Qui va prendre les manettes de la stratégique Commission des finances à l'Assemblée nationale ? Traditionnellement, ce poste tactique revient au premier groupe d'opposition, selon la décision de Nicolas Sarkozy en 2007 et à laquelle aucun président n'a encore dérogé. Depuis cette date, les socialistes Didier Migaud et Jérôme Cahuzac se sont succédés, puis le député UMP puis LR du Val-de-Marne Gilles Carrez sous François Hollande. Plus récemment, durant la dernière législature, le député Eric Woerth (ex-LR), passé dans les rangs de la majorité, avait pris les commandes de cette instance alors que les Républicains avaient remporté 113 sièges.
Après la claque de dimanche soir pour la majorité présidentielle, Marine Le Pen a aussitôt réclamé que la présidence de la Commission des finances aux pouvoirs considérables revienne à un député du RN. Aux yeux de l'ex-adversaire d'Emmanuel Macron au second tour de la présidentielle, la Nupes - alliance issue d'un accord entre La France insoumise (LFI), le Parti socialiste (PS), le Parti communiste (PCF) et les écologistes (EELV) - est composée de quatre groupes parlementaires distincts, et ne peut donc pas prétendre en tant que telle à la présidence de cette commission parlementaire.
La Nupes déjà divisée
Sur l'antenne de BFM TV, la députée européenne de LFI Manon Aubry a balayé ces objections. « La Nupes est loin devant le Rassemblement national », a-t-elle souligné. « La Nupes est très claire, elle va avoir un candidat en commun, tous les élus de la Nupes vont voter pour ce candidat commun (...) et donc en principe le Rassemblement national mathématiquement ne peut pas obtenir cette présidence ». De son côté, Jean-Luc Mélenchon a appelé lundi à ce que la « Nouvelle union populaire écologique et sociale » constitue un seul et même groupe à l'Assemblée nationale. Ce qui permettrait à la confédération de gauches d'obtenir la présidence de cette commission.
Mais il semble qu'il n'ait pas été entendu. Les premières fractures sont, en effet, apparues dès le lendemain du résultat du deuxième tour avec le refus du Parti socialiste, d'EELV et du PCF à l'idée de former un groupe unique. « La gauche est plurielle, elle est représentée dans sa diversité à l'Assemblée Nationale. Vouloir supprimer cette diversité est une erreur, et je m'y oppose », a ainsi déclaré la députée socialiste Valérie Rabault, présidente sortante du groupe PS.
Le dernier scénario envisageable pour la majorité serait « qu'elle rompe avec la tradition qui veut que la présidence soit laissée au principal groupe d'opposition et fait en sorte que soit désigné le représentant d'un groupe d'opposition plus modéré (LR, PS, EELV,...), l'attribution formelle au "principal" groupe d'opposition n'étant pas stipulée par les textes », explique Erwan Lestrohan, directeur conseil chez Odoxa.