Fabien Bardinet robotise les chariots élévateurs

Issu d'une grande famille de l'univers des spiritueux, Fabien Bardinet a débuté comme banquier avant de rejoindre Bruno Maisonnier dans l'aventure Aldebaran (le robot Nao), puis de prendre la direction de Balyo, qui automatise les chariots élévateurs pour l'industrie et la distribution.
Fabien Bardinet est le directeur général de Balyo depuis 2013 qui automatise les chariots élévateurs pour l'industrie et la distribution.
Fabien Bardinet est le directeur général de Balyo depuis 2013 qui automatise les chariots élévateurs pour l'industrie et la distribution. (Crédits : François Daburon)

Entreprendre, c'est l'obsession de Fabien Bardinet, 47 ans. « J'appartiens à une famille d'entrepreneurs de l'agroalimentaire [le groupe Bardinet fondé en 1857 autour du rhum Negrita, Ndlr]. C'est une trajectoire naturelle pour moi», explique le deuxième d'une fratrie de cinq.

Au sortir de l'école de commerce, il passe un an et demi à faire de l'audit dans le cabinet S&W Associés-Exco. Puis vient l'appel sous les drapeaux. Peu attiré par la chose militaire, le jeune homme opte pour la coopération en entreprise. Il est accueilli, en septembre 1996, par le groupe de distribution Cora (propriété de ses oncles paternels, les frères Bouriez) en Hongrie, où l'enseigne vient d'ouvrir une filiale :

« Ça a été une des expériences les plus riches de ma vie professionnelle. Nous avons ouvert le premier hypermarché du pays : sept kilomètres de queue sur l'autoroute et des gens qui se ruent sur des produits qu'ils n'avaient jamais vus. »

Mais il ne reste pas chez Cora, car une règle veut que les Bardinet-Bouriez doivent faire leurs classes ailleurs que dans les entreprises familiales. Désireux de rester à Budapest, Fabien Bardinet rejoint Sofinco (groupe Crédit Agricole) qui s'installe en Hongrie. « Je découvre ce monde du crédit à la consommation au début des années 2000, tandis que mes copains d'école créent des startups Internet », se rappelle le passionné d'aviation, qui pilote dès qu'il en a l'occasion.

Après trois ans à faire de la stratégie et de l'informatique, il se voit proposer par Sofinco de prolonger l'expérience dans un autre pays. Mais entre-temps, il s'est marié et a eu deux enfants (quatre aujourd'hui, âgés de 12 à 19 ans) :

« Je me suis dit : "Si tu repars, tu ne reviendras jamais en France." »

Or, son épouse occupe un emploi à la Banque de France et souhaite rentrer à Paris. C'est chose faite en 2002, le trentenaire rejoint la direction internationale de Sofinco.

Le tour du monde avec le robot Nao

Il rencontre alors, en Pologne, lors d'une mission, le polytechnicien Bruno Maisonnier, qui lui propose quelques semaines plus tard de le rejoindre sur un projet de robotique. « Je me rappelle notre déjeuner à L'Entrecôteboulevard Saint-Germain. J'étais alors membre du conseil d'administration de Sofinco, je gagnais très bien ma vie et j'appréciais mes fonctions. J'ai passé l'après-midi sur Internet pour me renseigner sur les robots et je l'ai rappelé le soir pour lui dire : "Je suis ton homme !" », raconte l'amateur de voile.

Fabien Bardinet rejoint en 2006 Aldebaran Robotics, créateur du fameux robot Nao. S'ensuivent alors six années « extraordinaires », où le duo va présenter son petit robot dans le monde entier.

« Nous nous sommes par exemple retrouvés en 2007 à Atlanta pour participer à la RoboCup, une compétition de robots. La veille au soir, rien ne marchait... Mais nos ingénieurs ont passé la nuit à tout recoder et nous avons gagné », évoque avec émotion l'ancien banquier.

En 2012, Aldebaran est racheté par le japonais SoftBank, et le chemin des deux amis se sépare. Bien qu'il ait quitté Aldebaran épuisé, Fabien Bardinet, qui n'aime pas l'oisiveté, ouvre avec son frère Gilles sur le domaine familial les Cabanes de la Romaningue, douze cabanes dans les arbres pour faire venir les gens sur la propriété viticole.

"La robotique doit avoir un bénéfice social direct : cariste est un métier dangereux (22 morts par an)"

Début 2013, les actionnaires de Balyo lui proposent de devenir le nouveau manager de la société. « Enfin une boîte de robotique qui peut avoir un impact sur le monde » , se dit l'entrepreneur, qui accepte rapidement. L'entreprise a mis au point le système Driven by Balyo qui rend autonomes les chariots élévateurs du groupe allemand Fenwick-Linde. « La robotique doit avoir un bénéfice social direct, ce qui est le cas avec Balyo, car cariste est un métier dangereux - 22 morts par an - et abrutissant », explique le CEO, qui assume de sonner la fin de ce métier avec ses chariots robotisés.

« L'innovation permet de créer plus de richesses en travaillant moins, et c'est une excellente nouvelle. Les robots ne vont pas tuer le travail mais supprimer des emplois à faible valeur ajoutée », affirme ce schumpetérien convaincu.

Balyo a levé 10 millions d'euros en 2015, puis 40 millions d'euros lors de l'introduction en Bourse en 2017, emploie 170 salariés, est présent aux États-Unis et à Singapour, et la société est cotée sur Euronext. L'entreprise compte doubler son chiffre d'affaires de 15 millions d'euros à 30 millions d'euros cette année. La dépense mondiale pour bouger les palettes dans les entrepôts s'élève, selon Balyo, à 200 milliards d'euros par an. Les chariots robotisés permettant 50% d'économie par rapport à un opérateur humain, les perspectives de croissance sont conséquentes pour la pépite française.

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MINIBIO

  • Juillet 1971 : Naissance à Talence (33).
  • 1992 : Diplômé en techniques de commercialisation de l'IUT de Grenoble (38).
  • 1992-1995 : Diplômé de l'Escem (École supérieure de commerce et de management) de Tours (37).
  • Septembre 1996 - décembre 1997 : Service militaire en coopération en Hongrie chez Cora.
  • Janvier 1998 - septembre 2006 : Direction internationale de Sofinco (groupe Crédit Agricole).
  • Mars 2006 - mars 2012 : Directeur des opérations (COO) d'Aldebaran Robotics.
  • Depuis janvier 2013 : Fondateur des Cabanes de la Romaningue.
  • Depuis août 2013 : Directeur général (CEO) de Balyo.
  • Mars 2015 : Levée de fonds de 10 millions d'euros auprès des fonds Robolution Capital et Seventure, de Linde Material Handling et de Bpifrance.
  • Juin 2017 : Introduction en Bourse sur Euronext et levée de 39,80 millions d'euros.

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