Énergies renouvelables : le plan de la France pour enfin rattraper son retard

L'exécutif prévoit une loi d'exception, valable pendant toute la durée du quinquennat, pour développer à vitesse grand V les projets photovoltaïques et les éoliennes en mer, domaines dans lesquels la France accuse un retard patent. Une consultation vient d'être lancée. Le texte doit être présenté en Conseil des ministres à la rentrée, avant d'être soumis au Parlement en octobre.
(Crédits : Wikimedia Commons : Martin Doppelbauer)

L'évaluation est sans appel. Dans la matière "énergies renouvelables", la France est mauvais élève. En plus d'accuser un net retard sur la trajectoire qu'elle s'est fixée, elle est le seul parmi les 27 Etats membres de l'Union européenne à avoir manqué son objectif fixé par une directive européenne. En 2020, la part des énergies renouvelables dans la consommation finale brute d'énergie du pays n'atteignait ainsi que 19%, bien loin des 23% attendus.

Face au contexte très tendu de la guerre en Ukraine, qui pourrait mettre en péril l'approvisionnement énergétique du pays, l'Hexagone entend enfin rattraper son retard. Vendredi dernier, le gouvernement a donné le coup d'envoi d'une "large consultation" autour du projet de loi d'accélération des énergies renouvelables promis par le président Emmanuel Macron, pour une présentation du texte en Conseil des ministres en septembre prochain, avant d'être soumis au Parlement le mois suivant.

Lancement d'une "large consultation"

Pour le gouvernement, ce texte est aussi le moyen de montrer qu'il s'attaque à la lutte contre le changement climatique, alors que l'été des Français a été marqué par des vagues de canicule à répétition et des semaines de sècheresse. En juin dernier, le Haut conseil pour le climat, qui fait référence pour évaluer l'action du gouvernement en la matière, jugeait d'ailleurs que la France faisait toujours face au risque majeur de manquer ses objectifs et appelait l'exécutif à un sursaut.

Très concrètement, le texte, dans sa rédaction actuelle, comprend 20 articles visant à simplifier par tous les moyens les démarches administratives pour déployer à vitesse grand V les panneaux solaires et les éoliennes en mer, moins celles sur terre pour lesquelles le président Emmanuel Macron a partagé, à plusieurs reprises, ses réticences.

Dans le détail, il comprend "une série de mesures à la fois exceptionnelles et transitoires pour accélérer les procédures de développement des énergies renouvelables", en réduisant notamment les délais de recours paralysants, afin de répondre "aux urgences actuelles sur l'approvisionnement et notre capacité à atteindre nos objectifs renouvelables", a indiqué Matignon, lors d'une conférence de presse téléphonique.

Raccourcir les procédures

"Il faut en moyenne 5 ans de procédures pour construire un parc solaire nécessitant quelques mois de travaux, 7 ans pour un parc éolien et 10 ans pour un parc éolien en mer, explique l'exécutif dans l'exposé des motifs du projet de loi accélération. Nos partenaires européens vont souvent deux fois plus vite que nous pour déployer les moyens de production d'énergie renouvelable. Nous devons donc aller beaucoup plus vite", rapporte Le Figaro, qui a pu consulter ce projet de loi.

Des mesures spécifiques se concentreront sur les filières du photovoltaïque et de l'éolien en mer, deux axes prioritaires de la politique énergétique d'Emmanuel Macron. Le chef de l'Etat vise de manière très ambitieuse 40 gigawatts (GW) à l'horizon 2050 de capacité installée grâce aux moulins des mers géants (soit environ 50 parcs éoliens), et une multiplication par dix de la puissance installée des panneaux solaires (c'est-à-dire environ 100 GW) dans le même horizon.

