Ruée vers les métaux rares : une alternative nommée WeeeCycling

Classée par l’UE parmi les 100 PME les plus éco-innovantes du continent, cette PME est la seule entreprise au monde capable de produire des métaux rares et précieux issus à 100% du recyclage de déchets. Alors que la planète se dispute palladium et lithium pour équiper smartphones et voitures électriques au risque d’épuiser les gisements, WeeeCycling se flatte de proposer une alternative vertueuse à l’extraction minière en matière d'environnement.
WeeeCycling collecte et affine des métaux issus de déchets ou de rebuts industriels au terme d'un procédé écologiquement vertueux.
WeeeCycling collecte et affine des métaux issus de déchets ou de rebuts industriels au terme d'un procédé écologiquement vertueux. (Crédits : Crédits Olivier Roche)

Des pyramides de téléphones portables, des montagnes d'ordinateurs, des amoncellements d'unités centrales, des rangées d'anciens compteurs EDF et un peu plus loin d'énormes sacs bourrés de cartes électroniques. Le décor n'est pas sans évoquer celui du génial film d'animation Wall E signé Pixar. Nous sommes dans l'ancienne usine d'embouteillage de la liqueur Bénédictine dans la banlieue de Fécamp, devenue une cathédrale de l'économie circulaire.

C'est là que l'entreprise Morphosis fondée en 2008 et sa jeune société sœur WeeeCycling extraient et affinent -thermiquement et chimiquement- les métaux rares et précieux issus de déchets ou de rebuts de la production industrielle collectés à travers la planète. Serge Kimbel, PDG et fondateur des deux entités, revendique un procédé écologiquement vertueux. « Produire un kilo de métal par l'extraction minière requiert 2,6 millions de litres d'eau quand nos process n'en utilisent que 50 et génèrent mille fois moins d'émissions carbone », vante t-il.

L'alchimie du 21e siècle

Le groupe normand, seul au monde à proposer du 100% recyclé, se positionne en concurrent des grandes compagnies minières chez qui cette activité reste marginale. Lauréat du concours mondial des entreprises innovantes, lui en a fait son cœur de métier. Il développe depuis une dizaines d'années des technologies permettant d'extraire les métaux fins dans tous les types de déchets « même à l'état de traces dans des poussières ou des boues industrielles ». En sortie des installations, ceux-ci sont transformés en sels, en billes de métal ou encore en solutions d'or, d'argent, de palladium, de rhodium, de lithium ou de cobalt.

Secret industriel oblige, Serge Kimbel ne dévoilera pas quelle quantité de métal affiné sort de son usine (il parle de plusieurs milliers de tonnes) mais il garantit « une pureté de l'ordre de 98% ». « Il n'y aucune distinction possible entre les métaux que nous produisons et ceux provenant des mines, y compris leur coût », assure t-il.

Des freins psychologiques

Reste cependant à convaincre les industriels, qui confient leurs déchets à l'entreprise normande, de réinjecter ces matériaux présentés comme « éthiques et écologiques » dans leurs procédés de fabrication. Facile à dire, moins aisé à faire admettre, concède le PDG: « Les entreprises hésitent souvent à modifier leurs procédés. Nous défrichons le terrain mais ce sont surtout des freins psychologiques qui empêchent le recours massif au recyclage ». L'intéressé cite en exemple cet entrepreneur du luxe qui lui a opposé une fin de non recevoir au motif que ses acheteurs de Dubaï refuseraient d'acheter du métal recyclé.

Pour vaincre les réticences, WeeeCycling a mis en place un éventail de services pour accompagner ses clients dans leur conversion à l'économie circulaire. L'offre  va de la collecte des déchets en France ou à l'étranger, jusqu'à la logistique reverse en passant par la promesse de spécifications techniques sur mesure.

L'intérêt du secteur aéronautique

L'initiative a tapé dans l'œil du cluster Normandie AéroEspace : une coalition de 200 entreprises de l'aéronautique. Pour son président, Philippe Eudeline, la solution proposée par la PME fécampoise répond clairement à un besoin. « Pouvoir s'assurer du cycle de vie complet d'un produit jusqu'à son démantèlement devient de plus en plus un critère de sélection pour nos adhérents », constate t-il.

De son côté, Serge Kimbel évoque des perspectives « de croissance très forte de la demande ». Son groupe, qui emploie 90 collaborateurs pour un chiffre d'affaires d'un peu moins de  20 millions d'euros, prévoit de recruter une centaine de personnes d'ici 2025. En attendant, il construit au Sénégal une usine de collecte et de prétraitement des déchets électriques et électroniques pour sécuriser son approvisionnement en matière première. La chasse (aux mines urbaines) est ouverte, et de celle-ci, les écologistes ne se plaindront pas.

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Commentaires 2
à écrit le 13/01/2021 à 12:45
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WeeeCycling veut dire PipiCycling en anglais me disent des amis anglophonesanglophone...

à écrit le 13/01/2021 à 1:32
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Ils ne sont pas seuls à faire ça, il y a une usine germano-suisse qui le fait depuis une dizaine d'années 10 € le kg de cartes mères par exemple.

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