Cybersécurité : l'Etat met 1 milliard d'euros sur la table pour lutter contre les cyberattaques

La stratégie française sur la cybersécurité, dévoilée ce jeudi par Emmanuel Macron, ambitionne de créer 40.000 emplois d'ici à 2025 et de renforcer la filière cyber française, aujourd'hui sous-dimensionnée et incapable de faire face à l'ampleur de la menace, comme l'illustrent les cyberattaques des hôpitaux de Dax et de Villefranche-sur-Saône. Décryptage.
Sylvain Rolland
(Crédits : BENOIT TESSIER)

Alors que le nombre d'attaques informatiques en France a été multiplié par quatre en 2020 d'après l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi), l'Etat annonce sa riposte. Lors d'une visioconférence ce jeudi avec les hôpitaux de Dax (40) et de Villefranche-sur-Saône (69), paralysés par des cyberattaques dévastatrices au rançongiciel depuis quelques jours, le chef de l'Etat, Emmanuel Macron, s'apprête à dévoiler la stratégie cyber de la France. Au programme : 1 milliard d'euros de nouveaux financements, dont un peu plus de la moitié (515 millions d'euros) vient des caisses de l'Etat, et le reste du secteur privé. L'objectif : "structurer l'écosystème cyber et le rendre plus robuste" afin de permettre aux acteurs nationaux de se doter de solutions françaises -alors que les acteurs étrangers captent jusqu'à 40% du marché des solutions pour les entreprises-, dans un contexte d'industrialisation de la menace à l'échelle mondiale.

"Les cyberattaques ont quadruplé en 2020 non pas à cause de la crise du Covid qui a accéléré le déploiement du numérique, mais parce que les cybercriminels industrialisent leurs attaques, avec par exemple des kits clés-en-main qu'ils vendent à d'autres criminels, et qui font beaucoup de dégâts", résume Guillaume Poupard, le directeur de l'Anssi.

Résultat : tous les secteurs économiques -des banques aux médias, en passant par les transports et même les géants du numérique- et tous les types d'organisations -de la TPE au grand groupe en passant par la collectivité ou les institutions- sont menacés et parfois victimes du piège cyber. Et malgré une belle croissance -un chiffre d'affaires de 7,3 milliards d'euros en 2020, en croissance de 10% par an depuis cinq ans-, et 37.000 emplois, la filière française reste sous-dimensionnée. C'est pourquoi la stratégie d'Emmanuel Macron se donne pour ambition d'arriver à doubler le nombre d'emplois dans la cyber d'ici à 2025 -soit 40.000 postés créés-, tout en triplant les revenus de filière, à 25 milliards d'euros.

Lire aussi : Cyberattaque : comment l'Hôpital Nord-Ouest de Villefranche tente de faire face

500 millions d'euros pour la recherche, 200 millions pour les startups

Suivant la même logique que pour les plans sectoriels sur l'intelligence artificielle puis sur les technologies quantiques, le plan cyber est une "stratégie d'écosystème" qui s'appuie sur cinq piliers : un soutien massif à la recherche, des investissements dans les startups, des formations pour combler le déficit de compétences, des aides pour équiper le secteur public en solutions cyber, et enfin l'émulation collective de l'ensemble de la filière pour encourager les collaborations.

Dans le détail, le volet "recherche" est, de loin, le plus fourni. Il bénéficie à lui seul de la moitié de l'enveloppe globale, soit 500 millions d'euros, dont 300 millions d'euros viennent de l'Etat -via le plan de Relance et le PIA4- et 200 millions d'euros du privé. Destiné aux laboratoires de recherche et notamment ceux de l'Inria, du CEA ou encore du CNRS, cet argent servira à la fois à développer la recherche fondamentale et de nouvelles technologies de cybersécurité, mais aussi à financer des projets collaboratifs public/privé, par exemple pour créer des solutions adaptées pour sécuriser les objets connectés -grand enjeu de la décennie à venir- ou des solutions conçues pour les besoins spécifiques de filières critiques comme celle des transports. L'enveloppe pourra également aider la R&D d'entreprises privées, à l'image de celle de la startup française Oodrive, pour son projet de navigateurs virtuels pour l'accès à Internet.

La stratégie cyber fait également la part belle aux startups. 200 millions d'euros seront investis sur cinq ans en fonds propres dans des pépites de la cybersécurité, notamment via Bpifrance. L'objectif : encourager le transfert de technologies issues de la recherche dans le privé, et offrir aux acteurs français davantage de solutions souveraines. Car aujourd'hui, l'écosystème des startups cyber est tout petit, et aucune des dix licornes françaises n'évolue dans le domaine. Si certaines pépites s'illustrent déjà et affichent de grandes ambitions -notamment CybelAngel, seule startup cyber du Next40-, VadeSecure -membre du French Tech 120-, ou encore Voxo et Gatewatcher-, la plupart peinent à grossir. Ou, pire, elles se font avaler trop vite par des acteurs souvent étrangers, à l'image des rachats, la semaine dernière, de Alsid et Sqreen par les américains Tenable et Datalog.