Elargir les surfaces disponibles et simplifier les débats publics

Pour le photovoltaïque, "l'idée c'est d'aller chercher à obtenir toutes les surfaces foncières disponibles en France", afin d'"élargir les surfaces" d'installation possibles, précise Matignon. Selon Le Figaro, l'objectif est de libérer 10 GW de solaire grâce à l'élargissement de l'obligation de construire des ombrières de parking avec panneaux solaires. L'Etat espère obtenir 4,5 GW supplémentaires grâce à la libération de terrains auparavant interdits aux panneaux solaires, comme le long des routes et des autoroutes et sur des terrains en friche dans des zones portuaires.

Quant aux éoliennes offshore, où la France est très en retard par rapport à ses voisins européens avec la production de ses premiers électrons depuis cet été seulement, l'exécutif prévoit un seul et unique grand débat public pour toute une façade maritime. Fini donc les débats publics pour chaque projet de parc.

Réduction sur la facture d'électricité

Le dernier volet de ce texte concerne le partage de la valeur générée par ces installations avec leurs riverains et la grande question de l'acceptabilité de ces infrastructures, qui constitue un frein majeur à leur développement. "L'idée, c'est que ces énergies renouvelables génèrent un certain nombre de revenus et que ces revenus pourraient être redistribués aux personnes qui sont directement concernées par une présence visuelle de ces moyens de production", a détaillé Matignon.

Toujours selon les informations du Figaro, l'avant-dernier article du projet de loi prévoit ainsi d'octroyer un tarif réduit de l'électricité aux voisins de centrales solaires ou de parcs éoliens. "Cet article vient ainsi créer une modalité de partage territorial de la valeur des renouvelables avec les ménages résidents via leur facture d'électricité", explique l'exécutif dans l'exposé des motifs du projet de loi.

Jusqu'à présent, le partage de la valeur demeurait indirect. En effet, les développeurs des projets éoliens et solaires reversent des taxes locales aux communes où ils sont implantés, permettant ainsi aux collectivités de financer de nouvelles infrastructures pour leurs concitoyens. Ces derniers ont aussi aujourd'hui la possibilité d'investir dans ces projets par le biais de plateformes de financement participatif.

D'autres mesures d'urgence pour l'hiver prochain

"Ce projet de loi ne jouera certes pas un rôle majeur pour l'hiver prochain, mais plutôt pour les suivants", reconnaît-on au sein du gouvernement. La guerre en Ukraine provoque de vives tensions sur le plan énergétique entre Moscou et les pays occidentaux. Les Vingt-Sept se préparent ainsi à l'éventualité de passer l'hiver prochain sans gaz russe. Dans cette course contre la montre pour trouver des alternatives au gaz russe, les énergies renouvelables présentent un avantage majeur. Elles sont très rapides à développer, notamment le photovoltaïque, contrairement à d'autres solutions décarbonnées comme les centrales nucléaires, qui nécessitent au moins une dizaine d'années avant de voir le jour.

Dans ce contexte, le gouvernement avait présenté fin juillet une palette de mesures d'urgence pour venir en aide aux projets d'énergies renouvelables, dont la viabilité était menacée par l'inflation. Au total, ces mesures non législatives et complémentaires au projet de loi d'exception doivent débloquer entre 10 et 11 GW de capacités.

Les exigences environnementales allégées

Selon les informations du Figaro, le projet de texte prévoit d'alléger les exigences environnementales imposées aux petits projets solaires et éoliens. L'article 6 du texte permettrait, par ailleurs, dans le contexte de la crise énergétique, de déroger à la protection des espèces protégées et ainsi de réduire le nombre de contentieux.

(Avec AFP)

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Commentaires 30
à écrit le 21/08/2022 à 10:50
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Du grand n'importe quoi, pour masquer l'incurie de ceux qui nous ont gouvernés depuis 15 ans et nous gouvernent aujourd'hui. Espérons que les Sages (le Conseil constitutionnel) jouera les garde-fous : - tout contentieux doit pouvoir utiliser deux ...

le 23/08/2022 à 13:01
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Vous n’êtes pas au courant que le premier degré de juridiction, le tribunal administratif a été supprimé en 2018 pour le contentieux éolien terrestre? Loi de Rugy…mais peut-être veulent-ils supprimer tout recours aux citoyens, vive la démocratie dans...

