Réchauffement : l'écart entre les coûts de l'adaptation et le financement devient un abîme

Dans les pays en développement, les coûts estimés de l'adaptation aux risques climatiques "sont 5 à 10 fois supérieurs aux flux actuels de financement public", dénonce l'ONU dans son "Adaptation Gap Report 2021". Le danger d'une "immense perturbation" plane sur la planète.
Giulietta Gamberini
L'adaptation aux risques climatiques trouve pourtant progressivement sa place dans les politiques publiques: huit pays sur dix ont déjà adopté au moins un plan, une stratégie ou une loi planifiant l'adaptation au niveau national, note l'ONU.
L'adaptation aux risques climatiques trouve pourtant progressivement sa place dans les politiques publiques: huit pays sur dix ont déjà adopté au moins un plan, une stratégie ou une loi planifiant l'adaptation au niveau national, note l'ONU. (Crédits : NICOLAS ECONOMOU)

L'adaptation aux impacts croissants du changement climatique est la grande oubliée des négociations internationales sur le climat, dénoncent depuis des années les défenseurs de l'environnement. Or, sans une accélération des efforts en ce sens, la planète risque une "immense perturbation", met en garde le Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE) dans l'édition 2021 de l'"Adaptation Gap Report" son rapport annuel, publié aujourd'hui, qui mesure les écarts entre les besoins et la réalité.

| Lire: Catastrophes naturelles : la facture des assureurs risque de doubler d'ici 2050

Pourtant, les projets visant à réduire les dégâts causés par le réchauffement de la planète (incendies, sécheresse, inondations, etc.) ne manquent pas, note le PNUE qui, en se fondant sur des données de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), en recense 2.600 financés par les 10 principaux donateurs entre 2010 et 2019. Ils concernent l'agriculture, les écosystèmes, l'eau, les infrastructures. L'adaptation aux risques climatiques trouve aussi progressivement sa place dans les politiques publiques, puisque 8 pays sur 10 ont déjà adopté au moins un plan, une stratégie ou une loi planifiant l'adaptation au niveau national. Mais la mise en œuvre et le financement de ces actions font encore défaut, regrette le PNUE.

Entre 140 et 300 milliards de dollars américains par an d'ici 2030,

Le rapport pointe du doigt la faiblesse des systèmes d'évaluation, dont disposent seulement un quart des pays. Mais il déplore surtout un écart croissant entre les coûts de l'adaptation au réchauffement et l'argent mobilisé. Les premiers se situent en effet désormais dans le haut de la fourchette de l'estimation qu'en faisait l'Adaptation Gap Report en 2016 pour les seuls pays en développement: entre 140 et 300 milliards de dollars américains par an d'ici 2030, et entre 280 et 500 milliards par an d'ici 2050. Quant au deuxième, les financements développés par les pays du Nord au profit des pays du Sud n'ont globalement atteint que 79,6 milliards en 2019, dont à peine un quart est allé à l'adaptation, a calculé en septembre l'OCDE.

Lire: Climat: le financement des pays du Sud, la question à 100 milliards de la COP26

"Dans l'ensemble, les coûts d'adaptation estimés dans les pays en développement sont cinq à dix fois supérieurs aux flux actuels de financement public pour l'adaptation, et l'écart se creuse", relève le PNUE.

Le Covid-19, une opportunité "largement manquée"

Comme l'organisme onusien l'avait déjà dénoncé la semaine dernière à propos des efforts d'atténuation des émissionsl'opportunité d'utiliser les 16.700 milliards de dollars de relance budgétaire déployés pour redresser les économies du monde après la crise sanitaire a d'ailleurs été "largement manquée" aussi en matière d'adaptation. Sur 66 pays étudiés, en juin 2021, moins d'un tiers avaient explicitement consacré une partie de cet argent aux risques climatiques.

Au contraire, l'élaboration de plans nationaux d'adaptation semble avoir été plutôt perturbée par le Covid-19. Et la crise particulièrement aiguë traversée par les pays en voie de développement, confrontés en même temps à une diminution des recettes publiques et à un coût accru de la dette, ne rend pas le PNUE optimiste pour l'avenir.

Des impacts "pendant de nombreuses décennies"

L'organisme onusien appelle donc à "intensifier le financement public de l'adaptation par le biais d'investissements directs et à surmonter les obstacles à la participation du secteur privé". Il souligne notamment la nécessité d'"utiliser la reprise budgétaire après la pandémie pour hiérarchiser les interventions qui permettent à la fois la croissance économique et la résilience au changement climatique" et d'"aider les pays en développement à libérer de l'espace budgétaire" grâce à "un allègement substantiel de la dette".

Dans un contexte où les pays les plus émetteurs de gaz à effet de serre tardent à s'engager à une réduction substantielle de leurs émissions, il rappelle aussi la nécessité de tenir compte des pires scénarios du réchauffement de la planète envisagés aujourd'hui. D'autant plus que, "même si nous fermions le robinet des émissions de gaz à effet de serre aujourd'hui, les impacts du changement climatique nous accompagneraient pendant de nombreuses décennies", met en garde Inger Andersen, directrice du PNUE.

Giulietta Gamberini

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 6
à écrit le 04/11/2021 à 21:56
Signaler
Le capitalisme est fondé sur un mensonge : la non prise en compte du collatéral du capital qui est la consommation définitive de ressources qui ne sont pas infinies... L'argent se conserve, s'accumule alors que tous ce qui a été crée comme support...

à écrit le 04/11/2021 à 19:33
Signaler
Comment quantifier, sans chiffre trompeur, les résultats... visant à réduire les dégâts causés par le réchauffement de la planète? C'est comme les chiffres d'une pandémie!

à écrit le 04/11/2021 à 19:21
Signaler
On veut nous faire croire que "l'adaptation" a besoin d'être financé pour que cela fonctionne! Seul "une réforme" a besoin de financement car elle est forcément inadaptée!

à écrit le 04/11/2021 à 14:47
Signaler
On cherche des solutions aujourd’hui alors qu’on se refuse à admettre que les dérèglements viennent uniquement de la démographie incontrôlée. En passant de 2.5 milliards d’habitants en 1950, à 7.7 milliards en 2020, on devait bien se rendre compte qu...

le 04/11/2021 à 15:30
Signaler
Vrai et faux. La population croit, et c’est un grave problème. Mais elle s’enrichit et veut consommer plus, et c’est le principal problème. Les émissions de GES de la chine ont augmenté de 50% en 10 ans, tandis que la population chinoise a cru de 5%....

à écrit le 04/11/2021 à 13:49
Signaler
L'argent public est particulièrement sollicité en ce moment pour alimenter les propriétaires de capitaux et d'outils de production du monde il ne peut pas suffire à compenser les désastres causés par ces mêmes gens qui détruisent le monde en ronflant...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.