Transition écologique : les entreprises de taille intermédiaire réclament un choc de « compétitivité verte »

L'organisation patronale représentant les entreprises de taille intermédiaire (METI) souhaite mettre un coup d'accélérateur sur les investissements verts. Elle appelle notamment à réduire la fiscalité sur ces derniers. Les dirigeants formulent des propositions alors que le gouvernement planche actuellement sur une loi industrie verte.
Grégoire Normand
(Crédits : Reuters)

Sécheresses hivernales, pénurie d'eau, températures anormalement clémentes, fonte des glaciers... La France entame le printemps 2023 dans des conditions climatiques tendues. Et l'Hexagone est loin d'être le seul pays concerné par le réchauffement. Dernièrement, le GIEC a dévoilé une synthèse de ses travaux s'étalant sur les huit dernières années particulièrement alarmante. Les scientifiques ont adressé un ultimatum aux chefs d'Etat afin d'accélérer la transition pour s'assurer « un futur durable ».

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Dans ce contexte brûlant, les entreprises ont un rôle crucial à jouer dans les prochaines années pour limiter les répercussions du réchauffement climatique. Le gouvernement devait d'ailleurs présenter son projet de loi sur l'industrie verte initialement prévu ce lundi 27 mars, en présence des ministres Roland Lescure (Industrie), Christophe Béchu (Ecologie) et Bruno Le Maire (Economie). Mais Bercy a reporté pour « des raisons d'agenda ».

Une évolution du cadre réglementaire

Le mouvement des entreprises de taille intermédiaire (METI), vient de dresser un état des lieux particulièrement documenté sur les chantiers et les risques à mener dans les prochaines années. Résultat, l'inflation pourrait menacer la transition. Les dirigeants interrogés évoquent « un mur des coûts » lié à la flambée des prix et des matières premières.

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Ils soulignent également l'évolution du cadre réglementaire (loi Climat et Résilience, directive européenne sur le reporting extra-financier).

« Ces freins méritent d'être levés sans délai, car notre étude valide une intuition : la transformation environnementale de notre économie passe par celle des ETI », affirme Pierre-Olivier Brial, vice-président du METI.

Il réclame notamment « un choc de compétitivité verte ».

Baisser la fiscalité pour faciliter l'investissement

Face à cette envolée des prix et de la somme colossale des investissements à venir, le METI réclame, sans surprise, une baisse de la fiscalité. « Les ETI ne pourront pas réaliser les investissements nécessaires sans la confirmation et la poursuite de l'alignement compétitif du site France sur la moyenne européenne », explique-t-il.

Sur ce point, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a confirmé ces derniers mois la poursuite de la politique de l'offre mise en oeuvre pendant le premier quinquennat Macron. Les entrepreneurs font pression pour jouer sur le levier de la fiscalité de production ou le coût du travail qualifié notamment.

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Sur le volet fiscalité, le projet de loi sur l'industrie verte, actuellement en préparation à Bercy, pourrait s'attaquer au crédit d'impôt recherche défendu par une large partie du patronat. Le rapporteur du texte, le député Renaissance Guillaume Kasbarian a affirmé qu'il ne s'interdisait pas d'étudier le chantier du verdissement du crédit d'impôt recherche (CIR), trouvant « légitime d'étudier absolument toutes les pistes, y compris sur des dispositifs existants qui font l'objet de débats » lors d'une récente réunion organisée à Bercy.

Des bons points dans les efforts de baisse de gaz à effet de serre...

Les scientifiques ont amplement documenté le rôle des émissions de gaz à effet de serre (GES) dans le réchauffement climatique. Sur ce sujet, les entreprises de taille intermédiaire de plus de 500 salariés font figure de bons élèves. D'après l'enquête, 90% d'entre elles ont réalisé ou prévu un bilan des émissions de GES.

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Parmi ces entreprises, 76% ont pris en compte les scope 1,2 et 3, c'est-à-dire les émissions directes et les émissions indirectes. En revanche, il reste des efforts à fournir pour les entreprises de moins de 500 salariés. Seules 65% d'entre elles ont déjà réalisé un bilan des émissions. Même si la réglementation ne les y oblige pas actuellement, l'accélération du dérèglement climatique devrait presser les pouvoirs publics à serrer la vis dans les années à venir.

Du retard sur les énergies renouvelables

Sur la consommation d'énergie, 92% des directions interrogées ont affirmé qu'elles avaient mis en œuvre, ou prévoient de mettre en place un plan de réduction. Il faut dire que la guerre en Ukraine a propulsé les prix de l'énergie fossile vers des sommets en 2022. L'année 2023 devrait marquer un ralentissement dans l'énergie en Europe. Toutefois, de nombreux experts s'accordent à dire que les prix dans l'énergie pourraient rester à des niveaux bien plus élevés en raison de la raréfaction de certaines ressources notamment.

Sur le chauffage par exemple, 38% des dirigeants interrogés affirment qu'ils ont recours à des énergies non carbonées. Autre résultat intéressant, 33% indiquent qu'ils ont recours à de l'autoproduction via des énergies renouvelables. Il s'agit principalement du photovoltaïque dans 90% des cas. Ce recours aux énergies renouvelables doit cependant être nuancé. En effet, l'autoproduction ne représente qu'une part infime de la consommation totale d'énergie (5% en moyenne).

Du retard aussi dans la gestion des déchets, le transport et  la biodiversité

Beaucoup d'ETI accusent aussi un sérieux retard dans la gestion des déchets. Seuls 42% des ETI interrogées recyclent leurs déchets. Les dirigeants évoquent notamment l'absence de filières de valorisation (46%), la complexité de gestion (37%) ou encore le manque d'infrastructure de récupération (32%).

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L'autre levier à activer en urgence pour les ETI concerne les transports. Une très grande majorité du transport de marchandises se fait par les voies routières (78%). A l'opposé, le fret fluvial ou ferroviaire est clairement délaissé par les entreprises moyennes pour le transport de marchandises.

Une des raisons avancées est que le transport utilisé est fortement externalisé pour des raisons de coût notamment. Le choix de ces prestataires ne répond pas forcément à des critères environnementaux. Enfin, la biodiversité est clairement dans l'angle mort des stratégies des entreprises. Ainsi, 72% de ces établissements ne possèdent pas encore de plan visant à réduire leur impact sur la biodiversité largement menacée. Autant dire que le chemin pour un verdissement complet des modes de production s'annonce périlleux.

(*)Pour rappel, les entreprises de taille intermédiaire sont des établissement ayant entre 250 et 5.000 salariés. Elles doivent réaliser un chiffre d'affaires inférieur à 1,5 milliard d'euros.

Grégoire Normand
Commentaires 3
à écrit le 25/03/2023 à 10:59
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ce sont les entreprises qui sont responsables de la catastrophe environnementale, et elles demandent l'aide publique pour pouvoir changer. ces entreprises qui n'ont pas arrêté de dénigrer agressivement l'Etat et les gouvernements. quelle bassesse.

à écrit le 25/03/2023 à 10:50
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Bonjour, Les entreprises intermédiaires, ons depuis un certaines temps des aides d'etats ... mais l'emplois ne se développe pas vite , n'y les salaires d'ailleurs... Par compte les bénéfices sont en expansion... Donc , ils vas falloir revoir les...

à écrit le 24/03/2023 à 18:20
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Quelle hypocrisie, cette obsession européenne pour le vert. Déjà, si la France était verte, elle n'aurait pas organisé les jeux olympiques de 2024, source énorme de pollution

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