à écrit le 18/08/2022 à 16:08
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Dans le cas du Parc Éolien des quatre Seigneurs près de Nozay qui en l'absence , depuis plusieurs années, de solutions malgré de nombreuses études, rapports, expertises, qui sert d'argument aux "anti-tout" comment se fait-il qu'Enedis, Entreprise ind...

à écrit le 18/08/2022 à 15:29
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Et si les principaux problèmes ressentis et constatés, depuis l'implantation du parc éolien des quatre Seigneurs à proximité de Nozay, Saffre et Puceul (communes de Loire-Atlantique) ne venaient pas directement des éoliennes mais de l'évacuation, du ...

à écrit le 16/08/2022 à 16:05
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Bonjour, des plans s'est bien ... Les mettre en application s'est beaucoup mieux.... Car des milliards sont souvent détourner et les résultats sont rarement à.... Bien sûr ils ne faut pas le dire...

à écrit le 15/08/2022 à 23:32
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Sous investissement pendant des années dans toutes les solutions énergétiques dont nucléaire, cantrale houlomotrice, etc. Industrie laissé en déshérence par manque de volonté politique comme le solaire maintenant fabriqué à 80% en chine, les hollanda...

à écrit le 15/08/2022 à 15:50
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L'Etat achète les riverains pour accélérer les procédures... quel exemple ! Bien sur ça ne marche qu'avec des riverains pauvres... qui récupérerons les nuisances donc...

à écrit le 15/08/2022 à 13:02
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Quelques erreurs surprenantes dans cet article. Au premier chapitre, on parle de " consommation finale brute d'énergie du pays". Il ne s'agit pas de consommation finale brute d'énergie mais uniquement de la consommation d'électricité qui ne représen...

à écrit le 15/08/2022 à 8:31
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Que de belles paroles en ce jour de l'assomption : lancer une "large consultation", "simplifier par tous les moyens les démarches administratives", "raccourcir les procédures" ... Mais c'est oublier que le réglementarisme français est le plus comp...

à écrit le 15/08/2022 à 8:16
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La France est en retard ? Par rapport à l'Allemagne ? Heureusement !------------L'Allemagne, qui ne s'embarrasse pas de procédures administratives longues a arrêté immédiatement son nucleaire à la suite du tsunami japonais . Ils auraient du prendre l...

le 15/08/2022 à 10:38
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L’Allemagne est tellement en avance qu’elle a besoin du charbon et du gaz bien plus que la France pour faire tourner son économie ! Quand au principe de réalité les centrales nucléaires vont être prolongées malgré ou avec l’ assentiment des écolos.

à écrit le 15/08/2022 à 6:01
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<Toujours la même façon de faire : s'attaquer aux conséquences et non aux causes. De 1990 (deux ans après le moyen âge) à 2020 nous avons doublé notre consommation d'électricité, bientôt, en 2040 nous aurons triplé notre consommation depuis 1990.. A...

à écrit le 15/08/2022 à 6:00
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<Toujours la même façon de faire : s'attaquer aux conséquences et non aux causes. De 1990 (deux ans après le moyen âge) à 2020 nous avons doublé notre consommation d'électricité, bientôt, en 2040 nous aurons triplé notre consommation depuis 1990.. A...

à écrit le 15/08/2022 à 0:26
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Je pose la question du choix du titre. Les énergies 'renouvelables" en dehors de l'hydroélectricité ne marchent pas et coutent très cher. Il n'y a aucun problème à être en retard, c'est même plutôt bon signe. Avec l'argent gaspillé en moulins à vents...

à écrit le 14/08/2022 à 22:53
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Le problème c'est que dans tous les domaines nos procédures préalables sont trop lentes et lourds... Sans aller dans des extrêmes de dictatures ou le respect des autres est un détail, l'Espagne ou les pays scandinaves peuvent faire un grand projet en...

le 15/08/2022 à 10:42
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Nous avons voté le principe de précaution, les lois et les projets sont donc lié à ce principe qui fait partie de la Constitution. Quand le politique fait de la démagogie à outrance sans se préoccuper des conséquences.

