Paris se voit en "capitale mondiale de la finance verte"

Une nouvelle marque Finance For Tomorrow vient porter les ambitions de la place, qui rassemble les plus gros émetteurs au monde d'obligations vertes. Le Luxembourg demeure leader pour la cotation de ces "green bonds".
Delphine Cuny
Grâce à son méga green bond souverain de 7 milliards d'euros, la France apparaît en tête du classement des pays émetteurs d'obligations durables, sociales et responsables au 1er juin 2017.

Surfant sur l'initiative et le slogan d'Emmanuel Macron #MakeOurPlanetGreatAgain lancés au soir de l'annonce par Donald Trump du retrait des États-Unis de l'Accord de Paris sur le climat, les acteurs de la place financière française se mobilisent pour accélérer la dynamique afin que Paris devienne « la capitale mondiale de la finance verte et durable » a expliqué Gérard Mestrallet, le président de Paris Europlace, lors d'une conférence de presse ce mercredi au Palais Brongniart. Entre la sortie de Trump et le Brexit, la communauté financière parisienne sait qu'elle dispose d'une fenêtre d'opportunité.

Le président de la République lui-même estimerait que « la place financière de Paris est en train de se doter d'une stratégie et de règles du jeu susceptibles de la transformer en leader international de la finance verte » selon une citation lue par Gérard Mestrallet.

Si Emmanuel Macron n'a pas pu faire le déplacement, Ségolène Royal, l'ex-ministre de l'Environnement et présidente de la Cop21, est venue soutenir cette initiative baptisée "Finance For Tomorrow", une nouvelle marque remplaçant "Green & Sustainable Finance", destinée à promouvoir la place de Paris au plan international. Le tout avec un nouveau logo (un arbre sous un arc de triomphe) et des cris de ralliement en anglais pour les investisseurs du monde entier notamment #TheSustainableFutureBeginsInParis (l'avenir durable commence à Paris, clin d'œil à la COP) et #ShiftTheTrillions - basculer les milliers de milliards, autrement dit rediriger massivement les flux de capitaux.

« Le basculement du monde de la finance et des affaires a été déterminant dans le succès de la COP21 » a observé Ségolène Royal. « Et le monde des affaires et de la finance a été le premier, avec les villes, à réagir à l'annonce du retrait du président des États-Unis pour de l'Accord de Paris. Dans la finance verte, il faut que Paris et la France soient les locomotives » a souligné l'ancienne ministre.

Ségolène Royal Gérard Mestrallet Philippe Zaouati

[Ségolène Royal, Gérard Mestrallet, Philippe Zaouati. Crédits : DR]

Pionnier et plus gros emprunt souverain

Gérard Mestrallet a fait valoir que « la place de Paris a été pionnière en matière d'investissement responsable et de finance durable », l'organisation du premier Climate Finance Day en mai 2015 avec la Caisse des Dépôts et la Banque européenne d'investissement « a marqué un tournant » : grandes banques et compagnies d'assurance, grands investisseurs institutionnels ont pris des engagements sur l'accélération d'émissions de « green bonds » et la « décarbonisation » des portefeuilles. Résultat :

« La France est en pointe sur les green bonds. Au premier semestre 2017, la France est au premier rang, devant la Chine, le Brésil et les États-Unis en termes d'émissions » s'est-il félicité.

Une performance due à la méga obligation verte de 7 milliards d'euros de l'État français, « le plus grand emprunt vert souverain jamais réalisé » en janvier dernier, et au fait que les chiffres cumulés au 1er juin, venant de l'agence Bloomberg, comprennent également les obligations « sociales » et « durables ». Dans les « green bonds » stricto sensu, la France est deuxième derrière le mastodonte chinois, qui a émis à lui seul 36 milliards de dollars d'obligations vertes en 2016, soit 38% du total, et numéro un en Europe.

Et le président de l'ex-GDF-Suez a souligné au passage que :

« Engie a émis le plus important green bond corporate au monde, de 2,5 milliards d'euros en 2014, puis un deuxième cette année de 1,5 milliard. »

Le marché des green bonds a explosé l'an dernier, atteignant 81 milliards de dollars, fin 2016. Cette année, on dépasse les 49 milliards d'après Climate Bonds Initiative.

