« La force des ETI, c'est le secret de la force d’un pays » Patrick Ibry, Banque Palatine

Elles sont ces entreprises de taille intermédiaire dont on vante tant les qualités et dont on déplore le manque en France. Ni grand groupe, plus du tout PME, les ETI sont considérées comme le signe de bonne santé économique d’un pays. Résilientes, agiles, discrètes, innovantes souvent, elles sont chéries par les acteurs économiques. Pour autant, elles font aussi face à des défis, de besoins en compétences notamment, comme l’explique le directeur général délégué de l’établissement bancaire, spécialiste des entreprises de taille intermédiaire au sein du groupe BPCE.
Patrick Ibry, directeur général délégué de la Banque Palatine, un établissement bancaire fondé en 1780, spécialiste des entreprises de taille intermédiaire, filiale à 100% du groupe BPCE.
Patrick Ibry, directeur général délégué de la Banque Palatine, un établissement bancaire fondé en 1780, spécialiste des entreprises de taille intermédiaire, filiale à 100% du groupe BPCE. (Crédits : Arnaud Février)

Elles sont 5.400 en France et représentent une sorte d'eldorado pour qui veut faire grandir sa startup ou sa PME: les entreprises de taille intermédiaire (ETI)* sont, pour de nombreux acteurs économiques, le maillon fort de l'économie. Il faut dire qu'on leur prête toutes les qualités : l'agilité, qui fait souvent défaut aux grands groupes, la résilience, qui est moins aisée pour les PME, la capacité à innover, à être locomotive, à tirer un secteur, à embaucher, à s'exporter... et tout cela discrètement, le plus souvent.

Les ETI, Patrick Ibry les connaît bien. Elles sont son quotidien, la Palatine se revendiquant comme la banque de ces entreprises de taille intermédiaire. Des ETI qui - comme l'a confirmé le baromètre publié en septembre dernier avec le METI (Mouvement des ETI, Ndlr), poursuivent leur croissance et continuent, pour 62,5% d'entre elles, d'afficher un chiffre d'affaires en amélioration si on le compare au premier semestre 2019. Des ETI confiantes, à 85%, dans l'avenir de leur entreprise pour les six prochains mois, avec, pour la majorité d'entre elles, une trésorerie qui se porte bien. Mais des entreprises de taille intermédiaire qui subissent aussi les impacts de la hausse des prix des matières premières et n'échappent pas aux difficultés de recrutement.

Les ETI, championnes de demain

« La force des ETI, c'est le secret de la force d'un pays, dit Patrick Ibry. Plus le tissu des ETI est fort, plus la croissance est forte. »

Des ETI qu'il faut cajoler, à qui il faut donner les moyens de concrétiser leurs projets de croissance. « C'est comme détecter un athlète de haut niveau », dit le directeur général délégué de la Banque Palatine, empruntant la métaphore sportive qui va bien au groupe BPCE, partenaire officiel par ailleurs des JO 2024.

Un athlète à qui il faut fournir les moyens et l'écosystème pour se développer, « pour faire réussir les champions de demain ».

Car si elles sont solides et confiantes, si elles ont des perspectives de projets et de croissance, les ETI ne sont pas imperméables à tout et doivent aussi affronter des défis quotidiens ou inattendus. « 60 à 70 ETI disparaissent tous les ans », précise Patrick Ibry. La crise ne les a pas épargnées pour autant et le Covid-19 a aussi eu raison de certaines d'entre elles. Et, bien sûr, celles qui ont résisté ressortent de la tempête encore plus fortes. Le PGE, de ce point de vue-là, a pleinement joué son rôle de soutien en période difficile, « le remboursement étant la zone naturelle de la culture du risque », rappelle Patrick Ibry : « Seules 4% à 5% sont sous mandat ou en difficulté. Nous sommes donc bien dans les critères de Bercy. »

La crise offre-t-elle aussi des opportunités? Les fusions-acquisitions, qui ont connu une forte activité, bénéficient-elles aussi aux ETI? Non, répond clairement Patrick Ibry:

