Partager la richesse

Par Philippe Mabille, rédacteur en chef et éditorialiste à La Tribune.

En lançant, le 5 février dernier, le débat sur le partage des profits, Nicolas Sarkozy a ouvert la boîte de Pandore. Evoquer, en pleine crise financière, au moment où l'opinion cherche des boucs émissaires, l'idée d'une répartition nouvelle des profits - un tiers pour l'actionnaire, un tiers pour l'entreprise et un tiers pour les salariés - était une provocation délibérée qui n'a pas manqué son but : agacer le patronat et exciter les syndicats.

La remise ce matin du rapport de Jean-Philippe Cotis, "Partage de la valeur ajoutée, partage des profits et écarts de rémunérations en France", devrait apaiser les esprits. Le Medef voit conforter son diagnostic constant, selon lequel il n'y a pas, en France, de déformation du partage de la valeur ajoutée (la richesse produite par les entreprises) au détriment des salariés. En 2007, la rémunération du travail représentait les deux tiers de la valeur ajoutée totale, proportion stable depuis la fin des années 1980.

Ce diagnostic n'est certes pas "partagé" par tous les syndicats, qui voudraient bien revenir à la répartition de richesse que la France a connue dans les années 1960. Le rapport Cotis montre que ce n'est pas, en tout cas, par un prélèvement supplémentaire sur les profits que l'on peut espérer y parvenir et que seule une augmentation de la productivité de l'économie et donc de la croissance permettra de créer plus de richesse à distribuer.

On avait en effet eu tendance à l'oublier, le profit, c'est-à-dire l'excédent brut d'exploitation, sert d'abord à développer l'entreprise, puis à rémunérer l'actionnaire pour le risque qu'il prend. Ce n'est qu'en bout de chaîne qu'il est éventuellement partagé avec les salariés. Tout cela n'empêche pas que, depuis vingt ans, la croissance des salaires nets français a été extrêmement faible. Mais l'explication vient surtout de notre croissance globale trop faible, du choix qui a été fait d'un haut niveau de protection sociale financé par des cotisations sociales élevées et enfin de la montée des emplois précaires et faiblement rémunérés.

Le rapport Cotis pointe aussi du doigt les très fortes inégalités entre les salariés, avec une accélération de l'écart de rémunération entre le salaire médian et ceux du haut de l'échelle, en particulier les cadres du secteur bancaire et financier. Mais, mis à part une énième loi pour développer l'épargne salariale en France, on voit mal ce que Nicolas Sarkozy va faire des conclusions de ce rapport, le chef de l'Etat ayant exclu toute hausse des impôts sur les hauts revenus.

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Commentaires 6
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Si j'ai bien compris le raisonnement de Mr MABILLE, les énormes disparités dans les revenus des Français sont rès bien et elles doivent continuer à perdurer ? On se croirait revenu à 1788... (et ils appellent cela le "progrès" ????)

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Rappelons que les épargnants prennent le risque de ne pas toucher de revenu alors que les salariés sont payés chaque mois et qu'il est prévu des dédommagements aux salariés mais pas pour les épargnants en cas de fin de contrat; jusqu'à preuve du cont...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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"Si j'ai bien compris le raisonnement de Mr MABILLE" Non t'as rien compris.stop.

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Voici un joli débat dans la pure tradition d?hypocrisie et d?incompétence qui sont les mamelles de nos gouvernants. Sait on ce qu?est un salarié ? Une personne qui accepte de son plein gré d?échanger des heures de son temps contre de l?argent, dan...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Le réglage et l'équilibre du moteur de l'économie ne dépend pas de la notion d'inégalité, malheureusement pour les égalitaristes, le risque de perdre sa mise dans une affaire doit être mieux rémunéré que l'absence de risque, sinon plus personne ne ri...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Le rapport Cotis est un bon rapport mais il est néanmoins un peu court sur la partie salaires indirects ou différés - qui représentent les charges sociales- dont le poids a fortement augmenté depuis deux décennies. C'est certes redistribué mais p...

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