L'horizon économique s'assombrit en Europe. Entre le prolongement de la guerre en Ukraine, le conflit au Proche-Orient, la crise énergétique et les taux élevés des banques centrales, les économies traversent une période extrêmement agitée. L'Allemagne et l'Italie vont finir l'année 2023 en récession. Et les indicateurs avancés pour 2024 n'annoncent pas de rebond économique pour la zone euro.
En France, la croissance économique stagne sous l'effet de l'inflation et d'une consommation atone. Les catégories les plus modestes sont frappées de plein fouet par la hausse des prix de l'alimentaire et de l'énergie. Dans ce contexte morose, les entreprises rencontrent de plus en plus de difficultés pour se financer. Interrogés dans le cadre de la Grande consultation des entrepreneurs réalisée par OpinionWay pour CCI France, La Tribune et LCI, 54% des dirigeants affirment qu'il est moins facile d'emprunter auprès des banques au cours du mois d'octobre par rapport à la même période en 2022. A l'opposé, seuls 4% déclarent qu'il est plus facile d'emprunter. Enfin, 38% indiquent que les conditions n'ont pas changé.
Sans surprise, les effets du resserrement de la politique monétaire de la BCE se font ressentir sur les volumes de prêts accordés par les banques. L'annonce d'une pause dans la hausse des taux par la BCE il y a quelques jours devrait laisser un peu de répit. Mais compte tenu des délais de transmission des effets de la politique monétaire à l'économie réelle compris entre 12 et 18 mois, emprunter auprès des banques pourrait se transformer en calvaire pour les plus petites entreprises tricolores.
Des effets négatifs importants sur l'investissement...
Après plusieurs années « d'argent gratuit » favorisées par des taux négatifs, le changement de ton des banques risque de mettre un coup d'arrêt brutal aux projets d'investissements des entreprises. Dans le baromètre dévoilé ce 31 octobre, 64% des dirigeants interrogés affirment que les obstacles aux financements vont avoir des effets négatifs sur les projets d'investissement. Et 28% s'attendent même à des effets très importants. Derrière cette moyenne, il existe des disparités entre les secteurs.
L'industrie (70%) et le tertiaire marchand (68%) sont plus exposés que la construction (59%) et le commerce (60%). Etant donné le poids des services marchands dans l'économie française, l'effondrement de l'investissement dans ce secteur pourrait avoir des répercussions délétères sur des pans entiers de l'économie. Des écarts existent aussi entre les plus petites entreprises (64%) et les plus grandes (55%).
...et sur la trésorerie
Ces difficultés de financement vont également avoir des conséquences négatives sur la trésorerie des entreprises. Sur l'échantillon interrogé, 56% des entrepreneurs s'attendent à avoir des répercussions négatives sur le compte en banque de leur entreprise. A l'opposé, 43% n'anticipent aucun effet néfaste. Après avoir injecté des milliards d'euros dans l'économie pendant la pandémie, le gouvernement a décidé de fermer progressivement le robinet des aides. Dans la plupart des secteurs, les entreprises ont pu traverser les longues périodes de confinement sans devoir mettre la clé sous la porte.
Mais le retour des retards de paiement et la hausse récente des défaillances d'entreprises montrent que les tensions se multiplient dans les entreprises exposées aux chocs énergétiques et dépendantes des banques pour se financer. L'atonie de la demande plombée par l'inflation et la hausse des taux pourrait mettre en difficulté de nombreux secteurs déjà fragilisés par toutes ces crises.
Méthode : Étude réalisée auprès d'un échantillon de 1.002 dirigeants d'entreprises comptant au moins un salarié. L'échantillon a été interrogé par téléphone a été interrogé par téléphone du 10 au 19 octobre.