Pass sanitaire : pourquoi les salariés en CDI sont fragilisés par le nouveau projet de loi

Alors que la loi relative à la gestion de la crise sanitaire a été définitivement adoptée par le Parlement, un imbroglio se dessine autour de la possibilité de licencier ou non un salarié en CDI qui ne présenterait pas un pass sanitaire. La représentation nationale a supprimé cette disposition et pourtant, la ministre du Travail Elisabeth Borne a affirmé ce mardi que des licenciements seront tout de même envisageables. Dans un entretien accordé à La Tribune, Anne-Lise Castell-Barnel, juriste rédactrice en droit social aux éditions Tissot, décrypte les interprétations possibles du texte.
Élisabeth Borne, Ministre du Travail, de l'Emploi et de l'Insertion.
Élisabeth Borne, Ministre du Travail, de l'Emploi et de l'Insertion. (Crédits : CHARLES PLATIAU)

L'obligation du pass sanitaire à compter du 30 août, mesure phare de la loi votée dimanche, s'applique au personnel médical et paramédical, ainsi qu'aux salariés des secteurs au contact direct du public (bars, restaurants, musées, cinémas, théâtres, établissements sportifs...). A quelles procédures s'expose un salarié ne disposant pas d'un pass sanitaire? Quels sont les motifs de licenciement possibles pour l'employeur ? Pourquoi les salariés en CDD font-ils l'objet d'une législation différente de ceux en CDI ? Quels risques encourt un employeur qui ne suspendrait pas un salarié non-vacciné? Explications.

LA TRIBUNE - À quelles procédures légales s'expose un salarié en CDI concerné par le pass sanitaire obligatoire et qui ne serait pas en mesure d'en présenter un ?

ANNE-LISE CASTELL-BARNEL - Le motif de licenciement prédéfini avec délai de deux mois suivant la suspension du salarié a été retiré du projet de loi suite au passage devant le Sénat. Cela ne veut pas dire qu'un salarié en CDI ne peut pas être licencié : en revanche, le licenciement n'est plus directement encadré par la loi. Le salarié qui ne serait pas en mesure de présenter un pass sanitaire valide et ne pose pas de congés sera automatiquement suspendu. Si l'employeur en reste là, le salarié suspendu n'est plus rémunéré, mais reste comptabilisé dans les effectifs de l'entreprise, et peut retrouver son emploi et ses droits s'il obtient un pass sanitaire.

S'il le souhaite, l'employeur peut aller plus loin et décider d'entamer une procédure de licenciement au motif que l'absence du salarié pénalise l'entreprise. On peut en effet imaginer qu'il s'agit d'un motif de rupture envisageable, même s'il faut être prudent et pouvoir justifier d'une vraie perturbation dans l'entreprise et d'une nécessité de remplacement.

Suite aux derniers amendements, l'employeur peut ainsi licencier le salarié sans respecter le délai de deux mois après la suspension qui était prévu initialement. À titre d'exemple, un salarié sans pass sanitaire pourrait être licencié au bout d'un mois de suspension. Cette nouvelle version du projet de loi, amendée après le passage au Sénat, fragilise donc encore plus les salariés en CDI que la version précédente.

Existe-t-il d'autres motifs de licenciement qui pourraient être utilisés par un employeur pour licencier un salarié en CDI non-détenteur d'un pass sanitaire ?

Conformément à une jurisprudence de 2012, l'employeur pourrait aussi licencier un salarié pour « cause réelle et sérieuse ». En 2012, la Cour de cassation avait considéré que le licenciement d'un employé des pompes funèbres - secteur soumis à des obligations vaccinales - pour refus de se faire vacciner contre l'hépatite B, était légal et que le motif faisait office de « cause réelle et sérieuse ».

Aujourd'hui, un employeur d'un secteur concerné par le pass sanitaire obligatoire pourrait reprendre cette typologie et licencier ainsi un salarié pour « cause réelle et sérieuse ». Une chose est sûre: qu'il ait recours à ce motif ou à celui d'absence perturbant l'entreprise, l'employeur devra verser des indemnités de licenciement à son salarié, puisque ces motifs ne sont pas des fautes graves.

Le projet de loi est écrit différemment pour les salariés en CDI et ceux en CDD. Quelle est la logique sous-jacente et quelles sont les implications pratiques pour les actifs ?

Les deux causes de licenciement citées précédemment ne s'appliquent pas pour les CDD (un CDD ne peut pas être licencié). Dans le cas d'un CDI, la procédure de licenciement peut être prise à la seule initiative de l'employeur pour cause réelle et sérieuse ou absence pénalisante pour l'entreprise. Dans le cas d'un CDD, ces deux causes ne peuvent pas être citées et la rupture anticipée aurait été compliquée si la loi n'avait rien prévu. En effet, l'employeur ne peut rompre le CDD de façon anticipée que dans des cas très limités comme la faute grave ou la force majeure. C'est sans doute pour cette raison que le projet de loi a été rédigé différemment pour les CDD et CDI.

Conséquence ? Les employeurs peuvent désormais procéder à une rupture anticipée pour les salariés en CDD n'ayant pas de pass sanitaire. Dans ce cas de figure, le salarié qui saisirait les prud'hommes aurait peu de chances de gagner face à son employeur. À l'inverse, pour les salariés en CDI, les prud'hommes aviseront au cas par cas, au regard de certains éléments complémentaires. Il s'agira par exemple de savoir si les salariés pouvaient être reclassés au sein de l'entreprise et si le licenciement était vraiment nécessaire et justifié.

