Pourquoi Microsoft France devient défenseur du "made in France"

D'après Microsoft, 60% de son chiffre d'affaires en France vient des services informatiques à distance (cloud). En pleine opération séduction auprès des entreprises, le groupe américain multiplie les initiatives afin de changer son image et se distancer des très polémiques autres géants du Net américains.
François Manens
Le cloud représente 60% du chiffre d'affaires de Microsoft France, d'après son président.
Le cloud représente 60% du chiffre d'affaires de Microsoft France, d'après son président. (Crédits : Lucy Nicholson)

Ne parlez pas de "Gafam" à Microsoft. Le géant du Net américain, qui est redevenu l'entreprise la plus valorisée au monde (1.008 milliards de dollars au 19 septembre, devant les 1.001 milliards d'Apple et les 905 milliards d'Amazon), veut se dissocier le plus possible de ses collègues champions de la Bourse. Surtout en France, où la firme californienne se développe essentiellement avec les entreprises. Ainsi, d'après le président de Microsoft France, Carlo Purassanta, le chiffre d'affaires hexagonal du groupe -non communiqué- reposerait à 60% sur les services de cloud (informatique à distance). Mieux, il pourrait peser 75% des revenus réalisés en France dans deux ans. C'est une tendance globale : le cloud devient de plus en plus important dans le business de Microsoft, qui n'a pas su prendre le tournant du mobile. Traduction : pour séduire encore et toujours les entreprises, Microsoft n'a pas d'autre choix que de se présenter comme plus Français qu'un Français.

Déminer la menace du Cloud Act

Dans le détail, Microsoft France est tiré par trois piliers. Office 365, la version cloud de la célèbre suite de logiciels de bureautique, a rencontré un succès rapide grâce à celui de son ancêtre. Mais ce sont surtout les deux autres branches, Dynamics (suite logiciel de gestion d'entreprise) et Azure (stockage et services autour des données et de l'IA), qui explosent et "doublent" chacune leur chiffre d'affaires annuel, d'après Carlo Purassanta. Cette tendance se retrouve à l'échelle mondiale : au dernier trimestre, les activités cloud sont devenues la première source de revenus du groupe, avec 11,4 milliards de dollars de chiffre d'affaires. En France, la balance serait encore plus accentuée avec deux tiers de l'activité liée au cloud, contre seulement un tiers au niveau global. 

Pourtant, le groupe américain pourrait craindre les peurs que suscite le Cloud Act, imposé par l'administration Trump. Ce texte de loi américain offre la possibilité à un juge américain, dans le cadre d'une enquête pénale, de demander un transfert de données. Autrement dit, si une PME française héberge ses données sur les serveurs de Microsoft ou d'une autre entreprise américaine (comme Amazon Web Services, Google Cloud ou Oracle), alors celles-ci pourront être transférées aux États-Unis pour être analysées, en toute discrétion, par les autorités américaines. Problématique pour la souveraineté nationale, d'autant plus qu'il n'existe pas d'obligation de prévenir l'entreprise concernée. Carlo Purassanta relativise:

"On fait toute une histoire du Cloud Act, alors qu'il ne s'appliquera que dans un très faible nombre de cas. En revanche, les failles de sécurité sont quotidiennes. Le plus grand enjeu des entreprises, c'est la sécurisation des données, et nous sommes très performants sur ce point", se défend-il.

Le géant américain flatte le made in France

Carlo Purrassanta rappelle que Microsoft est aujourd'hui une "entreprise de plateforme" et invite ses partenaires actuels et futurs à "créer des services avec des caractéristiques ou des valeurs françaises". Pour sa rentrée, le groupe américain joue la carte du patriotisme économique... français.

"Les innovations viennent surtout des États-Unis et de la Chine, mais c'est à nous de nous approprier ces nouveaux modèles de business et d'en faire quelque chose de français", promeut le dirigeant.

Pour joindre l'exemple aux paroles, la firme de Redmond avait invité le fabricant de costumes sur mesure Smuggler (groupe Molitor), dont les produits sont labellisés "origine France garantie". Connaissance des clients, amélioration des sites web, robotisation, formation des employés, maintenance prédictive... autant de chantiers sur lesquels les deux entreprises ont collaboré et collaborent. Microsoft accompagne également l'entreprise de textile dans son projet de construction d'une nouvelle usine dans la région de Limoges, bassin historique du secteur. Ce nouvel appareil de production devrait servir au groupe d'exemple des capacités de l'industrie 4.0. Elle sera équipée de plus de machines pour automatiser les tâches, mais aussi d'un meilleur système de collecte et de suivi des données pour optimiser les processus via des logiciels d'IA.

Microsoft a aussi présenté son programme de mécénat Share AI, qui a permis, notamment, à certains de ses employés d'assister une équipe de recherche académique sur un nouvel outil de détection des lymphomes (un type de cancer du sang). Mais ce n'est pas tout : le géant a aussi tenu à exposer son soutien aux startups de la French Tech, dont Younited Credit, membre du Next40, ainsi que sa participation à la formation de dizaines de travailleurs de l'IA via ses écoles spécialisées, en partenariat avec Simplon.

François Manens

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