Bois, énergie mécanique du vent et de l'eau, chaleur de la Terre... Le point sur les renouvelables.

De quoi parle-t-on concrètement lorsque l’on évoque les énergies renouvelables ? Qu’elles sont-elles réellement ? Décryptage. (Cet article est issu de T La Revue n°13 - "Energies, la France qui innove" actuellement en kiosque).
(Crédits : Istock)

Combustion du bois, traction animale, énergie mécanique du vent et de l'eau, chaleur de la Terre... L'utilisation des énergies renouvelables (EnR) remonte aux origines de l'humanité. Éclipsées par les très performantes énergies fossiles à partir de la fin du XVIIIe siècle, les EnR font l'objet depuis le premier choc pétrolier d'un regain d'intérêt, devenu vif ces dernières années du fait de la crise climatique. Non seulement ces énergies « douces » proviennent de sources naturelles qui se renouvellent à un rythme supérieur à celui de leur consommation, mais en plus elles ont un avantage majeur : en phase d'exploitation, elles n'émettent pas (ou peu) de gaz à effet de serre. Malgré des montants records investis dans leur développement ces dernières années, et un essor inédit, leur part dans le mix énergétique mondial (environ 12,6 % en 2020, contre 8,7 % en 2009*) reste largement insuffisante pour lutter contre le réchauffement de la planète**. La faute, en partie, à la persistance de mésinformation et d'idées reçues à leur sujet. Alors, les énergies renouvelables, quésako ? Tour d'horizon des grandes familles et de leur fonctionnement.

*Selon la 17e édition du rapport annuel du REN21, le réseau international des énergies renouvelables, publié en juin 2022.

** Voir le troisième volet du sixième rapport d'évaluation du GIEC, publié le 4 avril 2022.

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LE SOLAIRE, UNE ENERGIE TOUTE PUISSANTE

Le soleil est la mère de la quasi-totalité de toutes les énergies renouvelables. Ses rayons nous chauffent et nous éclairent, ils sont source de vie. Ils sont aussi le moteur principal des mouvements de l'atmosphère et de l'Océan, des vents et des courants marins... Deux technologies permettent aujourd'hui d'exploiter directement l'immense potentiel énergétique qu'il nous envoie pour produire de l'électricité et de la chaleur : le solaire photovoltaïque et le solaire thermique. Seule et unique méthode de production d'électricité à ne pas faire appel à la force mécanique, le photovoltaïque s'appuie sur un phénomène physique découvert par Alexandre Edmond Becquerel en 1839, à savoir que certains matériaux, sous l'effet de la lumière du soleil, produisent spontanément un courant électrique. C'est le cas notamment du silicium, élément chimique très abondant, et composant principal de la grande majorité des panneaux solaires. Plus rares, certaines cellules photovoltaïques sont fabriquées avec des matériaux « organiques » (à base de carbone) que l'on imprime sur du plastique. Bien que moins efficaces, elles ont l'avantage d'être fines et souples, permettant ainsi des usages plus divers. L'énergie thermique, l'autre technologie solaire, englobe, quant à elle, l'ensemble des techniques existantes pour réchauffer un fluide (eau, gaz, huiles, sels fondus...) grâce au rayonnement solaire. Principalement utilisée pour produire de l'eau chaude (chauffe-eau solaires), de la chaleur (radiateurs ou planchers solaires) ou du froid (climatiseur solaire), elle peut aussi servir à fabriquer de l'électricité. Qualifiée alors de solaire « thermodynamique », cette dernière méthode consiste à concentrer les rayons du soleil (grâce notamment à des miroirs) de manière à chauffer un fluide jusqu'à l'état gazeux. La vapeur ainsi obtenue peut entraîner une turbine qui produit de l'électricité.

Points forts

  • Le photovoltaïque est une énergie modulaire qui peut être exploitée aussi bien à des fins domestiques que pour la production d'énergie à grande échelle.
  • Presque pas de rejet dans l'air (uniquement lors de la fabrication et du transport des matériaux).

Points faibles

  • Le soleil est une source d'énergie intermittente.
  • Une grande surface au sol est nécessaire. Toutefois, plusieurs innovations permettent d'éviter les conflits d'usage et l'artificialisation des sols (intégration au bâti, photovoltaïque flottant, tuile solaire...).