Pour les secteurs concernés par la vaccination obligatoire, à quelles sanctions s'expose un employeur qui laisserait un salarié non-vacciné se rendre sur son lieu de travail ?

L'employeur est tenu de s'assurer que les salariés seront vaccinés. (Même si dans les faits, le contrôle n'est pas effectué par l'employeur, mais par la médecine du Travail, étant donné qu'un contrôle des données médicales par l'employeur irait à l'encontre du Code du travail, la responsabilité du contrôle relève bien de l'employeur, ndlr).

S'il ne le fait pas, l'employeur s'expose à une amende de 1500€ ; s'il récidive et commet trois infractions dans le même mois, la sanction passe à 9000€ d'amende et un an d'emprisonnement. Dans le projet de loi initial, la peine encourue était encore plus lourde, mais le Conseil d'Etat l'a retoquée.

Lire aussi "Avec la suspension des salaires et la rupture des CDD pour les non-vaccinés, le gouvernement met la pression sur les salariés" (Patrick Martin, Medef)

Commentaires 21
à écrit le 30/07/2021 à 17:47
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Cette bonne femme Borne dépasse les bornes, elle s'octroie des pouvoirs

à écrit le 28/07/2021 à 23:18
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J espère que se sera marine le Pen qui passera aux élections présidentielle

le 29/07/2021 à 8:54
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Non et si besoin elle nous refera la folasse même, elle est bien trop compromise avec les banques, du moins son parti et cela devait dater de son père qui aime d'abord et avant tout l'argent ceux qui le prennent pour des héros sont des idiots, ce ser...

à écrit le 28/07/2021 à 17:00
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Madame la ministre est vaccinée, ce qui se traduit par un très net amoindrissement de ses facultés intellectuelles, le vaccin lui a fait perdre toute raison, elle est maintenant dépourvue de discernement.

à écrit le 28/07/2021 à 16:02
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Bref un CDI n'est plus une garanti pour un emprunt, pour une location, pour se porter caution, pour un découvert bancaire, pour vivre sereinement....c'est continuer a vivre sous état d'urgence!

à écrit le 28/07/2021 à 14:56
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Que se passe t il si un salarié obligé à la vaccination meurt après la première ou deuxième vaccination , car la loi porte par Guillaume Cha LREm , prévoit de licencier en cas de non présentation d’un pass sanitaire et de ne pas payer les indemnisati...

le 28/07/2021 à 16:37
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"Que se passe t il si un salarié obligé à la vaccination meurt après la première ou deuxième vaccination" Rien ,puisque les gouvernements et les labos se sont protégés dès le début de tous les risques potentiels de ce vaccin.

à écrit le 28/07/2021 à 14:01
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On patauge ,pas de vision sur le futur ,on gagné du temps avec le tous vaccinés et après ? Les variants qui fleurissent ,les vaccins deviennent moins efficaces ,on va ou ? Il aurait fallu construire plus de lits ,et laisser la population s'auto immu...

à écrit le 28/07/2021 à 12:48
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Ce n'était pas ce qui était prévu lors du vote par les assemblées. On se demande si le parlement n'est pas que fantoche ? C'est grave. Quelle est la prochaine étape ?

le 28/07/2021 à 21:57
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Les bulletin sans Macron a la présidentielle 2022 seront interdits par la loi...

à écrit le 28/07/2021 à 11:40
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Vaccvariant est en marche pour devenir un "générique" très tendance, traduction, les vaccins créent les variant ... résistants !

à écrit le 28/07/2021 à 10:32
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La gestion Covid c' est du bla bla, le test PCR qui est à l' origine des cas Covid est débouté par les américains hier, fini, terminé .. Ici, rappelle des mots des médias subventionnés, en particulier, RAPPEL BFMTV du 19 jui...

à écrit le 28/07/2021 à 9:57
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Un jour sans fin : Les Américains vaccinés doivent à nouveau porter le masque en intérieur dans les zones à haut risque, ont annoncé les autorités sanitaires du pays (CDC) mardi. « Dans les zones où la transmission (du Covid-19) est importante, le...

à écrit le 28/07/2021 à 9:52
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dans la plus grande duplicité et cacophonie les résultats ne sont pas au rendez vous

à écrit le 28/07/2021 à 9:09
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Parce que c'était le but, ils ont des objectifs simplistes nos néolibéraux comme l'idéologie décadente qu'ils prônent et servent.

à écrit le 28/07/2021 à 8:46
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Le seul espoir est que les LR et LREM ne soient plus du tout élus à l’avenir, la seule chance en France pour une démocratie normale.

à écrit le 28/07/2021 à 6:03
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Cette femme transpire la trahison et le mepris de classe.

le 28/07/2021 à 8:53
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Élisabeth Borne, l'ex -ministre des Transports touchait déjà 323.457 euros net par an (27.000€ par mois) en tant que PDG de la RATP en 2016.

à écrit le 27/07/2021 à 23:22
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Le pass a été abandonné au bout de 3 semaines à Moscou. La raison : plus personne dans les lieux contrôlés. On sait ce qui nous reste à faire ....

le 28/07/2021 à 9:15
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Exactement, les clients ont le pouvoir, ne l'oublions pas. Boycottons tous les endroits qui nécessite un pass sanitaire !

à écrit le 27/07/2021 à 22:39
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Maitre Carlo Brusa de Réaction 19 émet deux notes juridiques précises sur ce même site. Adhérez à Réaction 19 pour en bénéficier. L' une traite de l' absence de fondement juridique pour arguer d' une d' obligation vaccinale, l' autre de comment réagi...

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