Baisse de la production de lait : quel scénario pour Lactalis ?

En France, la baisse de la production laitière se creuse en 2023 et la consommation de lait recule. Ce qui n’est pas sans conséquence pour le groupe mayennais Lactalis qui enregistre une baisse de ses volumes. En revanche, il renforce ses parts de marché en valeur. Dans ce contexte, pas question de freiner les investissements. Entretien avec son directeur Jean-Marc Bernier dont le groupe a fêté ses 90 ans cette année.
(Crédits : D.Osso)

A l'échelle mondiale, la production laitière connaît cette année une très légère croissance à date, après un coup de frein conjoncturel en 2022. Une tendance haussière qui s'observe aussi à l'échelle européenne (+0,6%) mais avec des écarts importants d'un pays à l'autre : « la France (-2,6%) et l'Italie (-1,8%) connaissent une baisse de production ». A contrario, « l'Allemagne connaît une hausse de 1,4%, comme la Pologne (+1,5%) », détaille Jean-Marc Bernier, directeur général de Lactalis dont le siège social est à Laval (Mayenne) équipé de 69 laiteries, avec 15.000 collaborateurs à l'échelle nationale.

Au global, cette année, le marché des produits laitiers connaît une inflation de +15% environ (+8% en 2022). « Malgré cela, le marché total des produits laitiers en volume résiste bien avec une baisse de seulement 1% en 2023 (-2% en 2022). Les consommateurs ont tendance à reporter leurs achats des marques (-5%) vers les marques de distributeurs (52% des volumes), qui ont gagné deux points de parts de marché (+7% environ). Nous remarquons même un transfert vers les produits les moins chers. » Avec des disparités : le marché du lait est en difficulté (-2,5%), comme les yaourts (-1%) et le beurre (-2%) alors que les fromages (+0,4%) et la crème (+2,4%) résistent bien. Le prix annuel du lait sera lui à la hausse en 2023, pour s'afficher à 429,20 euros les 1 000 litres, soit un prix supérieur de 5 euros par rapport à 2022.

D'après Jean-Marc Bernier, le marché des produits laitiers devrait rester relativement stable en 2024, avec une tendance à la baisse en France.

« Pas dans un scénario d'amélioration »

Dans ce contexte, comment s'en sort l'industriel mayennais (chiffre d'affaires 2022 : 28,3 milliards) qui se classe parmi les dix premiers groupes laitiers et représente 75 marques, dont une cinquantaine distribuée en France ? D'après Lactalis, la collecte de lait se maintient. En 2022, le groupe dit avoir collecté 22,6 milliards de litres de lait à l'échelle mondiale auprès de 435.000 producteurs et 5,3 milliards de litres auprès de 12.500 producteurs français. « Cette année, la production de lait est quasi stable (+0,59%). Les projections pour 2024 indiquent également une stabilité de la production. »

Après avoir connu une baisse de son résultat net consolidé en 2022 (soit 1,36 % du chiffre d'affaires), Lactalis qui clôturera son exercice 2023 en fin d'année et publiera ses prochains résultats en avril 2024 ne s'inscrit toutefois pas pas dans un scénario d'amélioration et ce, « compte tenu de la hausse des coûts ».

« Si le marché des produits laitiers résiste plutôt bien à l'inflation, nos volumes de ventes (pour les produits de grande consommation) sont en recul de -1,1% de janvier à septembre », précise Jean-Marc Bernier qui  table en revanche sur une hausse du chiffre d'affaires sur le marché français (5 milliards d'euros en 2022).

Pas de coup de frein sur les investissements

Lactalis a engagé cette année 200 millions d'euros d'investissements en France (soit +6% environ comparé à 2022), dont 30 à 40 millions d'euros (20%) dans ses engagements RSE. « Pour être au rendez-vous de la décarbonation ou encore de l'emballage recyclable, nous devons investir massivement dans nos laiteries et fromageries », prolonge le directeur général.

La modernisation de la fromagerie de Domfront-en-Poiraie dans le sud de l'Orne, en service depuis 1972 et inaugurée le 20 octobre dernier après quatre ans de travaux, constitue le plus gros investissement pour Lactalis, soit 70 millions d'euros. « Nous allons continuer à investir dans ce site l'année prochaine pour poursuivre sa transformation », sans en dire plus sur ce point. Cette enceinte de 40.000 mètres carrés abrite « le plus grand coagulateur de lait du monde », en service depuis février dernier. Cette machine ressemble à un grand couloir, avec un immense bassin de soixante mètres de long dans lequel le lait commence à se solidifier. En parallèle, « de nombreux travaux ont été réalisés sur le démoulage et dans l'automatisation des lignes pour améliorer les conditions de travail des collaborateurs, et dans la création de cinq nouveaux hâloirs (caves d'affinage) », dans le but d'augmenter les capacités de production. « Historiquement, le site produisait 24.500 tonnes de camembert par an. En 2023, nous avons ajouté à cette production 7.800 tonnes de pâtes molles ovales. Et, en 2024, nous ajouterons 7.500 tonnes de coulommiers. Soit 39.800 tonnes par an l'an prochain et une augmentation de 60%. La fromagerie de Domfront produit 540.000 fromages par jour (soit l'équivalent de 135 tonnes par jour). » 455 personnes travaillent ici (157 salariés ont été recrutés depuis 2022). Un effectif qui grimpera à 490 personnes en 2024.

Un investissement lourd qui peut interroger lorsque l'on sait que le camembert est à la traîne (68.000 tonnes écoulées en 2008 et 42.000 tonnes en 2022) car concurrencé par une nouvelle offre sur le marché des fromages. « Ce produit reste important pour Lactalis. De plus, il a de nouveau le vent en poupe car il reste peu cher et il s'exporte plutôt bien », justifie Jean-Marc Bernier.

A date, ce dernier ne prévoit pas de baisse d'investissements en France l'année prochaine. « Tout dépendra du scénario du marché en 2024 », tient-il à ajouter. Interrogé sur les priorités, il cite la RSE qui est « un enjeu lourd » mais aussi l'amélioration de la qualité de vie au travail et la sécurité des collaborateurs ou encore la recherche d'innovation.

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Commentaires 3
à écrit le 25/11/2023 à 14:27
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Le lait est mauvais pour la santé, pour les plus de 50 ans. Ca bouche les artères

à écrit le 25/11/2023 à 9:49
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"literies" vraiment? Et 69? vous êtes sûr? Une secrétaire dans les années 70 (tout juste 20 ans,venait de se marier) écrivait "Strasbourg, chef lieu du Bas rein". Rien de nouveau sous le soleil, tant qu'il y aura des hommes...

à écrit le 25/11/2023 à 8:54
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Baisse de la consommation d'un produit dérivé du lait, bourré de produits chimiques, ultra allergisant, imposé à toues les citoyens européens par l'agro-industrie.

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