges internationaux. Dans une étude inédite dévoilée à l'automne par le Centre d'études prospectives et d'informations internationales (CEPII), l'économiste Daniel Mirza a montré que 95% des exportations étaient réalisées par des grandes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire. Chez les principaux voisins de la France (Allemagne, Italie et Espagne), les PME occupent une place bien plus importante dans les exportations de biens. Dans son travail, l'économiste pointe « une dégradation de la compétitivité prix-qualité, dans les biens, mais une amélioration très forte dans les services ». La détérioration de la compétitivité ne serait pas liée à une forte différence de coût mais plutôt « à la rareté d'une main d'œuvre très spécifique ». Face à ces difficultés de recrutement, il encourage « fortement les formations professionnelles sur les métiers en tensions dans le secteur manufacturier ».Les grandes entreprises et les ETI représentent 95% des exportations