Comprendre par soi-même ses investissements en Bourse

Le néophyte en matière de marchés financiers ne peut qu'être dans l'expectative face à toutes les propositions commerciales qui lui sont offertes pour placer son épargne. Raison pour laquelle il a tout intérêt à prendre les choses en main à l'instar de Cécile, membre du club de L'Investisseur Français (*), qui tient un instructif journal d'investisseuse qu'elle fera partager régulièrement aux lecteurs de La Tribune.

En ce début d'année, comme toujours à la même époque, les pages financières de nos journaux se noircissent de conseils d'investissement en tout genre.

Malgré (ou à cause) du contexte de taux bas persistants, la publicité nous présente "les meilleurs produits de rendement" et nous promet la recette magique pour "booster notre épargne" (à 3% par an !), quand sur d'autres tribunes se succèdent les "gérants" qui nous incitent à aller "chercher du risque".

Il y a quelques années, je lisais tous ces articles et j'écoutais tous ces gérants, dans l'espoir qu'ils m'aideraient à comprendre quelque chose aux marchés financiers, et à décider de ce que j'allais faire de mon cash qui s'accumulait, improductif, sur des comptes courants et autres livrets d'épargne...

Plus je lisais, moins j'y comprenais quoi que ce soit. Je ne me sentais absolument pas plus avancée qu'avant, et laissais mon cash là où il était : en hibernation.

 Alternatives insatisfaisantes

Il m'arrive encore aujourd'hui de lire l'un ou l'autre de ces articles, avec le secret espoir que le contenu a changé et qu'il est devenu plus utile. Hélas, je ne vois toujours rien de vraiment clair et didactique, qui donne envie et confiance, ni de vraies clés pour prendre ses investissements en main.

Pour la plupart, ces articles et interventions sont des promotions à peine déguisées pour les produits de l'industrie financière. On sait d'avance de quoi il va être question : d'assurances-vie en unités de compte (plus rentables pour les assureurs que les bons vieux fonds euros) ; de SCPI et de leurs frais d'entrée, de sortie, de gestion tout sauf anecdotiques ; et un peu aussi d'actions, auréolées de mystère et de risque (mais alors sous forme de trackers, de fonds, ou de gestion déléguée - des formules très rémunératrices pour les gens qui les vendent).

Je lis tout cela et je pense à l'épargnante que j'étais, désemparée, contemplant cette montagne qui me paraissait impossible à grimper, mais à laquelle j'avais pourtant envie de m'attaquer.

Quel dommage qu'on ne propose rien d'autre à cet épargnant ou cette épargnante... Il y a pourtant tant de choses intéressantes à dire pour lui faire comprendre qu'il est possible, et même souhaitable (sauf pour tous les intermédiaires qui s'enrichissent en profitant de sa timidité) qu'il (ou elle) prenne la gestion de ses économies en main.

Il est vrai que la gestion "en direct" (c'est ainsi que l'ont étiquetée les gens avec quelque chose à vendre) est complètement passée de mode. Vous voulez acheter des obligations ? Investissez dans un fonds euros.

Les actions vous tentent ? Prenez une assurance-vie en unités de compte et choisissez votre profil d'investisseur - vous avez le choix, soit la gestion déléguée où des gestionnaires allouent vos fonds en fonction de vos critères de risque/sécurité, ou bien la gestion pilotée par vous, où vous pouvez choisir entre des dizaines de fonds et panacher selon des critères sectoriels, géographiques, avec une petite touche de matières premières si cela vous chante...

Ou bien, à la rigueur, ouvrir un compte-titres et faire des investissements réguliers sur une sélection diversifiée de trackers et autres ETFs.

Pourquoi ces conseils ne me satisfont-ils pas ?

Epargne et autonomie confisquées

D'abord, on vous fait passer pour simple quelque chose qui est en réalité extrêmement compliqué. Qu'y avait-il de plus simple et démocratique qu'une obligation détenue en direct jusqu'à l'échéance ? On savait combien on mettait sur la table, combien on allait toucher chaque année, et qu'on avait de grandes probabilités de retrouver son capital à la fin si on avait fait preuve d'un minimum de vigilance lors de la souscription.

