L'édito de la Tribune : Effets de richesse

Par Valérie Segond, éditorialiste à La Tribune.

Pourquoi donc se pencher sur le flop des ventes aux enchères de Chrities à New York, un événement pour happy few, quand partout, la production se contracte, les usines dégraissent, les actifs s'effondrent, les prix à la consommation baissent, et que chacun se demande s'il pourra faire face à ses échéances ? Un parti pris il est vrai paradoxal quand on sait que le marché mondial de l'art ne dépasse pas un à deux jours de transactions sur le CAC 40, l'indice phare de la Bourse de Paris. Et que les pièces qui atteignent plusieurs millions de dollars demeurent exceptionnelles sur un marché fait à 90% de ventes à moins de 10.000 euros, et pour moitié à moins de 1.000 euros. Une goutte de parfum en somme dans les marchés mondiaux à la dérive. Mais il a un statut à part: à la fois sujet d'émotion et objet de placement, reflet de la sophistication des mécènes et de leur aptitude à faire des paris sur l'avenir, l'art, en particulier l'art contemporain, est le marché où s'expriment le plus nettement les effets de richesses. Un capitaine d'industrie ou gérant de "hedge fund" fait fortune ? Qu'il soit américain, russe, chinois, ou même français, il change de femme, devient collectionneur, puis grand mécène, avant de construire son musée, celui qui gravera son nom dans le marbre. Et comme il est joueur, c'est sur l'art contemporain qu'il mettra sa mise, un segment ultra-volatile, sensible à tous les "buzz" planétaires et sur lequel ni les institutions, ni l'histoire ne se sont prononcées. Avec l'éclosion des milliardaires dans le monde se faisant concurrence sur les mêmes oeuvres, les prix des artistes vivants ont explosé: en moyenne, selon le site Artprice, ils ont doublé entre début 2006 et début 2008, quand ceux des maîtres du XVème au XVIIIème siècle gagnaient modestement 8%. Cela fait plus d'un an que l'on attendait l'éclatement de cette bulle. La voilà, dans le sillage des Bourses. Une nouvelle décennie perdue pour l'art, comme le fut celle des années 90 ? Pas de souci, disent les connaisseurs: cinq cents musées sont en construction dans le monde. Il va bien falloir les remplir.

 

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 1
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
Signaler
Pour très bien connaître ce marché je peux affirmer que les articles sur les prix astronomiques et absurdes, donné pour certains objets, font un tort considérables aux artistes, car par amalgame nombreux sont les français qui croient les oeuvres d'ar...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.