« Il y a peu eu de changement capitalistique pendant la crise. Les ETI sont accrochées à une aventure, une histoire... Les ETI familiales sont regardées avec un intérêt particulier. Elles présentent souvent de meilleures performances, car c'est leur argent qu'elles gèrent et dépensent. »

ESG : de nombreux défis à relever

En revanche, les défis ne manquent pas. Celui de la formation en est un, et il recouvre bien des enjeux. Notamment parce que les ETI évoluent souvent dans des secteurs pointus, où le sujet de la compétence idoine est majeur, ne serait-ce que pour des questions de compétitivité.

La mixité est un autre enjeu, en ce qu'elle offre davantage d'efficacité et d'efficience.

« La mixité et les critères ESG sont les valeurs qui définissent les entreprises gagnantes de demain. La présence des femmes au sein du board change tout. Le comportemental et la confrontation homme/femme n'apporte que du positif », dit celui qui préfère être « détecteur de talents », plutôt que de se conformer à des étiquettes.

Quant à la notion d'impact, évidemment que la prise en compte de critères ESG est plus que jamais d'actualité.

« Tous les crédits vont désormais considérer ces critères. La banque est le secteur prioritaire dans la capacité à prendre en compte les critères ESG. Si demain, nous décidons de ne plus prêter aux pollueurs, la régulation se fera d'elle-même. »

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Ces ajustements nécessaires pour davantage d'ETI tricolores

Que manque-t-il alors à la France pour augmenter le nombre de ces ETI dont elle déplore tant le manque, quand l'Allemagne en compte plus du double ?(**)

« L'organisation du système bancaire allemand rend le soutien aux ETI plus facile. Les banques qui existent au niveau régional sont très investies dans les ETI sans demander de rémunération. Le banquier y est omniprésent mais il n'intervient pas. Quelques ajustements organisationnels sur notre système bancaire nous donneraient cette performance. Il existe une vraie notion de patriotisme économique », explique Patrick Ibry.

Sport, parité et plafond de verre

Cette notion de performance, la Banque Palatine la retrouve logiquement dans le monde du sport, une filière qu'elle soutient - pas uniquement à l'occasion des JO 2024 dont le groupe BPCE est sponsor officiel - mais en étant également aux côtés d'autres acteurs, dont la Fondation Alice Milliat, du nom de cette athlète et pionnière méconnue du sport féminin qui s'est battue pour obtenir (en 1928) la participation des femmes aux Jeux olympiques.

« La mise en lumière de sportives est un axe majoritaire » des partenariats, précise Patrick Ibry, au point de faire figurer la femme sportive sur cinq nouvelles cartes bancaires en 100% PVC recyclé. Et parce que les similitudes entre femmes dirigeantes d'ETI et sportives sont évidentes, l'établissement bancaire organise du mentorat qui doit permettre aux premières d'évangéliser les secondes au monde entreprenarial. Parce qu'existe aussi la notion de reconversion après, et que le plafond de verre reste toujours à briser. Un autre sport...

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NOTES

(*) Définition: une entreprise de taille intermédiaire (ETI) est une entreprise qui compte entre 250 et 4 999 salariés, et qui réalise 1) soit un chiffre d'affaires n'excédant pas 1,5 milliard d'euros, 2) soit un total de bilan n'excédant pas 2 milliards d'euros. Cependant, une entreprise qui a moins de 250 salariés, mais qui réalise 1) plus de 50 millions d'euros de chiffre d'affaires et 2) plus de 43 millions d'euros de total de bilan est aussi considérée comme une ETI. Les ETI constituent une catégorie d'entreprises intermédiaire entre les petites et moyennes entreprises (PME) et les grandes entreprises. (Source: Insee)

(**) Selon l'Institut Montaigne, si aujourd'hui l'Allemagne a plus du double d'ETI que la France, en 1981, les deux pays en comptaient le même nombre.

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Commentaire 1
à écrit le 15/12/2021 à 15:09
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Un secret aussi connu de tous... encore une phrase à la %µ% !

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