La startup Pixee Medical veut étendre son modèle de lunettes augmentées pour les chirurgiens

Et si les chirurgiens devenaient des super-héros avec des capacités de vision augmentée ? La startup Pixee Medical, créée en 2017, basée à Besançon, a développé un système de navigation, comme un GPS, pour guider les chirurgiens en temps réel. Après l’Australie, elle s’apprête à partir à la conquête des Etats-Unis à l'aide d'un modèle économique basé sur l'usage.
(Crédits : Pixee medical)

« C'est le début d'une révolution numérique au bloc opératoire ! ». Sébastien Henry, président-fondateur de Pixee Medical en est convaincu. Pour lui, dans 5 à 10 ans, tous les chirurgiens auront des lunettes en réalité augmentée. Un véritable outil d'assistance qui permet de voir à travers la peau. « Sans assistance informatique, c'est 25% des prothèses de genou qui sont en dehors de l'intervalle de 3 degrés, qui est la norme pour qu'une prothèse soit bien posée », souligne l'entrepreneur. Aussi, depuis une dizaine d'années, certaines opérations peuvent être réalisées avec l'aide d'un robot chirurgical orthopédique, d'une valeur d'environ 1,5 million d'euros. « Notre solution de lunettes en réalité augmentée a un coût initial de 15.000 euros, avec les mêmes résultats cliniques », compare Sébastien Henry. Un point fort qui explique en partie la croissance exponentielle de la startup - qui est passée de 85.000 euros de chiffre d'affaires en 2020 à près de 2 millions d'euros en 2021 - et qui compte désormais 40 salariés.

Un marché tourné vers l'export

De même qu'Orange vendait ses abonnements en subventionnant un Iphone, ils sont une vingtaine de distributeurs de prothèses de genou, via leurs commerciaux, à vendre le système Pixee Medical. « Ce qui nous a permis de vendre dans le monde entier à moindre frais », confie Sébastien Henry. En 2020, Pixee Medical réalise une première mondiale, avec une chirurgie du genou, en réalité augmentée, à Paris. Deux ans plus tard, plus de 150 systèmes ont été vendus partout en Europe, et en particulier en Australie, un marché important. La startup a pénétré le marché américain depuis septembre dernier, après l'obtention de l'agrément de la FDA (Food and Drug Administration), qui l'autorise à commercialiser sa solution de guidage de chirurgie du genou. Un marché qui représente la moitié du marché mondial.

Selon, l'Agence nationale des médicaments, en France, chaque année, plus de 100.000 prothèses de genou et 140.000 prothèses de hanche sont posées. L'orthopédie est un marché qui ne connait pas la crise. Il est estimé à 50 milliards de dollars de chiffre d'affaires annuel. « C'est un marché important, dominé par les Américains », confie Sébastien Henry. « Les Etats-Unis représentent 800.000 poses de prothèses de genou par an », poursuit-il.

Une innovation ludique mais aussi scientifique

Afin de diminuer les coûts, Pixee Medical utilise la technologie des lunettes en réalité mixte destinées au grand public, développée par exemple, par Microsoft HoloLens. « Ce sont ensuite nos ingénieurs qui développent les logiciels qui tournent dans les lunettes et repèrent l'environnement des instruments médicaux », explique le chef d'entreprise. Pour que le système de navigation fonctionne, les ingénieurs ont créé des petits QR codes qui sont positionnés sur les instruments chirurgicaux. « Ces QR codes nous donnent ainsi des repères en 3 dimensions, comme les satellites pour les GPS », précise-t-il. Une solution ultraprécise, facile d'utilisation, et adaptée à la chirurgie ambulatoire, proposée dans un pack léger contenant le logiciel et les lunettes. Même si le robot reste encore très présent sur le marché, Pixee Medical se revendique comme la seule plateforme capable de proposer une solution qui s'adapte à tous les types de prothèses, contrairement à ses concurrents suisse Medacta et Américain Insight Medical qui ont des solutions moins innovantes et dédiées à un seul modèle d'implant. « Ce que voit le chirurgien en réalité augmentée, nous pouvons le voir à l'écran ou à distance. Nous pouvons lui parler s'il est perdu sur l'application. Il peut nous entendre dans les lunettes », explique Sébastien Henry. C'est ainsi que l'entreprise a formé à distance des chirurgiens australiens en 2020, durant le confinement, via des outils tels que Teams ou Zoom.

« Un chirurgien augmenté »

« Avant de couper l'os, le chirurgien peut le couper virtuellement et faire des simulations. Cela l'aide à mieux préparer sa chirurgie et à être plus précis dans ses gestes. Il peut ainsi réaliser des petites incisions et éviter les grandes cicatrices », précise l'entrepreneur. « Nous cherchons à faire du praticien un chirurgien augmenté », poursuit-il. Grâce à « ses supers pouvoirs », le chirurgien peut désormais voir à travers la peau. Ce qu'il ne pouvait pas faire avant, sans ouvrir le patient. Cela permet donc de protéger aussi les muscles et les tissus.

La navigation assistée contribue ainsi à améliorer les conditions du patient : des cicatrices plus petites, moins de douleurs, et des temps d'hospitalisation beaucoup plus courts. « Certains peuvent même passer en ambulatoire, entrer le matin et ressortir l'après-midi avec une prothèse posée », s'enthousiasme Sébastien Henry. Sans compter la réduction des coûts pour le système de santé, avance la startup.

Le docteur Kassab opère avec des lunettes augmentées

Un jeton = une chirurgie

Pixee Medical a créé un nouveau modèle économique : le paiement à l'utilisation. En clair, les chirurgiens ne payent que lorsqu'ils utilisent les lunettes. Le prix varie en fonction du marché. Par exemple, pour une opération aux Etats-Unis, le chirurgien paye 450 euros alors qu'en Europe, le prix est plutôt de 300 euros. « Il y a un compteur dans les lunettes. Le chirurgien achète un certain nombre de jetons sous forme de QR code, qu'il doit placer devant la caméra des lunettes et automatiquement, elles se rechargent », explique Sébastien Henry. Un jeton vaut une chirurgie. « C'est un nouveau mode d'usage. Le chirurgien n'achète pas un logiciel, mais un usage », poursuit-il.

Les ingénieurs de la startup, experts en capteurs, planchent déjà sur une nouvelle version de cette solution dès 2023, avec plus de connectivités, pour la chirurgie de l'épaule, avant une autre pour la hanche. Reste à s'assurer que le système ne puisse pas subir de cyberattaques...

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