L'EOLIEN, LE VENT MEDIATIQUE

La toute première éolienne construite pour la production d'électricité remonte à la fin du XIXe siècle aux États-Unis. Le principe n'a pas changé depuis : capter l'énergie cinétique du vent pour faire tourner un rotor dont le mouvement est transmis à un générateur. Bien que les éoliennes, comme les panneaux solaires, se basent sur une source d'énergie intermittente, elles sont en mesure de produire de l'énergie environ 80 % du temps. Il en existe deux sortes principales, les éoliennes terrestres (dites onshore) et les éoliennes en mer (dites offshore), présentant chacune leurs avantages et leurs inconvénients. Moins complexes et moins onéreuses à installer et à gérer, les éoliennes terrestres pâtissent toutefois de plusieurs désavantages majeurs, à savoir un espace d'implantation forcément restreint, une taille plus modeste et des vents moins réguliers et moins puissants qu'en mer. La pollution visuelle et sonore dénoncée par les riverains fait également l'objet de fortes oppositions. Présenté comme une alternative plus efficace et moins incommodante, l'éolien marin, et notamment flottant - puisqu'il permet une implantation plus loin des côtes que l'éolien posé -, fait l'objet ces derniers mois d'une véritable montée en puissance. Ainsi, en mai 2022, l'Allemagne, le Danemark, les Pays-Bas et la Belgique ont conjointement annoncé vouloir multiplier par quatre leur capacité actuelle en mer du Nord. L'Écosse et les États-Unis prévoient aussi d'ambitieux projets d'expansion. Quant à la France, très en retard dans le domaine malgré le plus grand linéaire de côtes en Europe, elle prépare la mise en service de plusieurs parcs flottants d'ici à 2030, et notamment en Méditerranée et au sud de la Bretagne.

Points forts

  • L'énergie éolienne a un rendement supérieur en hiver, donc durant la saison où les besoins énergétiques sont les plus forts.
  • Presque pas de rejet dans l'air (uniquement lors de la fabrication et du transport des matériaux).

Points faibles

  • Le vent est une source d'énergie intermittente.
  • En mer, le coût de la construction et de la maintenance est important.
  • Bruit et pollution visuelle.
  • Dommages aux écosystèmes marins lors de l'installation d'éoliennes en mer.

L'HYDROELECTRICITE, UNE CONCURRENTE BIEN INSTALEE

L'hydroélectricité représente un peu plus de 15 % de la production mondiale d'électricité, se plaçant ainsi en première position des sources issues des énergies renouvelables et en troisième toutes filières confondues. Comme l'éolien, l'énergie hydroélectrique repose sur un principe mécanique simple : la force de l'eau, captée par une turbine, est transformée en électricité par l'intermédiaire d'un alternateur, puis d'un transformateur. Si la production d'une centrale hydroélectrique peut varier en fonction du débit et de la hauteur de la chute d'eau, elle ne produit pas pour autant, comme le solaire et l'éolien, une énergie intermittente. Contrairement au vent et au rayonnement solaire, l'eau peut être stockée et donc régulée. C'est le cas notamment pour les centrales de lacs et les centrales éclusées, installées dans les deux cas au pied d'un barrage et d'un réservoir. C'est le cas aussi des stations de transfert d'énergie par pompage, constituées pour leur part de deux réservoirs (supérieur et inférieur) fonctionnant par cycle de pompage ou de turbinage. Les centrales au fil de l'eau, en revanche, sont dépendantes du débit du cours d'eau sur lequel elles sont installées.

Points forts

  • L'eau est une source d'énergie modulable. En cas de panne, il est possible d'augmenter rapidement sa puissance électrique.
  • Presque pas de rejet dans l'air (uniquement lors de la fabrication et du transport des matériaux).

Points faibles

  • La construction d'un barrage peut endommager, voire détruire un écosystème.
  • La construction d'un barrage engendre souvent des déplacements de population.
  • L'installation d'une centrale hydroélectrique présente des risques (séismes, crues...), elle doit répondre à un cahier des charges très contraignant.