C'était l'investissement bon père de famille par excellence - or, il est aujourd'hui hors de portée des particuliers, et totalement annexé par les institutionnels.

Pour se constituer un portefeuille obligataire diversifié en direct, il faut un capital de départ conséquent, et de toute façon en achetant par petits lots on est pénalisé dès le départ (on paie plus cher). Et je ne parle même pas de la fiscalité française ultra dissuasive... Bref, point de salut hors des fonds euros. La bonne affaire pour les gens qui les vendent !

Comme les rendements des fonds euros baissent constamment, revoici à l'offensive les contrats en unités de compte dans lesquels vous pouvez, pour "dynamiser" votre épargne, ajouter un poil ou plus d'actions. Simple, l'assurance-vie en unités de comptes ? Mais comment peut-on avoir la moindre idée de ce qu'on a acheté par ce biais ? C'est déjà difficile de se faire une idée de ce qu'il y a dans un fonds, mais dans des dizaines de fonds différents !

Qui a le temps de lire les prospectus de tous ces fonds afin de prendre une décision éclairée sur la répartition qu'il va donner à son épargne ? Donc, concrètement, que fait l'épargnant moyen ? Il regarde les niveaux de risque, les rendements prospectifs, prend un peu de ceci, un peu de cela, fait sa petite soupe au pifomètre, fait une petite prière et s'empresse ensuite d'oublier le tout, soulagé qu'il est d'avoir pris une décision. Phil Fischer avait parfaitement décrit le processus.

Comment peut-on oser faire croire au public qu'il s'agit là d'investissement ? C'est au mieux de la divination... Et le niveau de risque encouru est absolument impossible à évaluer.

Ensuite, ce qui me déplaît avec ces formules d'investissement "passif", c'est qu'elles nous éloignent de nos investissements. N'est-ce d'ailleurs pas l'intention des gens qui nous les vendent, pour ainsi mieux nous contrôler (nous embobiner) ?

Entrepreneuriat, bon sens et passion

Plus ce dans quoi on investit est complexe, moins c'est concret, et plus il est difficile de s'y intéresser. Or, il me semble qu'à partir du moment où on s'intéresse à ce dans quoi on investit, on limite déjà les risques de faire des bêtises.

N'est-il pas plus simple, en effet, d'investir directement dans les actions d'entreprises cotées en bourse, des entreprises réelles, concrètes, dont on peut apprendre à déchiffrer les comptes, à comprendre l'activité et à dessiner les perspectives ?

Pour moi, c'est infiniment plus simple et intéressant que d'acheter des produits affublés d'acronymes tous plus opaques les uns que les autres, et qui sont autant de boîtes noires !

Acquérir des actions, des titres de propriété d'entreprises, voilà une manière qui (selon moi) reste très démocratique de mettre ses économies au travail. Par exemple, une action Apple coûte moins de cent euros actuellement. Il y a un peu de frais d'acquisition, mais depuis l'avènement des courtiers en ligne, ceux-ci sont très raisonnables.

Si vous me demandez, je préfère être actionnaire (propriétaire) d'Apple que de me faire refourguer des produits incompréhensibles et chargés en frais !

Acheter des actions, c'est s'embarquer dans une aventure entrepreneuriale passionnante, qui vous permet de devenir acteur, et non plus spectateur, de ce monde économique fascinant . C'est pourquoi j'ai moi-même entamé un parcours d'investisseuse il y a environ deux ans et demi.

Bien sûr, la bonne fortune est tout sauf garantie. Il y a beaucoup de choses à apprendre, mais c'est tellement moins compliqué qu'on le croit.

>> (*) Pour aller plus loin, retrouver toutes les analyses de L'Investisseur Français sur son site.

L'Investisseur français logo avec cédille

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Commentaire 1
à écrit le 09/02/2016 à 11:40
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"sauf pour tous les intermédiaires qui s'enrichissent en profitant de sa timidité" Oui mais pas que, le problème du petit actionnaire en néolibéralisme est que quand les actionnaires milliardaires décident de récupérer leurs marges sur actions il ...

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