Lire aussi : Le logiciel français Centreon, prisé des grands groupes, victime de cyberattaques pendant trois ans

Un "Station F" de la cyber à La Défense

La stratégie nationale prévoit également d'investir 176 millions d'euros sur cinq ans pour "soutenir la demande" de solutions cyber. L'Etat, les collectivités et les organisations publiques comme les hôpitaux sont particulièrement concernés par cette aide, qui vise à "les aider à se mettre vite au niveau". Cette enveloppe comprend notamment 136 millions d'euros pour l'Anssi. L'agence spécialisée dans la sécurité informatique aidera ces structures à financer des audits de sécurité réalisés par des acteurs locaux et à déployer des solutions de détection d'attaques.

Le quatrième volet, celui de la formation pour développer les compétences cyber qui font aujourd'hui l'objet de pénuries, sera doté d'une enveloppe de "plusieurs dizaines de millions d'euros". Enfin, un "campus cyber" de 20.000 mètres carrés devrait voir le jour au deuxième semestre 2021 à la Tour Eria de La Défense. Ce "Station F de la cyber", d'un coût de 75 millions d'euros, ambitionne de regrouper un millier de personnes issues d'incubateurs, de startups ou encore de grands groupes. Comme pour son illustre modèle créé par Xavier Niel en 2017,  pour renforcer le lien entre les différents acteurs de la filière et faciliter les collaborations. L'endroit sera aussi le lieu d'événements pour animer l'écosystème et le faire rayonner.

Sylvain Rolland

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Commentaires 14
à écrit le 03/03/2021 à 12:04
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1 milliard qui vont devenir 2 et alourdir d'un coefficient 4 la gestion des hôpitaux et autres structures qui adopteraient à tout hasard le système informatique macronique.!

à écrit le 19/02/2021 à 3:24
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Regard torve qui en dit beaucoup sur la personnalite du bonhomme. "Qu'ils viennent me chercher", peut-etre en 22 quand tu auras perdu les erections, et ton immunite de petit parvenu. Tot ou tard tu seras rattrappe....

à écrit le 18/02/2021 à 14:45
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Ce n'est pas l'état qui met de l'argent sur la table, c'est vous et moi Chers journalistes, vous ne payez pas d'impôts? pouquoi ce titre?

à écrit le 18/02/2021 à 13:19
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Le fait même d'avoir un réseau wifi est une vulnérabilité, le manque de formation du personnel également, ainsi que d'avoir une liberté de choix plutot qu'une mise en oeuvre systématique de PSI définie au plus haut niveau administratif et de compéten...

à écrit le 18/02/2021 à 12:59
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Il suffirait simplement de mettre ces établissement sous Linux ou autre système libre et robuste pour voir les attaques chuter. Mais ça ne sera jamais fait, sûrement pas assez chères versus des licences payantes, effectivement pour la plupart étrangè...

à écrit le 18/02/2021 à 11:51
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A chaque fois qu'on détecte un problème, le gouvernement met une (grosse) enveloppe sur la table, distribue le fric , et hop ! Considère le problème REGLE, sans contrôle ni évaluation Ce gouvernement stupide (comme les précédents), se croit composé...

à écrit le 18/02/2021 à 10:23
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Que l'on mette certains réseaux (Hopitaux, energie, Etc) à l'abri d'internet. Vouloir les protéger en système ouvert revient à une fuite en avant.

à écrit le 18/02/2021 à 10:02
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Encore une rente en construction avec de l'argent public! Nous avons droit a des prestidigitateurs et de bons "comédiens" au pouvoir!

à écrit le 18/02/2021 à 9:48
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Macron fait des annonces, Macron est un grand spécialiste du ruissellement... des dégâts, du négatif, qui confirme le désastre en marche en même temps

à écrit le 18/02/2021 à 9:47
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Et pour lutter contre la dictature en marche, combien de milliards sur la table ?

à écrit le 18/02/2021 à 9:04
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Après avoir mis toutes nos données les plus sensibles sur internet à savoir un réseau peer to peer qui ne sera jamais sûr à 100%. On est toujours dans la continuité du grand n'importe quoi donc...

à écrit le 18/02/2021 à 8:31
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Avec Hollande on entendait des aides à des millions d'Euros. Mais avec Macron on ne parle que de Milliards d'Euros. C'est pour quand l'augmentation des taxes foncières sur les propriétaires de biens immobiliers, pour renflouer........................

le 18/02/2021 à 14:00
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de la manipulation pour les crédules

à écrit le 18/02/2021 à 8:08
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Et oui les meilleurs informaticiens sont tous parti à l’étranger pour être mieux payés, encore une fois la France conserve principalement de très bons footballeurs très utiles pour le pays...

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