LES ENERGIES MARINES, L'AUTRE ENERGIE HYDRAULIQUE

Il n'y a pas que le débit des cours d'eau qui peut produire de l'électricité. La mer et les océans aussi ont un énorme potentiel énergétique. D'autant que les diverses technologies existantes sont loin d'avoir toutes atteint leur pleine maturité. La plus ancienne, l'énergie marémotrice, exploitée depuis l'Antiquité, met à profit les courants créés par le phénomène des marées pour produire de l'électricité. Constituée d'une digue en béton, l'usine marémotrice de la Rance, par exemple, mise en service en 1966, produit de l'électricité grâce à la différence de niveau entre la mer et le bassin. Tantôt plus haute côté mer, tantôt côté bassin, l'eau est turbinée aussi bien à marée montante que descendante. Moins répandues, les hydroliennes, elles, fonctionnent exactement selon le même principe que les éoliennes, mais tirent profit des courants marins. Bien qu'elles soient prometteuses, leur développement reste restreint, en raison notamment des contraintes techniques et environnementales. Quant aux installations houlomotrices, ce sont, comme leur nom l'indique, des dispositifs qui visent à exploiter le mouvement ondulatoire qui se forme à la surface des mers sous l'effet d'un vent lointain. Il existe diverses déclinaisons de ce procédé encore (majoritairement) à l'étude. La plus maîtrisée repose sur un système à flotteurs reliés entre eux par une chaîne, qui sous l'effet ondulatoire de la houle actionne une turbine. Autre technologie, un peu à part celle-ci, l'énergie thermique des mers (ETM), exploite la différence de températures entre eau de surface et eau des profondeurs pour produire de l'électricité. En phase de recherche et développement, ce type de production est uniquement possible en zone tropicale.

Points forts

  • Bien que certaines de ces énergies soient intermittentes ou variables, elles restent prédictibles.
  • Presque pas de rejet dans l'air (uniquement lors de la fabrication et du transport des matériaux).

Points faibles

  • Pour la plupart, ces technologies sont encore au stade du développement.
  • L'environnement difficile implique généralement des défis importants et des coûts d'installation et de maintenance élevés.

LA BIOMASSE, LA PLUS ANCIENNE ET LA PLUS UTILISEE

Peu médiatisée, la biomasse a pourtant de quoi faire parler d'elle. Non seulement les matières organiques sont, depuis la découverte du feu, la forme d'énergie la plus ancienne utilisée par l'homme, mais elles sont surtout l'énergie primaire renouvelable la plus consommée sur notre planète. Ainsi, en 2020, selon l'Agence internationale de l'énergie, sa part dans le mix énergétique mondial s'élevait à environ 10 %. La biomasse est également la seule source d'énergie renouvelable à pouvoir être convertie en biocombustibles, et notamment en biocarburants. C'est le cas du bois, par exemple, qui ne sert pas qu'à produire de la chaleur et de l'électricité, mais que l'on peut aussi, par hydrolyse de la cellulose, transformer en éthanol. C'est le cas également (et surtout d'ailleurs) de végétaux comme le colza, la betterave, le tournesol et le soja, et bientôt de micro-organismes comme les algues. Quant aux biogaz, autre grand domaine d'application de la biomasse, ils sont obtenus par fermentation naturelle de déchets organiques, et valorisables en chaleur, électricité, ou carburant. Un bémol toutefois : les bioénergies produites à partir de biomasse ne sont renouvelables que si des procédés de régénération sont mis en place pour l'assurer. Le bois, par exemple, doit être prélevé de manière raisonnée. Quant aux émissions de CO2, certes nettement inférieures à celles des énergies fossiles, elles ne sont pas négligeables. La question de leur neutralité carbone - censée être assurée grâce à la capture de CO2 par les matières organiques durant leur cycle de vie -, fait l'objet de vifs débats dans la communauté scientifique, notamment en ce qui concerne les biocarburants et la filière énergie-bois.

Points forts

  • La filière du biogaz permet la capture du méthane, un gaz à effet de serre très nocif.
  • L'énergie produite à partir de biomasse permet la valorisation des déchets.

Points faibles

  • Les émissions de CO2 ne sont pas nulles et le bilan carbone des énergies issues de la biomasse est sujet à débat.
  • Les ressources naturelles prélevées doivent l'être de manière raisonnée.