La Bourse de Paris derrière Luxembourg

Le président de Finance For Tomorrow, Philippe Zaouati, par ailleurs directeur général de Mirova, la filiale d'investissement responsable et solidaire de Natixis Asset Management, espère capitaliser sur les atouts de la place pour la faire rayonner .

« Paris est leader dans tous les domaines, 24% des émetteurs sont des entreprises françaises, un quart des émissions sont arrangées par des banques françaises, 27% des green bonds sont achetés par des investisseurs français » a-t-il avancé.

Green bonds souscripteurs

[Trois banques françaises en haut du podium des souscripteurs d'obligations vertes au premier trimestre 2017. Crédits : Climate Bonds]

Effectivement, les banques françaises trustent le podium des souscripteurs de green bonds au premier trimestre. Là aussi, l'émission de l'OAT verte de l'État français surpondère un peu ponctuellement les Français.

Interrogé, Philippe Zaouati a reconnu qu'il manquait une médaille au tableau d'honneur : la Bourse de Luxembourg reste la première place de cotation des green bonds (plus de 125 cotés), devant Paris, grâce notamment aux émissions de la BEI. Mais ce n'est pas une fatalité, a réagi Gérard Mestrallet :

« Nous avons réussi à rapatrier 80% des émissions corporate [obligations d'entreprises] à Paris. Euronext [l'opérateur de la Bourse de Paris, ndlr], qui fait évidemment partie des membres de l'initiative, mène une réflexion avancée sur ce point. »

L'opérateur de la Bourse de Paris, mais aussi d'Amsterdam, de Bruxelles et de Lisbonne indique que « 19,5 milliards d'obligations vertes ont été émises sur les marchés d'Euronext. »

Parmi les chantiers prioritaires de l'initiative, qui compte 36 membres (de la Banque de France à la Mairie de Paris, en passant par EDF et SNCF Réseau, BNP Paribas et Amundi), l'un porte d'ailleurs sur l'établissement d'un benchmark des places financières vertes, piloté par l'institut de recherche sur le climat I4CE (Caisse des Dépôts et Agence française de développement), qui sera publié en septembre, avant la Cop23.

La place de Paris veut aussi « accueillir les grands événements internationaux de la finance verte : après les deux premières éditions à Londres, la tenue à Paris ce jour de la troisième conférence annuelle des Green Bonds Principles est symbolique » a relevé Gérard Mestrallet. Les Green Bonds Principles sont une ébauche de standardisation de la sélection de projets pour les obligations environnementales: ces principes, rédigés en janvier 2014 par quatre grandes banques d'investissement, dont Crédit Agricole CIB, sont soutenus aujourd'hui par plus de 80 émetteurs, banques et investisseurs.

Delphine Cuny

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Commentaires 5
à écrit le 21/06/2017 à 17:26
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Dans 50 ans la température n'aura pas augmentée, et ils diront " vous voyez c'est grâce à la fiscalité verte " une belle arnaque.

à écrit le 15/06/2017 à 12:58
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Ce qui serait bien, c'est que les comptes de l'état passent au vert et que les impôts baissent.

à écrit le 15/06/2017 à 8:40
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Merci pour cet article, c'est fou tout ce qu'un article objectif peut nous apprendre et c'est certainement pour cela que les bons journalistes rament aussi souvent, un actionnaire ne veut pas lire la vérité il veut lire sa vérité. "Le Luxembourg ...

à écrit le 15/06/2017 à 7:49
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Bon si Ségolène est impliquée alors ça va cartonner! Plus la COP21! Si cela est rentable alors d'autres pays plus importants s'en mèleront et nous serons distancés en un rien de temps

à écrit le 15/06/2017 à 4:14
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Encore une bulle qui va éclater et ne pas arranger nos affaires. Le vert est la plus grande arnaque du 21ème siècle, et représente bien la naïveté française !

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