La Presse Quotidienne Régionale, un maillon essentiel de la démocratie locale et du dynamisme économique des territoires au travers des marchés publics

La PQR (presse quotidienne régionale) est, selon une étude IFOP publiée le 14 février 2023, un pilier de la démocratie locale et du dynamisme économique des territoires.
(Crédits : DR)

Cette étude, réalisée par l'institut IFOP sur la période du 13 décembre 2022 au 18 janvier 2023 auprès d'un panel de 405 chefs d'entreprises et 406 élus locaux hors Ile-de-France, a été commandée par la presse quotidienne régionale qui édite, au travers du GIE publication de marchés, deux sites web qui traitent justement de démocratie locale et d'économie avec le portail des appels d'offres de marchés publics France Marchés et la plateforme des enquêtes publiques Notre Territoire.

La dématérialisation de la commande publique

Cette étude vise à attirer l'attention sur le projet de centralisation des appels d'offres publics sur une plateforme unique nationale. Ce portail s'inscrit dans le projet de Transformation Nationale de la Commande publique (TNCP) porté par les services de Bercy.

Or, pour de nombreux maires et acteurs des collectivités territoriales, cette plateforme existe déjà et préserve en plus la relation de proximité entre acheteurs et entreprises locales.

Le sénateur des Yvelines Michel LAUGIER, membre de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, et apparenté au groupe Union Centriste, a d'ailleurs posé une question au gouvernement le 30 mars 2023. Il se fait l'écho des collectivités en affirmant que le portail France Marchés, qui recense déjà plus de 300 000 avis par an auprès de 53 titres de la PQR, fait déjà office de plateforme unique. Ce dispositif présente en outre un avantage important : les avis sont publiés localement dans les titres de la PQR tout en étant relayés au niveau national sur le web. France Marchés est un site national, il propose aussi un lien de proximité étroit avec les territoires.

La proximité économique en danger

Selon l'IFOP, pour 65% des élus et 56% des entreprises, la PQR est utile pour identifier les opportunités locales en matière de marchés publics. Quand une mairie souhaite refaire une voirie ou construire un skate parc pour animer les jeunes publics, elle souhaite généralement d'abord communiquer auprès des entreprises de sa région et publie souvent un avis de publicité dans la presse locale.

Une plateforme unique centralisée questionne donc les élus :

  • Quels contacts de proximité établir entre collectivités et entreprises pour que les unes définissent précisément leur besoin et les autres se fassent connaître ?

  • Quels moyens de publicité pour les collectivités ?

  • Comment éviter une « industrialisation » des réponses avec la dérive d'une concentration des avis qui risque de favoriser les grandes entreprises ? Comment répondre aux critères RSE à l'échelle des PME si celles-ci sont écartées par l'éloignement des marchés publics ?

Une réticence de certaines PME à répondre aux marchés publics

Si les PME restent en 2022 en tête des attributaires en volume, mais pas en valeur avec environ 30%, devant les groupements d'entreprises, les ETI et les grands groupes, toutes ne vont pas facilement vers la commande publique.

Ainsi, le CINOV, la fédération qui regroupe les métiers du conseil, de l'ingénierie et du numérique, a publié un premier baromètre sur le thème des marchés publics qui témoigne de la frilosité des plus petites entreprises à postuler pour les appels d'offres de marchés publics. Les points noirs portent notamment sur le manque de clarté dans l'expression des besoins, la lourdeur du dossier de candidature à rédiger et le délai de paiement jugé trop long.

Le sourcing et le rôle des PME dans la définition du besoin des acheteurs publics

Une concentration des avis de marchés publics sur un portail unique, qui serait supposé favoriser la mise en concurrence au bénéfice des acheteurs, induirait plutôt le risque de couper le lien entre les PME et les acheteurs publics. Rappelons tout de même que les PME façonnent en partie les besoins des collectivités en proposant des solutions innovantes ou spécifiques en amont de l'appel d'offres.

En effet, les entreprises aident les collectivités à matérialiser leurs besoins et à identifier des réponses concrètes et opérationnelles. Le sourcing, ou études et échanges préalables, est une pratique qui permet aux acheteurs publics de solliciter les entreprises en amont des marchés publics. La proximité géographique est souvent aussi un élément de cette phase de conseil et d'observation.

Les services techniques d'une collectivité (ou ceux qui en exercent les fonctions lorsqu'ils n'existent pas) doivent définir judicieusement et précisément le besoin (périmètre, durée, allotissement...), les modalités de choix de l'attributaire (procédures, critères...) et les conditions contractuelles d'exécution. En matière de sourcing, les cabinets spécialisés dans les marchés publics insistent d'ailleurs souvent sur l'approche commerciale en amont qui permet aux entreprises de se faire connaître et d'instaurer un climat de confiance.

Une trop forte concentration ne risque-t-elle pas de nuire au maillage local ? À quoi servira-t-il de se faire connaître comme un prestataire potentiel pour des consultations futures si le marché public est mis à distance avec une concurrence exacerbée qui favorisera les grandes entreprises ?

Le sourcing local risque de se déplacer au niveau national, ne resteraient plus au niveau local que les marchés en-dessous des seuils de publicité.

Dans certaines filières, comme les cantines scolaires, l'éloignement de la publicité des marchés publics risquent d'être également contre-productif en laissant de côté les candidats proches géographiquement et donc proposant des solutions avec moins de transport.

Concentration ne signifie pas forcément « simplification »

En matière de démocratie, le discours de Philippe Séguin, sur le traité de Maastricht (le 5 mai 1992) sur la conspiration du silence des experts, résonne comme un rappel. La démocratie est mise « à distance », la prise de décision s'éloigne. Le livre « Slow Démocratie » de David Djaïz parle, à cet effet, de la mise à distance de la démocratie par les QUANGOS (autorités administratives indépendantes), lesquelles ne sont pas « situables dans la séparation habituelle des pouvoirs ». La technocratie s'appuie sur la technologie pour justifier des décisions « techniques » dont les effets de long terme sont peu ou prou mesurés sur les plans économiques et sociaux. La concentration fait en quelque sorte partie intégrante de la doctrine.

À l'heure où la mondialisation change de visage, la démocratie locale est pourtant un relais important de la démocratie représentative nationale. Elle s'impose en quelque sorte comme le premier étage de la démocratie, là où les alternatives sont expérimentées, notamment en matière de transition écologique. L'enjeu de la concentration, et donc de la mise à distance des marchés publics, aura probablement des impacts importants au niveau local, difficile à estimer aujourd'hui.

La presse régionale joue un double rôle en matière politique et économique. Elle nourrit des liens et des contre-pouvoirs et atomise la commande publique au bénéfice des tissus économiques locaux. Avec 211 000 marchés pour 210 milliards d'euros en 2022, les marchés publics ne doivent pas laisser de côté les TPE-PME. La concentration et l'éloignement des marchés ne résoudront pas in fine le besoin de simplification et d'accès à la commande publique.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.