L'UE déterminée à aller de l'avant, sans les Britanniques

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Les vingt-sept veulent consolider l'avenir de l'ue[reuters.com]
(Crédits : Eric Vidal)

par Elizabeth Pineau et Jean-Baptiste Vey

BRUXELLES (Reuters) - Les dirigeants européens réunis pour la première fois depuis la victoire du Brexit au Royaume-Uni ont pris acte du départ annoncé des Britanniques de l'Union européenne, qui entend laisser Londres supporter les conséquences, notamment économiques, de ce choix historique.

Après un dîner à 28 mardi soir, le dernier du Premier ministre britannique sortant David Cameron, les Vingt-Sept se sont retrouvés mercredi à Bruxelles pour consolider l'avenir d'une Union déterminée à aller de l'avant.

"Rien ne doit empêcher l'Europe d'avancer, et sûrement pas la décision que les Britanniques ont prise, qui doit être respectée mais qui, plutôt que de nous entraver, nous empêcher, doit nous stimuler et nous obliger au sursaut indispensable", a résumé François Hollande devant la presse.

Un premier rendez-vous est pris pour la mi-septembre à Bratislava, où devraient être actées des mesures concrètes liées aux priorités désormais affichées : protection des citoyens, croissance et emploi, renforcement de la zone euro et jeunes, massivement invités à étudier dans des pays de l'Union.

Si les Vingt-Sept ont dit respecter la décision britannique, nombre d'entre eux ont aussi reproché à David Cameron d'avoir creusé sa propre tombe en participant au "Bruxelles bashing" en vogue depuis des dizaines d'années outre-Manche. "Ne soyez pas surpris que vos concitoyens vous croient", lui a lancé Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne.

"NOUS NE TOURNERONS PAS LE DOS À L'EUROPE", DIT CAMERON

"La Grande-Bretagne quittera l'Union européenne mais nous ne tournerons pas le dos à l'Europe", a dit pour sa part le chef du gouvernement britannique, qui quittera son poste au plus tard le 9 septembre.

L'initiateur du référendum du 23 juin a expliqué que son pays voulait trouver la meilleure forme de partenariat possible avec l'UE, jugeant toutefois impossible d'avoir "tous les bénéfices sans coûts", contrairement à ce qu'avaient laissé entendre les partisans de la sortie de l'Union.

Cameron a confirmé qu'il laisserait le soin à son successeur au 10, Downing Street d'activer l'article 50 du traité européen de Lisbonne, déclencheur du processus de négociations formelles.

Particulièrement ferme envers Londres, François Hollande a répété qu'un futur accès du royaume au marché intérieur européen impliquerait qu'il accepte les quatre libertés de circulation européennes - biens, services, capitaux et personnes.

"Il ne peut pas y avoir de dérogation. On ne peut pas prendre trois libertés et en écarter une quatrième, notamment la liberté de circulation", un des principaux moteurs de la campagne britannique pour la sortie de l'Union, a dit le président, qui retrouvera David Cameron vendredi dans la Somme.

Sans la liberté de circulation, pas de "passeport" européen non plus pour les établissements financiers britanniques, a-t-il répété mercredi, en invitant les places européennes à récupérer les activités de compensation en euro aujourd'hui effectuées à Londres.

François Hollande a également souhaité l'assouplissement des règles européennes de la concurrence pour que l'Europe puisse créer des champions mondiaux.

Du président du Conseil européen, Donald Tusk, à la chancelière allemande, Angela Merkel, en passant par Jean-Claude Juncker, les dirigeants européens ont affirmé qu'aucune négociation ne pourrait débuter avec Londres avant la notification du départ du pays de l'UE.

"Ils ont dit 'pas de négociation sans notification' mais je ne crois pas que cela exclut les discussions qu'un nouveau Premier ministre peut avoir avec ses partenaires ou avec les institutions pour que nous repartions du bon pied", a dit David Cameron mercredi devant le Parlement britannique.

L'ÉCOSSE VEUT RESTER DANS L'UNION

Le Premier ministre néerlandais Mark Rutte, dont le pays assure la présidence semestrielle tournante de l'UE, a estimé lui qu'il fallait peut-être laisser le temps au Royaume-Uni de se remette du choc de jeudi dernier. "L'Angleterre s'est effondrée politiquement, monétairement, constitutionnellement et économiquement. Il n'est pas raisonnable d'exiger d'eux qu'ils déclenchent l'article 50", a-t-il dit.

La Première ministre écossaise, Nicola Sturgeon, était mercredi à Bruxelles pour dire la détermination de son peuple à rester dans l'UE. Jean-Claude Juncker lui a répondu que l'Union, bien qu'attentive à son égard, n'avait aucune intention d'interférer dans le processus politique britannique.

François Hollande a confirmé que la négociation allait s'ouvrir avec le Royaume-Uni et non avec l'Ecosse, tandis que l'Espagne, qui craint les vélléites d'indépendance de la Catalogne, a fait savoir qu'elle s'opposait fermement à l'ouverture de négociations.

Autre signe de la nervosité politique outre-Manche, Jeremy Hunt, ministre britannique de la Santé et candidat à la succession de Cameron, a évoqué quant à lui un deuxième référendum sur le maintien dans l'Union si Bruxelles autorise Londres à contrôler totalement ses frontières, ce qui semble pour l'instant exclu.

(Jean-Baptiste Vey et Elizabeth Pineau, avec le bureau européen de Reuters, édité par Yves Clarisse)