LA GEOTHERMIE, LE VOYAGE AU CENTRE DE LA TERRE

En Islande, la quasi-totalité des habitations et des bâtiments du pays est chauffée grâce à la chaleur naturellement contenue dans les sous-sols volcaniques du pays. Si tout le monde n'a pas la chance d'être assis sur plus de 100 volcans actifs, la règle n'en reste pas moins la même partout : plus on s'enfonce sous terre, plus il fait chaud. L'énergie géothermique est ainsi exploitée dans plus de 80 pays dans le monde. Après la biomasse, elle est même l'énergie renouvelable thermique la plus utilisée. Il en existe plusieurs sortes, selon que la source soit aquifère ou rocheuse, et selon la profondeur et la température captée. La géothermie de surface, la plus basse en température (entre 10 et 30 °C), sert exclusivement au chauffage ou à la climatisation des bâtiments (géocooling). Soit une eau, dont la température reste stable toute l'année, est pompée en profondeur, soit un fluide caloporteur (porte-chaleur) est envoyé dans le sous-sol pour s'y chauffer ou s'y rafraîchir. Dans le cas de la géothermie profonde, où les températures peuvent atteindre cette fois plus de 180 °C, une autre application est possible : la production d'électricité. Cette fois, les fluides géothermiques puisés en profondeur, captés la plupart du temps sous forme d'eau et de vapeur, sont utilisés directement ou indirectement pour faire tourner une turbine couplée à un alternateur. En France, le site de référence en matière de géothermie haute température (ou haute énergie) se trouve à Bouillante, où il puise les eaux souterraines du volcan guadeloupéen la Soufrière. Mais la production d'électricité est également possible en métropole, où les caractéristiques géologiques sont notamment favorables en Alsace.

Points forts

  • Peu de rejet dans l'air (uniquement lors de la fabrication et du transport des matériaux).

Points faibles

  • La géothermie profonde présente un défi technique, dans la mesure où il est difficile de capter la chaleur emmagasinée à de grandes profondeurs.
  • Les forages présentent des risques de séisme.

LES SOLUTIONS DE DEMAIN ?

Certaines technologies pourraient un jour venir enrichir l'arsenal déjà existant des énergies renouvelables. Certaines d'entre elles ne détonneraient pas le moins du monde dans un film de science-fiction, et pourtant...

Le solaire spatial

Le solaire, une énergie intermittente ? Pas si on va la chercher dans l'espace ! C'est l'idée toute simple qui se cache derrière celle des centrales solaires orbitales. D'autant plus qu'il n'y a pas que les nuages qui filtrent les rayons du soleil, mais également l'atmosphère. Des panneaux solaires placés en orbite pourraient ainsi récupérer presque 8 % de l'énergie solaire, contre moins de 2 % au sol. Quant au transfert d'énergie jusqu'à nous, il pourrait se faire à travers l'atmosphère grâce à des ondes radiofréquences. Reste que de nombreux obstacles techniques demeurent, notamment des problèmes de déperdition d'énergie lors de la transmission et de sécurité du trafic aérien.

L'énergie osmotique

Elle aurait pu s'inscrire dans le paragraphe sur les énergies marines, mais au stade actuel de la recherche, sa rentabilité reste trop faible. Pour faire simple, l'énergie osmotique vise à exploiter la différence de salinité entre eau salée et eau douce, généralement à l'embouchure d'un fleuve, pour produire de l'électricité. Pour ce faire, elle s'appuie sur un procédé connu sous le nom d'osmose, et qui permet à un liquide peu concentré en substances solubles (comme de l'eau douce) de migrer à travers une membrane semi-perméable vers un autre liquide à la concentration en soluté plus élevée (comme de l'eau de mer). Le transfert spontané des molécules à travers cette membrane engendre une pression et un débit qui peut faire tourner une turbine.

L'énergie statique de la pluie et de la neige

Dans la famille des conditions météorologiques exploitables pour produire des énergies renouvelables, il n'y a pas que le soleil et le vent. La pluie et la neige s'avèrent aussi des candidates sérieuses. Des chercheurs ont ainsi mis au point des dispositifs capables de capter l'électricité statique qu'elles génèrent lorsqu'elles se frottent à un autre matériau (effet triboélectrique). C'est le cas, par exemple, de l'équipe de l'Institut de Technologie de la Géorgie, aux États-Unis, qui a fabriqué une vitre alimentée par le vent et la pluie, ou encore de l'équipe de l'université de Californie qui a inventé un petit appareil à base de silicone alimenté cette fois par de la neige. Bien que peu performantes, ces sources d'énergie pourraient servir des usages spécifiques ou encore améliorer le rendement des panneaux solaires par mauvais temps.

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