Stockage d'électricité : Nanomakers veut doubler l’autonomie de nos batteries

Essaimage du CEA en 2010, Nanomakers a déjà levé 7,5 M€ en toute discrétion. Et pourtant sa technologie pourrait bien changer nos vies en doublant la capacité des batteries lithium-ion. Explications avec Jean-François Perrin, son PDG.

Cleantech Republic : Comment se porte le marché des batteries Li-ion ?

François Perrin : Très bien... Du moins d'un point de vue commercial, puisque ces batteries dominent largement le marché grâce aux appareils mobiles et aux véhicules électriques ou hybrides. Elles n'ont pas à ce jour de véritable challenger à court ou moyen terme. Toute la filière mène donc une R&D intense pour les faire progresser : durée de vie, encombrement, sécurité, et surtout autonomie. Et c'est au niveau de l'anode que le gisement d'amélioration se trouve. En remplaçant le graphite des anodes par du silicium, on décuple - en théorie du moins - la capacité de stockage. Pour simplifier, le silicium permet de retenir 10 fois plus d'ions lithium que le carbone lors de la charge.

Et en pratique ?

C'est effectivement plus compliqué car le remplacement du carbone par du silicium pose deux difficultés majeures. D'abord l'oxydation, qui réduit rapidement la capacité de stockage (les « places » des ions lithium sont prises par des atomes d'oxygène), mais surtout le « cracking ».Lors de la charge, le silicium gonfle - jusqu'à 4 fois son volume initial - ce qui occasionne des fissures, et rapidement la destruction de l'anode. Nous avons donc eu l'idée en 2012 de recouvrir les particules de silicium d'une couche de carbone. Elle offre une protection contre la contamination par l'oxygène et renforce la tenue mécanique. Nous sommes actuellement les seuls au monde à proposer industriellement ce « coating » qui permet au final, de doubler l'autonomie des batteries Li-ion à encombrement et coûts égaux.

Une technologie née en 2012... Quand pourrons-nous en profiter dans nos téléphones ?

En réalité notre process fonctionne depuis le début! Mais nous sommes très en amont dans la chaîne de valeur. Nos clients et les clients de nos clients doivent tout d'abord intégrer et assimiler notre technologie innovante. C'est une étape tout à fait normale et incompressible. Cependant, nous produisons et vendons déjà nos nanopoudres pour les tests et qualifications en cours chez nos futurs clients, avec lesquels nous exploitons les retours d'expérience pour améliorer et/ou modifier nos produits. Quand à la disponibilité dans votre téléphone, il va falloir encore patienter encore un peu... Disons pour Noël 2018.

Allez-vous produire vous-même ?

Essentiellement, même s'il est probable que nous proposerons à terme des licences de production à nos plus gros clients. Notre modèle économique reste clairement la production et vente de nos produits. Le réacteur de production par pyrolyse laser que nous avons conçu est déjà de dimension industrielle et peut générer entre 10 et 20 tonnes de nano-poudre par an. Nous produisons aujourd'hui quelques centaines de kilos par an pour un client dans un autre domaine (ndlr : l'amélioration des performances de joints élastomères très hautes performances pour l'industrie des semi-conducteurs). Cela nous permet de renforcer notre expérience industrielle. A moyen terme, notre site de Rambouillet pourra accueillir une quinzaine de réacteurs, soit jusqu'à 300 tonnes/an, ce qui est déjà très significatif. Il faudra néanmoins financer ces appareils qui coûtent près de 2 millions d'euros pièce...

Vous allez nous parler de levée de fonds...

Nous cherchons effectivement 5 millions d'euros pour financer le co-développement des produits avec nos clients et partenaires académiques (ndlr : Nanomakers travaille encore avec le CEA, et de nombreux laboratoires universitaires), notre R&D interne, et surtout le développement de l'outil industriel pour lequel nous allons notamment embaucher des ingénieurs et docteurs dans les domaines des matériaux et du génie des procédés. Nous sommes confiants car nous avons véritablement une grande avance technologique, industrielle et commerciale, sur un marché considérable et mondial, estimé à 40 milliards de dollars en 2020. Avis aux investisseurs !

Nanomakers en bref...

  • Création : 2010
  • Propriété intellectuelle : 5 brevets en propre + droits d'exploitation exclusifs sur une dizaine de brevets CEA
  • Effectifs : 7 (20 fin 2016)
  • Implantations : France et une filiale au Japon
  • Références : Daikin, Greene Tweed
  • Partenaires de co-développement : Panasonic, LG Chem, GS Yuasa, Samsung, Toshiba ...
  • Chiffre d'affaires : 550 k€ en 2015 ; 1,5 M€ en 2016 (prévisionnel)
  • Financement : 7,5 M€ entre 2010 et 2014 (A Plus Finance, CEA-Investissement, Family offices et Business-angels)

Cleantech Republic

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Commentaires 2
à écrit le 19/01/2016 à 0:04
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IL Y A AUSSI DES POSIBILITES DE FAIRE DE L ECTRICITE HYDROLIQUE AVEC LES TERRES INONDABLES AVEC LE FLUES ET LE REFLUE DES MAREES???

à écrit le 18/01/2016 à 23:42
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DEPUIS LONGTENT JE PARLE DE STOKAGE DE L ENERGIE ELECTRIQUE DANS CETTE TRIBUNE ? JE SUIS CONTENT DE VOIR QUE LES SCIENTIFIQUES ET LES INDUSTRIEL SI INTERESSENT ? MAIS UN JOUR ON REVOLUTIONNERAS LE PROBLEME DES ERNERGIES AVEC DES METHODES DE STOKAGE D...

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