Pour Bruxelles, une consolidation du marché des télécoms en France, c'est « non ». C'est ce que rapporte à La Tribune, sous couvert d'anonymat, un opérateur français qui a récemment sondé la Commission européenne à ce sujet. Cette perspective « est complètement inenvisageable », affirme-t-il. Contacté, Bruxelles n'a pas répondu à nos sollicitations.
Cela signifie, concrètement, que la perspective d'une fusion entre SFR avec un de ses rivaux dans l'Hexagone serait, aujourd'hui, impossible. Bruxelles camperait, en clair, sur ses positions - à savoir conserver une forte concurrence dans tous les pays membres, afin de maintenir des prix bas pour le consommateur. Une approche qui fait, depuis bien longtemps, l'objet de vives critiques de la part de nombreux opérateurs européens, qui déplorent l'affaiblissement du secteur tandis que les investissements dans la fibre et la 5G vont crescendo.
Ces derniers mois, la possibilité d'une consolidation en France a pourtant été envisagée. Comme La Tribune l'a indiqué en octobre dernier, les banquiers de Patrick Drahi, le propriétaire d'Altice, la maison-mère de SFR, ont approché Bouygues Telecom et Free pour discuter d'un éventuel rapprochement.
Patrick Drahi cherche aujourd'hui à vendre des actifs pour diminuer l'énorme dette d'Altice France, qui s'élève à 24 milliards d'euros. Le milliardaire est en quête de 3 milliards d'euros pour la raboter, et redevenir plus fréquentable vis-à-vis des marchés et des investisseurs. En novembre dernier, Altice a déjà vendu 257 de ses data centers à la banque d'affaires américaine Morgan Stanley, contre 530 millions d'euros. Une arrivée de cash bienvenue, mais qui ne suffit pas.
Vers une vente d'XpFibre ?
Depuis des semaines, les spéculations vont bon train, dans le petit monde des télécoms, sur les autres actifs qu'Altice France serait disposé à vendre. Il y a SFR en tant qu'opérateur grand public. Si l'opposition de Bruxelles à une consolidation sur le marché de détail interdit, sur le papier, tout mariage avec un Bouygues Telecom ou un Free, rien n'empêche Patrick Drahi de le vendre, ou d'ouvrir son capital, à un acteur extérieur. Il y a aussi la partie dédiée aux télécoms d'entreprises, « laquelle est déjà isolée dans une filiale », souligne un bon connaisseur du secteur. Et il y a également XpFibre, où est logé le réseau de fibre de SFR.
Ce jeudi, le média L'Informé a indiqué que Patrick Drahi a confié « un mandat à la banque d'affaires Lazard en vue de céder cet imposant opérateur d'infrastructures », qui gère 7 millions de prises fibre dans l'Hexagone. Interrogé par La Tribune, SFR n'a pas, pour l'instant, confirmé l'information. Aujourd'hui, Altice France détient 50,01% du capital d'XpFibre. En 2018, le groupe avait cédé 49,99% de son capital à un trio d'investisseurs. Il s'agit des fonds Allianz Capital Partners, Axa Investment Managers Real Assets et Omers Infrastructure. A l'époque, la transaction valorisait XpFibre, qui s'appelait alors SFR FTTH, à 3,6 milliards d'euros.
Un mur de dettes à repousser
Depuis XpFibre a fait des petits, et a accéléré le déploiement de la fibre en France. D'après une source proche du dossier citée par L'Informé, Patrick Drahi souhaiterait « accrocher une valorisation de l'ordre de 10 milliards d'euros ». Ce qui permettrait à Altice d'encaisser un gros chèque, et sans doute de lever les inquiétudes sur sa dette.
Patrick Drahi cherche à repousser un mur de dettes qui se rapproche dangereusement. En décembre dernier, Altice France a mené une opération de refinancement en levant 350 millions d'euros sur les marchés obligataires. Le groupe a précisé que cette manne servira à racheter une partie de sa dette arrivant à échéance en 2025. Sachant qu'avant cette opération, Altice France devait rembourser, à cette date, pas moins de 1,65 milliard d'euros. Il n'empêche que, comme La Tribune l'a expliqué, le coût total de cette émission obligataire s'est avéré très élevé, à hauteur de 12,5%.
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