« Le Hamas mène une guerre psychologique » (Gershon Baskin, ancien négociateur)

ENTRETIEN - Le négociateur israélien d'origine américaine analyse la libération des otages et esquisse les différents scénarios concernant l'évolution de la guerre.
Gershon Baskin analyse le processus en cours sur la libération des otages et esquisse les différents scénarios sur l'évolution de la guerre.
Gershon Baskin analyse le processus en cours sur la libération des otages et esquisse les différents scénarios sur l'évolution de la guerre. (Crédits : © Tamir Kalifa/NYT/Rea)

Jusqu'à récemment, ce négociateur israélien d'origine américaine, qui a joué un rôle clé dans la libération du soldat israélien Gilad Shalit, avait des contacts directs avec des responsables du Hamas. Analysant le processus en cours sur la libération des otages, il esquisse les différents scénarios sur l'évolution de la guerre.

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LA TRIBUNE DIMANCHE- Quel regard portez-vous sur l'accord d'échange otages contre prisonniers sur fond de trêve ?

GERSHON BASKIN- C'est dans l'intérêt d'Israël et du Hamas d'aller jusqu'au bout de ce premier accord, permettant le retour de 50 otages israéliens et la libération de 150 prisonniers palestiniens, voire plus si le processus se poursuit sans catastrophe majeure durant encore cinq ou six jours. On peut déplorer que le Hamas n'accepte toujours pas que la Croix-Rouge puisse rendre visite aux otages. Elle n'a pas le pouvoir de forcer le Hamas à le faire puisque l'organisation islamiste n'est pas un État et n'a donc pas ratifié de convention ni d'accord allant dans ce sens. Par ailleurs, il faut s'attendre à ce que le Hamas mène une guerre psychologique. Ses dirigeants vont diffuser plus de vidéos, propager des rumeurs pour convaincre l'opinion qu'Israël ne met pas en œuvre sa partie du « deal », via leur compte Telegram, etc. Une stratégie qui va fonctionner d'autant que les leaders du Hamas en exil ne sont pas menacés d'élimination par le Mossad durant la durée de l'accord, même si leurs jours sont comptés.

Peut-on s'attendre à un nouvel accord après cette première étape ?

Il est peu probable qu'il y ait un accord majeur pour la libération des soldats israéliens, hommes et femmes, en l'échange de tous les prisonniers palestiniens détenus en Israël, comme l'exigera le Hamas. Arrivé à ce point de négociations, il y aura sans doute un blocage. Quand la guerre reprendra, Israël s'appuiera sur ses opérations militaires pour rechercher et tenter de sauver les autres otages.

Israël aura-t-il les mains libres pour poursuivre son opération militaire ?

Je pense que les États-Unis donneront une totale marge de manœuvre à l'État hébreu pour poursuivre son opération militaire dans la bande de Gaza à condition qu'il autorise l'aide humanitaire, et que ses bombardements fassent moins de victimes civiles comme cela a été le cas dans la première partie de cette guerre. Les Israéliens doivent s'engager sur ce point.

Le Hamas est devenu populaire en Cisjordanie ; pourquoi ?

En réalité, ce fort soutien au Hamas, en particulier en Cisjordanie, constaté par des sondages effectués en temps de guerre, compte moins que l'opinion qu'auront les Palestiniens quand ils vont saisir ce qui s'est réellement passé à Gaza. Ils commenceront à blâmer le Hamas, qui ne sera plus au pouvoir, et évoqueront plutôt la nécessité d'organiser des élections, de faire élire des leaders comme Marwan Barghouti, toujours en prison, et de redonner une légitimité à l'Autorité palestinienne en la réorganisant, avec l'aide de la communauté internationale, dont la France et d'autres pays reconnaissant l'État palestinien. Mais il faudra des années voire des générations avant que la société israélienne, les habitants de la bande de Gaza et les Palestiniens en général se remettent du traumatisme créé par l'extrême violence de cette crise. En attendant, nous avons besoin d'engager dès aujourd'hui un authentique processus de paix qui mette fin à l'occupation israélienne, permette de créer un État palestinien et d'établir des ponts entre les sociétés israélienne et palestinienne. Il va falloir reconstruire Gaza grâce au soutien international, relancer l'économie palestinienne, et s'appuyer sur un nouveau gouvernement en Israël et en Palestine. Ce seront les premiers pas.

Commentaires 2
à écrit le 27/11/2023 à 9:08
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Il est évident que le HAMAS a gagné cette guerre psychologique et médiatique

à écrit le 26/11/2023 à 10:53
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Pour ma part je ne vois pas de guerre, seulement un massacre qui succède à un autre.

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