à écrit le 14/08/2022 à 21:20
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Pour réduire son retard de souveraineté la France de gauche veut attirer des idiots censes investir massivement. Quand ca sera fait le bon peuple hypertolerant va expliquer qu'il faut nationaliser les surpofits pour reduire les inégalités. He, ça ...

à écrit le 14/08/2022 à 21:10
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La France a un plan .Doit on avoir peur ?

à écrit le 14/08/2022 à 20:55
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Pour résumer, nous allons développer encore plus d'énergies renouvelables intermittentes et aléatoires pour pallier le manque de gaz russe et la dépendance à la filière gazière qui provient justement du développement sans discernement des énergies in...

à écrit le 14/08/2022 à 19:01
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Avant de se poser la question de savoir si on est retard ou pas, il serait plus pertinent de savoir si ce modèle nous correspond ou non. Avec des pics de consommation pendant les nuits hivernales, le photovoltaïque n'a par exemple peu d'utilité en Fr...

le 14/08/2022 à 20:22
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Il y a un hic dans le raisonnement. Le gaz peut être stocké. Si on a moins de gaz et plus de renouvelables, on utilise le gaz ou le nucléaire que dans le cas de ces pics de consommation. Non?

le 15/08/2022 à 20:44
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Réponse à Math: Vous avez en partie raison mais votre analyse pose plusieurs problèmes de taille. Il est en effet possible de développer les filières de production électrique non pilotables comme l'éolien et à un degré moindre le photovoltaïque et...

à écrit le 14/08/2022 à 18:04
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C'est l'opportunité qu'attendaient les entreprises du secteur, souvent étrangères : une raison de s'exempter des règles habituelles s'imposant à toutes les installations ayant un impact sur l'environnement. Et bien sûr ils peuvent compter sur ce gouv...

à écrit le 14/08/2022 à 17:36
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Les panneaux photovoltaiques, j'y songe depuis bien longtemps, mais pour avoir vu des devis extravagants, et nombre d'installations mal conçues et mal faites j'en installerai seulement quand je pourrai personnellement en faire le montage ET que je p...

à écrit le 14/08/2022 à 16:53
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Vite, il faut copier la politique énergétique de l'Allemagne, pour le même résultat. La construction d'éoliennes devrait être arrêtée, et les panneaux solaires, et des chauffes eau solaire devraient être construits sur les toits des bâtiments, et no...

à écrit le 14/08/2022 à 16:50
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Un retard par rapport a quoi? A notre dépense énergétique? Au gaspillage parce que non stockable? A moins que cela ne soit simplement par rapport a notre flemme que l'on veut appeler "modernité"!;-)

à écrit le 14/08/2022 à 16:19
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Toujours rien sur le houlomoteur, seule énergie non intermittente, qui ne dénature pas le paysage, et facile à mettre en œuvre. Pourtant, il y a deux prototypes qui fonctionnen rien qu'en France et L’État préfère continuer à subventionner des système...

à écrit le 14/08/2022 à 16:02
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Il y aura sûrement quelques commissions d'affaires pour certains proches du pouvoir, voire quelques rétro-commissions. Notamment s'il y a des achats ou ventes de quelques grosses entreprises. D'où l'utilité économique pour certains de ces projets trè...

à écrit le 14/08/2022 à 15:40
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Bonjour, Bon il est claire que la France est en retard sur le développement des énergies renouvelables.... Peux d'habitation sont équipées de panneaux photovoltaïques et les entreprises encore moins ... Bien sûr ils ne faut pas le dire...

le 14/08/2022 à 17:59
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C'est sûr, il faut se dépêcher de rattraper notre retard sur l'Allemagne, qui comme tout le monde peut le constater est toujours dépendante du gaz russe après 1000 milliards dépensés dans les énergies aléatoires. Du moins c'est ce que pensent les ent...

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